Misères des ateliers
Quatre ans après la tragédie du Rana Plaza, Human Rights Watch déplore l’opacité des filières d’approvisionnement de dizaines d’entreprises
Quatre ans après la tragédie du Rana Plaza en banlieue de Dacca, des dizaines d’entreprises mondiales ne respectent pas les règles d’un programme qui devait hausser la sécurité dans les ateliers de confection de vêtements au Bangladesh.
En fait, la majorité des entreprises d’habillement contacté par des organisations de défenses des droits de la personne refusent toujours de divulguer des informations sur leurs fournisseurs ou dévoilent des données jugées incomplètes. Ces renseignements s’avèrent cruciaux pour remonter la filière des vêtements et des chaussures et comprendre qui fournit quoi et dans quelles conditions de travail.
Aux fins de l’étude mondiale, 72 entreprises de vêtement ont été contactées par neuf organisations internationales. L’enquête pilotée par l’organisme Human Rights Watch (HRW) a été diffusée lundi, quatre ans jour pour jour après l’effondrement du Rana Plaza qui a fait 1130 morts et 2500 blessés. Le Bangladesh est la mercerie du monde avec 4000 usines et quatre millions de lumpenprolétaires aux machines des ateliers de misère.
Vingt-neuf compagnies ont accepté de révéler leurs sources d’approvisionnement. Dix n’ont carrément pas répondu à la coalition: Armani, Carter’s, Forever 21, Urban Outfitters, Ralph Lauren Corporation, Matalan, River Island, Sports Direct, Shop Direct et Rip Curl. Les autres y sont allés de réponses partielles.
Et ici?
Trois entreprises canadiennes figurent parmi les compagnies jugées plus ou moins opaques. Une seule fait preuve d’une transparence exemplaire.
Loblaw ne fournit aucune liste, mais promet de s’engager dans cette voie et une première divulgation des usines sources a été faite en février. L’usine Rana Plaza de la capitale Dacca fabriquait des vêtements pour la marque espagnole Mango, mais aussi pour la marque maison de Loblaw, Joe Fresh.
«Nous nous engageons à nous approvisionner de façon responsable, dit au Devoir Johanne Héroux, directrice principale, Affaires corporatives et communications de la compagnie. À cette fin, nous travaillons de concert avec des marques d’envergure mondiale, des organismes non gouvernementaux et des groupes de travail pour améliorer le degré de transparence et, ultimement, les conditions de travail à l’échelle mondiale. »
Canadian Tire ne publiait déjà aucune information sur ses fournisseurs. Selon HRW, elle refuse de s’engager dans un Pacte pour la transparence (ou Pledge), un engagement minimum en matière de publication d’information sur les filières d’approvisionnement. L’entreprise qui possède notamment L’Équipeur voit les choses autrement.
«Par l’entremise de notre Code d’éthique professionnelle à l’intention des fournisseurs, nous décrivons clairement nos normes publiées auprès des fournisseurs avec lesquels nous travaillons à travers le monde, écrit au Devoir Joscelyn Dosanjh, directeur des communications de Canadian Tire. Nous faisons appel à des cabinets de vérification comptable tiers de renommée internationale afin d’assurer que les usines répondent à ces normes. Nous sommes un membre fondateur de l’Alliance for Bangladesh Worker Safety depuis sa création, démontrant ainsi notre engagement envers les changements durables. »
La Compagnie de la Baie d’Hudson
fournit une liste incomplète de ses fournisseurs aux enquêteurs de HRW. Elle maintient le statu quo et ne promet pas de modifier cette pratique.
Mountain Equipment Co-op
(MEC) ressort honorablement du lot avec ses pratiques transparentes. La compagnie a fourni les noms et adresses de toutes les usines de confection et de certaines installations de traitement de sa marchandise. Elle est en « alignement presque total avec le pacte pour la transparence [ou Pledge], un engagement éthique en matière de divulgation des informations sur les filières d’approvisionnement».