L’Alliance syndicale demande de ne pas prolonger la médiation
Alors que les conventions collectives dans l’industrie de la construction viennent à échéance dans les prochains jours, l’Alliance syndicale demande à la ministre du Travail, Dominique Vien, de ne pas prolonger le mandat des médiateurs et de laisser libre cours au rapport de force.
De l’autre côté, au moins une association patronale, l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ), écrit aussi à la ministre du Travail pour lui demander, au contraire, de prolonger la période de médiation. Les mandats des médiateurs arriveront à échéance le 30 avril et le 2 mai à minuit, selon le soussecteur de l’industrie de la construction.
Au cours d’une entrevue avec La Presse canadienne, lundi, le porte-parole de l’Alliance syndicale, Michel Trépanier, a dit croire que la négociation ne devrait pas traîner en longueur inutilement à ce stade-ci, sans qu’il y ait plus d’équilibre dans le rapport de force. À partir du moment où les mandats des médiateurs prendraient fin s’ensuivrait une période de 21 jours avant de pouvoir éventuellement exercer des moyens de pression.
M. Trépanier fait le pari qu’avec la pression des 21 jours pour s’entendre, la négociation pourrait être plus fructueuse, avec un rapport de force plus équilibré, selon lui. Il assure que son but n’est pas d’exercer des moyens de pression, mais d’en arriver à une entente négociée le plus rapidement possible. Il a donc écrit à la ministre Vien, lundi, pour lui demander de ne pas prolonger les mandats des médiateurs, afin «de ne pas [faire] traîner la négociation de façon inutile» et de laisser s’« équilibrer les forces».
«Notre intention est claire, ç’a toujours été la même: en venir à une entente négociée et dans les meilleurs délais. Cependant, nous avons besoin d’être à forces égales. [Et être à forces égales], c’est peut-être avoir recours à des moyens de pression», a-t-il admis.
Pas de rétroactivité
Il importe de souligner que, dans l’industrie de la construction, contrairement aux autres secteurs d’activité, les éventuelles augmentations de salaire qui sont négociées ne sont pas rétroactives à la date d’échéance de la convention collective. M. Trépanier argue qu’à cause de cette absence de rétroactivité, ce sont les ouvriers qui perdent au change et que les entrepreneurs n’ont pas intérêt à régler au plus vite, puisqu’ils épargnent en augmentations de salaire.
L’Alliance syndicale a fait le calcul qu’un ouvrier perd 51$ par semaine, à cause de cette absence de rétroactivité, en supposant qu’il toucherait une augmentation de 3%. Et M. Trépanier ajoute que, selon ses calculs, les entrepreneurs épargneraient ainsi 8 millions.
De leur côté, les associations patronales se sont montrées étonnées de cette demande de l’Alliance syndicale. «On est franchement surpris de la demande, parce que la médiation a porté fruit dans la négociation ; elle a vraiment donné des résultats. Ça nous préoccupe qu’on ne veuille plus de médiation », a dit Éric Côté, responsable des relations avec les médias à l’Association de la construction du Québec — l’une des quatre associations d’entrepreneurs.
M. Côté se questionne sur les motifs réels qui se cachent derrière cette demande de l’Alliance syndicale. « Est-ce que c’est tout simplement une stratégie pour arriver à la grève plus rapidement? On est en droit de se poser la question.»
«Quand on voit ça, on a l’impression que la partie syndicale semble être guidée par une volonté de déclencher la grève générale dans tous les secteurs le plus rapidement possible», a commenté de son côté François-William Simard, viceprésident au développement stratégique et aux communications à l’APCHQ.
Tant M. Côté, de l’ACQ, que M. Simard, de l’APCHQ, soutiennent que, si plusieurs journées de négociation ont été perdues, l’Alliance syndicale n’a qu’elle à blâmer, puisqu’elle aurait annulé plusieurs journées de négociation ou a tardé à entreprendre les discussions.
L’Alliance syndicale regroupe les cinq organisations syndicales de l’industrie, soit la FTQ-Construction, le Conseil provincial du Québec des métiers de la construction (International), le Syndicat québécois de la construction, la CSD-Construction et la CSNConstruction. Les conventions collectives arrivent à échéance le 30 avril. Elles concernent 175 000 travailleurs dans les secteurs résidentiel, génie civil et voirie de même qu’industriel, commercial et institutionnel.