Yvan Allaire plaide en faveur de c.a. activistes
Le président de l’IGOPP invite les administrateurs à se préoccuper de la légitimité sociale de leurs décisions
Les conseils d’administration peinent à sortir du carcan imposé par cette routine implacable conduisant à une rémunération excessive des hauts dirigeants. « Ça va prendre des conseils activistes dans ce monde d’investisseurs activistes », martèle Yvan Allaire.
S’exprimant à titre personnel dans une lettre publiée dans Le Devoir, le président du conseil de l’Institut sur la gouvernance (IGOPP) ramène les conseils devant leur responsabilité légale consistant à agir dans l’intérêt à long terme de l’entreprise.
Yvan Allaire ne se berce pas d’illusions et place l’hyperinfla- tion de la rémunération des hauts dirigeants dans une problématique complexe et difficile à endiguer ou à inverser. Il rappelle toutefois que les conseils doivent «se préoccuper de l’impact des montants payés à leurs dirigeants sur la légitimité sociale de leur entreprise ».
Le cas Bombardier
Cette lettre est publiée alors que la réprobation sociale à l’encontre des augmentations salariales accordées à la haute direction de Bombardier est encore ressentie. Yvan Allaire ne fait pas référence au manufacturier québécois. Il mentionne cependant, lors d’un entretien au Devoir, que les entreprises vont éviter le débat sur la rémunération en se référant à des « principes de rémunération généralement reconnus», que tous appliquent, et en se fiant aux politiques de rémunération d’entreprises dites comparables. Si tollé il y a, l’agitation sera de brève durée dans les médias. «Habituellement, ajoute-t-il. Car encore faut-il que la performance soit là. Et qu’en présence de difficultés, les dirigeants assument leur responsabilité.»
Cette tendance généralisée aux émoluments stratosphériques s’appuie sur cette proportion toujours plus importante de la rémunération arrimée à la performance financière de court terme et à la valeur de l’action de l’entreprise. À l’IGOPP, on se fait le défenseur de l’élimination des options et de la rémunération basée sur des critères non reliés à la performance du titre.
«Le maillon faible reste cette comparaison avec ce qui se fait ailleurs.» Il en résulte que «le montant total de la rémunération est établi en référence à celui octroyé aux dirigeants d’entreprises dites comparables ; cette démarche se veut une façon de mesurer la valeur “marchande” du dirigeant, que l’on estime plus mobile qu’à une autre époque», écrit Yvan Allaire, dans sa lettre cosignée avec François Dauphin.
Aussi, le portefeuille repère comprend très souvent des entreprises américaines, ce qui explique cette convergence au fil du temps des écarts de rémunération entre les ratios mesurés au Canada et aux ÉtatsUnis. «Il va falloir que les conseils mesurent le risque de perdre leur dirigeant s’il est moins bien rémunéré qu’ailleurs.»
Comment évaluer?
On ne saurait toutefois se soustraire au cas par cas. Au demeurant, la rémunération sera associée à l’objectif. Dans son texte, Yvan Allaire fait référence à une situation de redressement d’entreprise. La trésorerie et les flux financiers étant alors stratégiques, voire critiques, le recours aux options en appui au recrutement des dirigeants appelés en renfort devient alors inévitable.
Et l’auteur de comparer avec une société en continuité stratégique et de demander: «Ceux-ci devraient-ils être moins bien payés que ceux-là, surtout si les causes des difficultés de l’entreprise ne leur sont pas imputables?»
«Il va falloir que les conseils mesurent le risque de perdre leur dirigeant »