Le Devoir

Un coup de pouce à l’industrie du transport électrique

Québec versera une aide de 4,4 millions sur 5 ans à une nouvelle grappe industriel­le

- STÉPHANE BAILLARGEO­N

Pas moins de quatre ministres se sont déplacés et réunis à Montréal lundi matin pour annoncer le soutien gouverneme­ntal de 4,4 millions sur cinq ans à une nouvelle grappe industriel­le consacrée aux véhicules électrique­s et intelligen­ts.

L’annonce a été faite en clôture du Forum de mobilisati­on des forces vives du secteur comptant une centaine d’entreprise­s spécialisé­es.

Quatre ministres donc — Dominique Anglade, Laurent Lessard, Pierre Arcand et David Heurtel — pour dévoiler l’injection de moins d’un million par année, dont 500 000 $ en 2017 afin de mettre en place la nouvelle structure.

Est-ce beaucoup trop peu et beaucoup trop tard dans un nouveau monde des transports plus verts et intelligen­ts où sont déjà largement engagés des géants d’affaires du XXIe siècle comme Google, Uber ou Tesla?

«Effectivem­ent, il y a de gros joueurs, répond Alexandre Taillefer, président du comité consultati­f de la nouvelle grappe, en poste depuis décembre dernier. Il y a par contre énormément de potentiel dans les marchés de niche.»

Il donne l’exemple du transport scolaire où Autobus Lion de Saint-Jérôme fabrique des véhicules entièremen­t électrique­s depuis 2011, les exporte depuis 2015, notamment en Californie. La compagnie québécoise demeure la seule dans ce créneau en Amérique du Nord.

«À cause de l’automatisa­tion du transport, à cause des nouveaux mécanismes de production, il y a des capacités de rentabilis­er les entreprise­s qui vont construire entre 200 et 2000 véhicules [par année] », poursuit M. Taillefer, lui-même propriétai­re de la flotte de taxis Téo, entièremen­t électrique.

« On ne pense pas positionne­r le Québec dans des véhicules de masse, distribués à 500 000 exemplaire­s. Ça nous apparaît illusoire. Mais dans tous les autres secteurs […] le Québec est un donneur d’ordres, un acquéreur de matériel roulant. Il n’y a pas de raison qu’on ne développe pas des filières intérieure­s en mesure de générer de grandes entreprise­s. »

Pôle de compétitiv­ité

Une grappe industriel­le est une concentrat­ion d’entreprise­s dans un domaine particulie­r. La grappe sera constituée ce printemps, et son plan d’affaires, déposé à l’automne.

Le pôle de compétitiv­ité des véhicules électrique­s et intelligen­ts se concentrer­a sur le transport terrestre (individuel, collectif ou spécialisé). Selon les documents officiels, il misera sur les atouts de toutes les régions du Québec tout en mettant à profit les efforts des partenaire­s menant déjà des activités dans un domaine ciblé.

Les ministres présents ont aussi rappelé d’autres engagement­s du gouverneme­nt en faveur de l’électrific­ation. Le petit paquet de 4,4 millions de la grappe s’arrime à d’autres sommes beaucoup plus substantie­lles, dont le Plan d’action en électrific­ation des transports 2015-2020 financé à hauteur de 255 millions. Une loi zéro émission adoptée l’an dernier forcera l’offre de véhicules moins polluants, souvent branchable­s.

Québec a aussi comme espoir de faire rouler ici 100 000 véhicules électrique­s d’ici 2020. L’objectif est loin d’être atteint avec 13 454 plaques VE (pour véhicule électrique) recensées en date du 31 décembre 2016.

Le programme Roulez électrique créé en 2012 offre une aide pouvant atteindre 8000 $ à l’achat d’une de ces autos moins polluantes.

La Norvège comme modèle

Par contraste, la Norvège, plus grand producteur de pétrole en Europe, a déjà passé la barre des 100 000 véhicules électrique­s. D’ici trois ans, ils seront 400 000 sur les routes. Le pays d’environ 5,3 millions d’habitants pense pouvoir interdire les moteurs exclusivem­ent thermiques d’ici 2025.

Le Québec manque-t-il d’ambition par rapport à la Norvège?

« Vous nous comparez à la Norvège, comparez-nous à d’autres États: comparez-nous au Texas et nous sommes très ambitieux, répond David Heurtel, ministre du Développem­ent durable, de l’Environnem­ent et de la Lutte contre les changement­s climatique­s. La Norvège a un plan plus ambitieux que le nôtre, mais elle a aussi un fonds souverain de 800 milliards de dollars pour financer ses choix. »

Il rappelle que le pays européen incite le transfert d’une source d’énergie à l’autre en taxant à 50 % les véhicules à essence et doute que les Québécois acceptent ce genre de sacrifice. Le ministre explique aussi que le pays scandinave ne présente pas les mêmes contrainte­s de distances qu’au Québec.

«Dans le Nord québécois, il faut un pick-up et il n’en existe pas, de pick-up électrique, dit M. Heurtel. Nos objectifs sont parmi les plus ambitieux au monde. »

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ANNIK MH DE CARUFEL LE DEVOIR L’homme d’affaires Alexandre Taillefer, président du conseil consultati­f de la grappe industriel­le consacrée aux véhicules électrique­s et intelligen­ts, était entouré notamment des ministres Laurent Lessard et David Heurtel lors de l’annonce faite en...

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