Le Devoir

Émouvantes funéraille­s pour Janine Sutto

Famille, politicien­s et « camarades » de jeu de « la Notre-Dame-du-Théâtre » se sont rassemblés, lundi, pour offrir leurs adieux à la grande comédienne

- CAROLINE MONTPETIT

Un torrent d’applaudiss­ements a retenti alors que le cercueil de la comédienne Janine Sutto s’est ébranlé vers la sortie de l’église SaintGerma­in d’Outremont, lundi après-midi, au terme de la cérémonie funéraire qui lui rendait hommage.

On applaudiss­ait la comédienne aux 75 ans de carrière, dont le jeu a marqué les publics de plusieurs génération­s, on applaudiss­ait la «camarade», qui, à plus de 90 ans, était encore de toutes les premières de théâtre en ville, on applaudiss­ait aussi la mère et la grand-mère, la nonna, comme l’appelaient ses petits-enfants, qui faisait ainsi son dernier salut sans espoir de rappel.

«Janine Sutto était un peu notre mère à tous », a fait valoir le dramaturge René Richard Cyr, qui a donné à Janine Sutto son dernier rôle au théâtre, dans une reprise chantée des Belles-soeurs, de Michel Tremblay, qui a mené la production en France.

Le premier ministre du Québec, Philippe Couillard, qui assistait à la cérémonie, se souvenait d’ailleurs, comme le maire de Montréal Denis Coderre, de la dame Pénélope qui donnait la réplique au major Plum-Pouding, dans l’émission pour enfants du même nom qui était diffusée à l’antenne de Radio-Canada en 1973.

Un lieu en son nom

Prenant la parole à la suite de Philippe Couillard dans l’église, Denis Coderre a dit avoir la ferme intention de mettre la Commission de toponymie à l’oeuvre pour «voir son nom souvent dans la métropole».

Ce souhait a trouvé écho dans le témoignage de la comédienne Louise Latraverse, amie de longue date de la défunte, qui a émis le voeu qu’un théâtre du Québec prenne le nom de Janine Sutto.

«Décrire Janine, c’est aussi difficile que d’expliquer le mystère du théâtre », a dit Mme Latraverse.

Le gendre de Mme Sutto, le journalist­e Jean-François Lépine, qui est le conjoint de Mireille Deyglun, la fille de Janine Sutto, et leurs deux enfants, Sophie et Philippe, ont livré un témoignage émouvant à l’assemblée. Mireille Deyglun a choisi de garder le silence. En 2016, Jean-François Lépine a signé une biographie de sa belle-mère, Janine Sutto. Vivre avec le destin, en 2016.

Connue et aimée de tous

La cérémonie s’est déroulée sous la présidence de l’archevêque de Montréal, monseigneu­r Christian Lépine. Des chansons de Félix Leclerc, qu’a connu Janine Sutto à Vaudreuil, mais aussi de Claude Dubois et de Jacques Brel ont été interprété­es par les chanteuses Catherine Major et Kathleen Fortin, tandis que les pièces classiques étaient livrées par le quatuor de la paroisse SaintGerma­in d’Outremont.

Janine Sutto, «la petite grande femme », comme l’a désignée le premier ministre Couillard, était connue de tous et connaissai­t tout le monde.

Plusieurs génération­s de comédiens, de gens de théâtre et du milieu de la télévision, de musiciens, ainsi que plusieurs politicien­s s’étaient déplacés pour l’occasion. Plusieurs ont d’ailleurs souligné à quel point elle tenait à l’amitié de ses « camarades » du milieu.

Du côté des politicien­s, outre le premier ministre du Québec et le maire de Montréal, la ministre du Patrimoine canadien, Mélanie Joly, était présente, ainsi que les anciens premiers ministres du Québec Pauline Marois et Bernard Landry.

Janine Sutto estimait qu’il fallait critiquer pour avancer, a relaté sa petite-fille Sophie Lépine.

Aussi, le comédien Yves Jacques, qu’elle avait pris sous son aile, a-t-il souligné à la fois la générosité de Janine Sutto et sa franchise.

Lui ayant rendu visite il y a un mois alors qu’il travaillai­t à Londres, il se souvient de l’avoir entendu dire: « Les Anglais coupent dans Shakespear­e, pourquoi on ne couperait pas dans Molière?»

C’est le comédien André Robitaille, également très proche de Mme Sutto, qui agissait comme maître de cérémonie.

À la fin de sa vie, Janine Sutto l’avait approché pour tourner un entretien avec elle, qui allait devenir le documentai­re Janine Sutto, à sa manière. C’était, en quelque sorte, son testament. Dans un extrait diffusé lundi, Sutto y manifestai­t son enthousias­me envers la relève théâtrale au Québec.

À la suite des funéraille­s, un hommage à Janine Sutto était rendu au Théâtre du Nouveau Monde, dont elle a fait partie de la première programmat­ion, dans L’avare de Molière, en 1951.

« Décrire Janine, c’est aussi difficile que d’expliquer le mystère du théâtre Louise Latraverse

 ?? ANNIK MH DE CARUFEL LE DEVOIR ?? La fille de Janine Sutto, la comédienne Mireille Deyglun, et son gendre, l’ancien journalist­e JeanFranço­is Lépine, à leur arrivée à l’église Saint-Germain, à Outremont
ANNIK MH DE CARUFEL LE DEVOIR La fille de Janine Sutto, la comédienne Mireille Deyglun, et son gendre, l’ancien journalist­e JeanFranço­is Lépine, à leur arrivée à l’église Saint-Germain, à Outremont

Newspapers in French

Newspapers from Canada