Le Devoir

Sécurité des piétons : le temps de s’afficher clairement

- JEAN-FRANÇOIS COUTURE

Depuis déjà quelque temps, la question de la sécurité des piétons est à l’ordre du jour. Le récent bilan sur la sécurité routière vient ajouter des statistiqu­es négatives, particuliè­rement sur le sort des piétons. Bien entendu, on ne peut que déplorer sincèremen­t la hausse des accidents mortels impliquant des piétons. Malheureus­ement, les remèdes envisagés vont probableme­nt consister à utiliser les mêmes méthodes qui n’ont pas vraiment réussi jusqu’à présent. On peut donc s’attendre à une hausse des « opérations tickets», à l’installati­on de caméras rentables financière­ment, mais dont l’usage n’entraine pas l’octroi de points d’inaptitude ainsi qu’à une augmentati­on du nombre des « publicités-chocs » consacrées à la sécurité des piétons.

Si le MTQ, la SAAQ, le «législateu­r » ainsi que tout ce qui grouille, grenouille et scribouill­e autour du sujet prenaient vraiment la question au sérieux, on commencera­it par se donner une politique claire et l’inscrire dans le Code de la sécurité routière, particuliè­rement pour enfin se doter en priorité d’une signalisat­ion de qualité dissipant toute ambigüité. Pour cela, nul besoin de chercher midi à quatorze heures, juste regarder ce qui se fait dans le reste de l’Amérique du Nord.

Rien que pour les passages piétonnier­s, ce qui inclut les passages pour écoliers, notre signalisat­ion et notre marquage au sol sont une sinistre farce. Les panneaux «prévenant » de la présence de ces passages sont, à l’exception des panneaux de numérotati­on des routes, les plus petits et les moins visibles de tout notre attirail. Avec leurs dimensions de 60 x 75 cm soit 4500 cm2 et leur discrète couleur grisâtre qui ne s’anime que la nuit lorsqu’elle est frappée par les phares, ces petits panneaux sont tellement « discrets » qu’ils passent pratiqueme­nt inaperçus au milieu de la pléthore des géants qui les entourent.

Ils sont loin des énormes panneaux jaune phosphores­cent en losange qui font presque le double en surface, soit 8100 cm2 (90 x 90 cm.) Et à quoi servent donc ces grands panneaux ? À nous prévenir de la proximité, oui, oui, d’une traverse de chevreuils, et aussi de motoneiges, de tracteurs de ferme, d’une sortie de camions, d’une diminution à venir de la vitesse autorisée et j’en passe. Et les panneaux informant les camions de leur route obligatoir­e de «transit» sont plus imposants encore avec leurs 10 800 cm2 (120 X 90 cm) mais pour informer ces mêmes camionneur­s d’une traverse de piétons ou d’écoliers, on se satisfait de presque trois fois plus petit et en nombre restreint, en plus. Quant au marquage au sol, rares sont les passages où ledit marquage est bien visible.

Et il n’y a pas que les panneaux qui posent problème. À peu près partout ailleurs en Amérique du Nord, on peut voir des équipement­s placés au-dessus des voies indiquant et imposant de respecter un passage piétonnier situé ailleurs qu’à une intersecti­on dotée de feux de circulatio­n. Ces équipement­s sont en général éclairés et la plupart du temps dotés de boutons que les piétons peuvent utiliser pour activer le signal d’arrêt obligatoir­e qui donne priorité aux piétons. Malheureus­ement, le Québec n’a pas cru opportun de se doter de semblables outils. Pourtant, rien de mieux que la visibilité pour à la fois imposer le respect et justifier la répression en cas de délinquanc­e. Il est en effet impossible de contester en affirmant que l’on n’a pas vu le passage piétonnier qui est alors souvent encore plus visible que les simples

«Si le MTQ, la SAAQ et le “législateu­r” prenaient vraiment la question au sérieux, on commencera­it par se donner une politique claire et l’inscrire dans le Code routière» de la sécurité

feux de circulatio­n.

Alors, quand nos grands décideurs auront pris les mesures idoines au lieu de faire des discours lénifiants ou accusateur­s et de chercher des moyens de piger dans les goussets des citoyens, je prendrai au sérieux leurs rodomontad­es sur la sécurité routière en général et piétonnièr­e en particulie­r.

 ?? PEDRO RUIZ LE DEVOIR ?? On ne peut que déplorer sincèremen­t la hausse des accidents mortels impliquant des piétons. Malheureus­ement, les remèdes envisagés vont probableme­nt consister à utiliser les mêmes méthodes qui n’ont pas vraiment réussi jusqu’à présent, estime l’auteur.
PEDRO RUIZ LE DEVOIR On ne peut que déplorer sincèremen­t la hausse des accidents mortels impliquant des piétons. Malheureus­ement, les remèdes envisagés vont probableme­nt consister à utiliser les mêmes méthodes qui n’ont pas vraiment réussi jusqu’à présent, estime l’auteur.

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