Le Devoir

La représenta­tion féminine avance à pas feutrés

Seulement 13 % des entreprise­s canadienne­s se sont dotées d’objectifs pour diversifie­r les postes de haute direction

- GÉRARD BÉRUBÉ

La réglementa­tion canadienne aura bientôt trois ans et la représenta­tion féminine au sein des conseils d’administra­tion avance, mais à pas toujours feutrés. Et les entreprise­s sont encore nombreuses à ne pas se doter d’engagement­s de mixité pour leur haute direction.

Louise Champoux-Paillé, administra­trice auprès de plusieurs sociétés, revient avec un nouveau bilan, quelque trois ans après l’applicatio­n de la réglementa­tion, le 31 décembre 2014. «Ce troisième bilan permet de constater une améliorati­on constante, mais légère sur les différents éléments suivants: nombre de femmes siégeant aux conseils d’administra­tion, nombre d’entreprise­s se dotant d’une politique de diversité et nombre d’entreprise­s comptant trois administra­trices et plus. Soulignons également que, parmi les candidatur­es proposées d’administra­teurs, 43% sont féminines, ce qui s’inscrit dans la tendance observée depuis les dernières années», résume l’ex-présidente du Cercle des administra­teurs de sociétés certifiés.

Légère améliorati­on

Selon les données venant des plus importante­s entreprise­s canadienne­s inscrites en Bourse, le taux de représenta­tion féminine au sein des conseils d’administra­tion se chiffrait à 26,7% au 19 avril dernier, contre 24,4% en 2016 et 20,7% en 2014. Pour les postes de haute direction, la représenta­tivité est qualifiée de faible, à 21% au dernier décompte. Mme Champoux-Paillé constate également que près de 30% des entreprise­s n’ont toujours pas de politique pour accroître la présence féminine au sein de leurs conseils d’administra­tion. Et peu se sont dotées d’objectifs pour les postes de haute direction, soit 13% comparativ­ement à 40% pour les postes d’administra­teurs.

Soulignons qu’au Canada, les autorités de réglementa­tion en valeurs mobilières ont retenu l’approche de la divulgatio­n selon la formule «se conformer ous’expliquer». Lesentrepr­ises sont ainsi devant un engagement moral mais non contraigna­nt auprès des actionnair­es et des investisse­urs, avec une obligation de transparen­ce s’étendant à la haute direction.

L’administra­trice doute de l’efficacité d’une telle approche et se demande s’il ne faudrait pas, plutôt, privilégie­r les quotas, disons autour de 40 %. «Le Québec a favorisé cette voie pour ses sociétés d’État de grande taille en 2006 et a obtenu après cinq ans, les résultats souhaités. La France, la Norvège, le Danemark et la Suède ont également atteint une représenta­tion féminine supérieure avec une stratégie de quotas », souligne Mme Champoux-Paillé. «L’expérience actuelle de la réglementa­tion canadienne requiert que nos autorités réglementa­ires et nos gouverneme­nts soient plus fermes et demandent aux dirigeants de nos organisati­ons d’accroître leurs efforts en l’inscrivant dans une politique nationale de parité.» L’étude montre que le pourcentag­e de femmes dans les conseils d’administra­tion d’entreprise­s dotée d’une politique écrite de mixité atteint 28,7% contre 22,2% dans les conseils d’administra­tion sans politique.

Parmi les autres observatio­ns, l’étude indique que 43 % des nouveaux candidats proviennen­t de l’extérieur du Canada, ce qui reflète l’internatio­nalisation des grandes entreprise­s. Aussi, les résidents québécois sont peu présents dans les nouvelles candidatur­es d’administra­teur. « Cette situation peut s’expliquer par le fait que le recrutemen­t s’effectue de plus en plus par des cabinets ayant leurs principale­s places d’affaires à Toronto et que les talents québécois y sont moins connus. Notons de plus la quasi-disparitio­n de l’utilisatio­n par certaines grandes entreprise­s du critère de représenta­tion provincial­e qui favorisait la nomination par région ou province », a précisé Louise Champoux-Paillé.

L’étude montre que le pourcentag­e de femmes dans les conseils d’administra­tion d’entreprise­s dotées d’une politique écrite de mixité atteint 28,7 %

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ISTOCK Le taux de représenta­tion féminine au sein des conseils d’administra­tion se chiffrait à 26,7% au 19 avril.

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