Le Devoir

Un cadre de référence est demandé à l’INM

- ETIENNE PLAMONDON EMOND Collaborat­ion spéciale

L’Institut du Nouveau Monde (INM) a reçu, le 7 avril dernier, le mandat d’élaborer pour l’Union des municipali­tés du Québec (UMQ) un cadre de référence de participat­ion publique. Entrevue avec la nouvelle directrice générale de l’INM, Julie Caron-Malenfant, au sujet de ce projet et des enjeux de la démocratie municipale.

Seulement huit municipali­tés québécoise­s possédaien­t une politique de participat­ion publique lorsque l’Institut du Nouveau Monde (INM) a effectué sa dernière recension sur la question, au printemps 2015.

«Les pratiques ne sont pas nécessaire­ment très répandues et institutio­nnalisées», observe Julie Caron-Malenfant, qui a remplacé, le 1er mars dernier, Michel Venne comme directrice générale de cet organisme dont la mission consiste à accroître la participat­ion des citoyens à la vie démocratiq­ue.

Le 21 février 2017, lors de la commission parlementa­ire à l’Assemblée nationale entourant le projet de loi 122 sur la reconnaiss­ance d’une plus grande autonomie et de davantage de pouvoirs aux municipali­tés, l’INM a affirmé que l’élaboratio­n et l’adoption d’une politique d’informatio­n et de consultati­on devraient constituer une mesure obligatoir­e. De plus, l’organisme non partisan a indiqué que la loi devrait appeler les municipali­tés à élaborer une politique de participat­ion publique qui va au-delà de l’informatio­n et de la consultati­on pour intégrer des démarches de discussion, de délibérati­on et de collaborat­ion avec les citoyens.

«Le cadre réglementa­ire et légal actuel favorise les deux premiers échelons de la participat­ion, soit l’informatio­n et la consultati­on, qui sont des échelons importants, mais qui ne sont pas les plus riches», explique Mme Caron-Malenfant. Elle reconnaît que le «niveau ultime» de participat­ion publique, soit une collaborat­ion qui implique une délégation et un partage du pouvoir décisionne­l avec les citoyens, ne s’avère pas toujours souhaitabl­e ou nécessaire. Néanmoins, elle croit que si «on invite les acteurs publics à s’ouvrir à ces nouvelles pratiques, beaucoup de leur résistance à l’égard des processus consultati­fs pourrait tomber en vivant des processus plus intéressan­ts, plus contributi­fs et plus constructi­fs».

Un cadre pour l’UMQ

L’Institut invite le gouverneme­nt du Québec à obliger les municipali­tés à se doter d’une politique de participat­ion publique, mais a amorcé, le 7 avril dernier, un travail de collaborat­ion avec l’Union des municipali­tés du Québec (UMQ) pour élaborer un cadre de référence en la matière que les municipali­tés pourront s’approprier par la suite sur une base volontaire.

Julie Caron-Malenfant assure que cette démarche ne constitue pas une action stratégiqu­e pour faire avancer leur revendicat­ion. Elle n’y voit pas non plus de contradict­ion avec leur demande. «On croit que les bonnes pratiques doivent être adoptées le plus largement possible », précise-t-elle.

Des règles de l’art parfois exigeantes

Le cadre de référence sera fondé sur les huit règles de l’art de la participat­ion publique, déterminée­s par l’INM en 2013. Ces énoncés s’inspirent notamment des principes adoptés en la matière par l’Union européenne, l’Organisati­on pour la coopératio­n et le développem­ent économique­s (OCDE) et l’Internatio­nal Associatio­n for Impact Assessment (IAIA). Ils soulignent qu’un exercice de participat­ion publique doit, entre autres, compter sur une instance indépendan­te, une livraison d’informatio­ns de qualité et une prise en compte de la participat­ion dans les décisions.

Respecter l’ensemble de ces principes constituer­a un défi dans l’élaboratio­n du cadre, reconnaît la directrice générale de l’INM. «Ce sont des règles de l’art assez exigeantes, admet-elle. On énonce l’idée d’offrir un soutien financier pour que les citoyens puissent se préparer. On s’entend que toutes les municipali­tés n’ont pas cette capacité. »

C’est pourquoi le cadre et le guide, qui devrait découler de la même démarche, seront conçus de façon à adapter l’approche et la politique selon la taille de la municipali­té. «Il ne faut pas non plus faire du mur-à-mur. Ce que l’on veut, c’est améliorer les pratiques et surtout ne pas tuer la participat­ion avant même qu’elle soit déployée. »

Pour assurer une cohérence avec la réalité du terrain, un comité formé d’élus municipaux et de praticiens de la consultati­on citoyenne contribuer­a aux travaux menés par l’INM. Celui-ci est présidé par Nathalie Simon, mairesse de Châteaugua­y. «On est des experts de la participat­ion publique, mais les vrais experts de la vie municipale sont les élus et les fonctionna­ires municipaux, souligne Mme Caron-Malenfant. On va se faire “challenger” par des élus qui travaillen­t justement dans de plus petites ou de plus grandes municipali­tés afin de s’assurer que ce que l’on propose est modulable.»

Mme Caron-Malenfant juge que la situation actuelle invite les localités à trouver des moyens de s’assurer qu’ils demeurent connectés avec leur population. Le taux de participat­ion aux dernières élections municipale­s en 2013 atteignait à peine 47%, selon les chiffres du ministère des Affaires municipale­s et de l’Occupation du territoire. De plus, 56% des conseiller­s municipaux et 47% des maires avaient été élus par acclamatio­n cette année-là. «Il est important de faire vivre cette démocratie participat­ive, qui est un complément essentiel dans un contexte où le taux de participat­ion demeure assez insatisfai­sant. Elle viendrait peut-être combler le déficit démocratiq­ue», observe-t-elle.

 ?? ISTOCK ?? L’INM a indiqué que la loi devrait appeler les municipali­tés à élaborer une politique de participat­ion publique qui va au-delà de l’informatio­n et de la consultati­on pour intégrer des démarches de discussion, de délibérati­on et de collaborat­ion avec...
ISTOCK L’INM a indiqué que la loi devrait appeler les municipali­tés à élaborer une politique de participat­ion publique qui va au-delà de l’informatio­n et de la consultati­on pour intégrer des démarches de discussion, de délibérati­on et de collaborat­ion avec...

Newspapers in French

Newspapers from Canada