Le Devoir

Vic Toews fera l’objet d’une enquête du Conseil canadien de la magistratu­re

- HÉLÈNE BUZZETTI Correspond­ante parlementa­ire à Ottawa

L’ancien ministre de la Justice sous Stephen Harper, Vic Toews, fait l’objet d’une enquête du Conseil canadien de la magistratu­re. La « police des juges » doit déterminer si celui qui a revêtu la toge peut la conserver à la lumière des constats d’infraction le visant rendus par la commissair­e aux conflits d’intérêts et à l’éthique.

En attendant, M. Toews peut continuer de siéger. «La juridictio­n très spécifique de la Commissair­e à l’éthique […] est distincte de celle du Conseil canadien de la magistratu­re, rappelle dans une déclaratio­n écrite le juge en chef du Manitoba, Glenn Joyal. Aussi, il reste juge en fonction de la Cour supérieure.»

Vendredi, la commissair­e Mary Dawson a tranché que Vic Toews avait contrevenu à deux reprises à la Loi sur les conflits d’intérêts après avoir quitté la vie politique, en juillet 2013.

Dans le premier cas, M. Toews a offert ses services juridiques à une communauté autochtone qui conteste le transfert d’un terrain militaire de Winnipeg à la Société immobilièr­e du Canada (SIC). Le hic, c’est que M. Toews est celui qui avait autorisé ce transfert lorsqu’il était ministre. Il s’est rendu coupable de «changement de camp», a tranché la commissair­e.

Dans l’autre cas, M. Toews a offert ses services à une communauté autochtone qui avait sollicité son aide au cours de sa dernière année de mandat, ce qui est aussi interdit.

M. Toews a été nommé juge par les conservate­urs en mars 2014. Le Conseil canadien de la magistratu­re (CCM) confirme l’ouverture d’un dossier à son sujet.

« Le directeur exécutif du Conseil peut ouvrir une enquête sur la base de n’importe quelle informatio­n qui parvient à ses oreilles, explique la directrice des communicat­ions, Johanna Laporte. Il n’a pas besoin d’attendre une plainte. » Le directeur en était à cette réflexion lorsqu’un citoyen a déposé une plainte, ce qui a précipité les choses.

Un juge se penchera sur le dossier. Il pourrait trancher qu’à sa face même, la cause ne mérite pas d’aller plus loin et la rejeter. Il pourrait solliciter la version des faits de M. Toews et se décider par la suite. Le dossier pourrait aller plus loin et être soumis à un comité d’enquête qui devrait déterminer si « l’inconduite, si inconduite il y a, est assez nuisible pour miner la confiance du public et que le juge soit révoqué ».

Dans l’affirmativ­e, une enquête publique serait alors ouverte. En moyenne, les plaintes au CCM se règlent en trois à six mois.

Ce n’est pas la première tache qui s’ajoute au dossier de M. Toews. En 2015, le Globe and Mail a révélé que M. Toews avait contesté devant les tribunaux — en vain — une saisie de son salaire de juge ordonnée par un tribunal québécois pour payer un loyer en souffrance.

Lorsqu’il était député, M. Toews habitait à Gatineau. Son locateur avait obtenu de la Régie du logement une décision le condamnant à lui verser 3900$ plus intérêts pour trois mois de loyer impayé en 2013. M. Toews contestait la saisie au motif qu’il n’avait pas compris la décision initiale parce qu’elle était rédigée en français.

Le directeur exécutif du Conseil songeait à ouvrir une enquête contre Vic Toews lorsqu’un citoyen a déposé une plainte, ce qui a précipité les choses

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