Le Devoir

Les policiers forcés de remettre leurs pantalons d’uniforme

- CAROLINE PLANTE à Québec

Le ministre de la Sécurité publique, Martin Coiteux, a déposé jeudi un projet de loi qui forcera les policiers à porter leur uniforme.

Mais les policiers pourront vraisembla­blement continuer d’orner leur uniforme de macarons ou de brassards, par exemple, pourvu qu’ils ne l’altèrent pas de façon «importante».

M. Coiteux n’a pas voulu préciser quels ajouts seraient tolérés ou prohibés, prétextant ne pas vouloir donner d’idées aux policiers. «Ce ne sera pas à moi de prendre les décisions à leur place en matière de manière précise d’exprimer un désaccord», a-t-il dit. Depuis environ trois ans, les policiers exercent des moyens de pression en portant des pantalons de camouflage pour protester contre la loi qui a imposé des changement­s à leur régime de retraite.

Le premier ministre, Philippe Couillard, s’était indigné en 2015 que des policiers du Service de police de la Ville de Montréal aient porté des pantalons de camouflage lors des funéraille­s d’État de Jacques Parizeau.

M. Coiteux avait récemment haussé le ton, se disant impatient de voir les policiers retourner à l’uniforme intégral, jugeant que le camouflage pouvait porter à confusion dans les moments de crise.

Une question de «crédibilit­é»

Jeudi, il a déclaré que la situation avait «trop perduré». « Les policiers et les constables spéciaux jouent un rôle essentiel en matière de sécurité publique et doivent respecter les plus hauts standards en matière de prévention et de sécurité. […] Le gouverneme­nt se voit dans l’obligation d’agir afin de rétablir la crédibilit­é et le respect envers la fonction d’agent de la paix», a-t-il dit.

Le projet de loi 133 prévoit des amendes salées pouvant atteindre 3000$ par jour en cas d’infraction. Le montant doublerait en cas de récidive.

En vertu de la pièce législativ­e, un directeur d’un corps de police ou l’autorité de laquelle relèvent les constables spéciaux aura l’obligation de transmettr­e un rapport d’infraction au Directeur des poursuites criminelle­s et pénales (DPCP).

Un syndicat ou une autre associatio­n qui pousse un policier ou un constable spécial à porter un uniforme non réglementa­ire serait aussi passible du double de l’amende prévue par le projet de loi.

Les policiers réfractair­es

Celui-ci a été très mal accueilli par la Fraternité des policiers de Montréal. Son président, Yves Francoeur, a promis de contester le projet de loi en cour s’il est adopté par les parlementa­ires.

«C’est certain qu’on va se battre devant les tribunaux. [… ] Je le répète: c’est un droit, on nous vole nos régimes de retraite, on a accepté moins de salaires pendant des années pour avoir un meilleur régime de retraite. Ce n’est pas facile d’être policier à Montréal», a-t-il dit à l’animateur Paul Arcand, sur les ondes du 98,5 FM jeudi. Les policiers municipaux n’ont pas le droit de grève, mais la Charte canadienne reconnaît leurs libertés d’associatio­n et d’expression.

L’Union des municipali­tés du Québec (UMQ), elle, a réagi tout autrement. Le projet de loi est positif, a fait savoir l’UMQ.

«Le phénomène du port de pantalons de camouflage comme moyen de pression chez certains policiers et constables spéciaux n’a que trop perduré au cours des dernières années, minant la confiance et le respect des citoyennes et des citoyens envers les forces policières. Les municipali­tés auront désormais les outils nécessaire­s pour faire respecter l’intégrité de l’uniforme policier lors de négociatio­ns. C’est l’institutio­n policière dans son ensemble qui en sortira gagnante », a déclaré Bernard Sévigny, président de l’UMQ et maire de Sherbrooke.

La Fraternité des policiers de Montréal a promis de contester le projet de loi en cour

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