L’abandon de deux modifications ne suffit pas à calmer l’opposition
La trêve espérée par le gouvernement libéral à Ottawa n’aura visiblement pas lieu. L’opposition conservatrice et néodémocrate n’est pas apaisée par le recul de Justin Trudeau en matière de réforme parlementaire et entend poursuivre son obstruction à la Chambre des communes.
«Le NPD et les conservateurs sont encore unis, plus unis que jamais pour se battre contre cela», a lancé en point de presse la leader conservatrice en Chambre, Candice Bergen.
Mme Bergen n’a pas voulu donner un avantgoût de ce qui attendait le gouvernement autrement qu’en rappelant qu’«il y a des tactiques procédurales que nous pouvons utiliser pour les empêcher». «Nous continuerons de recourir à tous les outils à notre disposition pour faire passer notre message et leur faire savoir que c’est inacceptable.»
«Nous discutons nos options», a renchéri son homologue néodémocrate Murray Rankin.
Avant la suspension des travaux pour le congé pascal de deux semaines ayant pris fin lundi, la Chambre des communes était embourbée dans une guerre de procédures menée par les conservateurs et les néodémocrates. Des votes superflus étaient demandés, des débats sur des questions de privilège accessoires se prolongeaient.
«On ne fait pas ce genre de changement sans l’appui total de tous les partis Candice Bergen, leader conservatrice
Recul
Les deux partis étaient outrés des changements aux procédures parlementaires envisagés par le gouvernement, notamment la fin du pouvoir de l’opposition de perturber les débats en les prolongeant ou encore l’abolition des demi-séances du vendredi.
Dimanche, le gouvernement a annoncé qu’il renonçait à ces deux changements pour n’aller de l’avant qu’avec ce qu’il avait promis en campagne électorale. Cela ne semble pas suffisant pour calmer l’opposition.
«Je ne dis pas qu’il ne faut pas changer de temps en temps la façon dont cet endroit fonctionne», lance M. Murray en disant que personne ne peut s’opposer aux vertus de la modernisation. « Mais nous disons simplement que des règles qui semblent conçues pour faciliter la tâche au gouvernement devraient tous nous préoccuper. »
Changements proposés
Les libéraux proposent cinq changements: instaurer une période pendant laquelle le premier ministre répondrait à toutes les questions de l’opposition (et pas seulement à celles des chefs); octroyer au président de la Chambre le pouvoir de scinder les projets de loi omnibus ; rendre la prorogation arbitraire plus difficile en obligeant le gouvernement à déposer une justification écrite sujette à débats; permettre le scrutin secret pour élire les présidents de comités ; publier une analyse des coûts de chaque projet de loi.
Ni M. Rankin ni Mme Bergen n’ont été capables de dire lequel de ces changements profiterait au gouvernement. Le problème à leur avis est la façon de procéder des libéraux. «On ne fait pas ce genre de changement sans l’appui total de tous les partis. C’est ça, la tradition», martèle Mme Bergen.
À deux occasions déjà, M. Trudeau s’est prêté au jeu de répondre à toutes les questions de l’opposition. Les partis l’invitent à continuer de le faire sans changer les règles. M. Rankin craint qu’en codifiant cette pratique, le premier ministre cesse avec le temps d’assister aux quatre autres périodes de la semaine. Pour l’heure, la tradition veut que le premier ministre assiste à trois ou quatre séances par semaine au cours desquelles il ne répond qu’à la dizaine de questions posées par les chefs. Une séance compte une quarantaine de questions.
Lundi, le chef néodémocrate, Thomas Mulcair, a testé le premier ministre en posant luimême toutes les questions de sa formation. Justin Trudeau ne lui a plus répondu au-delà du premier round.