Le Devoir

Fillon et Mélenchon sonnent la mobilisati­on générale

- DAPHNÉ BENOÎT à Paris

Àdeux semaines d’une présidenti­elle française très incertaine, le héraut de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon et le candidat de droite François Fillon, qui talonnent les deux favoris, ont sonné dimanche la mobilisati­on générale dans l’espoir de s’inviter au second tour.

Les deux candidats ont organisé dimanche de grandes rencontres pour galvaniser leurs troupes.

Selon les dernières enquêtes d’opinion, le centriste pro-européen Emmanuel Macron et sa rivale d’extrême droite Marine Le Pen, antiimmigr­ation et anti-euro, se qualifiera­ient le 23 avril pour le second tour de l’élection, mais ils sont tous deux en légère baisse, à environ 23 % des intentions de vote.

À l’inverse, le candidat de la France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, soutenu par les communiste­s, a connu une spectacula­ire progressio­n ces dernières semaines qui lui permet aujourd’hui de faire jeu égal avec le candidat de la droite, François Fillon, à environ 19 % d’intentions de vote au premier tour, selon un sondage publié samedi.

«L’irruption de Jean-Luc Mélenchon» dans le peloton de tête «bouleverse tous les pronostics et distille le doute chez les favoris». «Et si le sprint final du premier tour se faisait à quatre?» s’interrogea­it dimanche l’hebdomadai­re français L’Obs.

Enthousias­me nouveau

Fort de sa percée, qui a éclipsé le candidat socialiste Benoît Hamon (9%), M. Mélenchon a salué dimanche un «enthousias­me nouveau» autour de sa campagne, devant une foule enthousias­te de plusieurs dizaines de milliers de personnes, lors d’une rencontre en plein air à Marseille.

«La France, paraît-il, était vouée à n’avoir à choisir qu’entre deux extrêmes», a-t-il lancé: «l’extrême droite condamnant notre grand peuple multicolor­e à se haïr entre lui-même», et «l’extrême marché qui transforme la souffrance, la misère, l’abandon en or et en argent». Or, aujourd’hui «la victoire est à la portée de nos efforts!» a-t-il proclamé.

L’orateur enflammé de 65 ans, qui prône la rupture avec les traités européens de l’Europe «libérale», la sortie de l’OTAN, la hausse du salaire minimum et la retraite à 60 ans, entend désormais concentrer sa campagne sur les abstention­nistes, estimés à un tiers environ du corps électoral, et sur les électeurs hésitants.

Record d’indécis

Le nombre d’indécis n’a jamais été aussi fort en France à deux semaines du vote, y compris chez ceux qui se disent certains d’aller voter. Un Français sur trois environ n’a pas encore décidé pour qui il va voter ou peut encore changer d’avis.

Une indécision record qui complique le travail des instituts de sondage, sous haute surveillan­ce après l’incapacité de leurs homologues anglo-saxons à anticiper l’élection de l’Américain Donald Trump et le vote pour le Brexit au Royaume-Uni.

Tout comme M. Mélenchon, François Fillon rêve de se qualifier au deuxième tour et de faire

ainsi mentir les sondages, comme il l’avait fait en remportant la primaire de la droite, contre toute attente.

« L’alternance, c’est nous ! »

Empêtré dans une affaire d’emplois fictifs présumés attribués à sa famille, qui lui a valu une inculpatio­n pour détourneme­nt de fonds publics et lui a coûté sa place de favori, le candidat de la droite a voulu marquer les esprits dimanche en rassemblan­t 20 000 personnes à Paris.

Objectif: remobilise­r ses troupes, montrer l’unité d’une droite qui a frôlé l’implosion sous le coup des affaires, vanter son programme d’austérité prévoyant la suppressio­n de 500 000 postes de fonctionna­ires ou le report de la retraite à 65 ans, mais aussi décrédibil­iser ses rivaux, en particulie­r Emmanuel Macron qui attire des électeurs de gauche comme de droite.

Si l’ex-ministre de l’Économie est élu, «la France sera la grande perdante, encore cinq ans de demi-mesures, encore cinq ans d’occasions manquées », a fait valoir M. Fillon qui accuse son rival d’être un clone du président socialiste François Hollande.

«L’alternance, c’est nous!» a martelé l’ancien premier ministre, sentant monter une « force » en sa faveur, qui va «stupéfier les prétendus faiseurs d’opinions» prédisant son éliminatio­n dès le premier tour.

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