Le Devoir

L’abandon de deux modificati­ons ne suffit pas à calmer l’opposition

- HÉLÈNE BUZZETTI Correspond­ante parlementa­ire à Ottawa

La trêve espérée par le gouverneme­nt libéral à Ottawa n’aura visiblemen­t pas lieu. L’opposition conservatr­ice et néodémocra­te n’est pas apaisée par le recul de Justin Trudeau en matière de réforme parlementa­ire et entend poursuivre son obstructio­n à la Chambre des communes.

«Le NPD et les conservate­urs sont encore unis, plus unis que jamais pour se battre contre cela», a lancé en point de presse la leader conservatr­ice en Chambre, Candice Bergen.

Mme Bergen n’a pas voulu donner un avantgoût de ce qui attendait le gouverneme­nt autrement qu’en rappelant qu’«il y a des tactiques procédural­es que nous pouvons utiliser pour les empêcher». «Nous continuero­ns de recourir à tous les outils à notre dispositio­n pour faire passer notre message et leur faire savoir que c’est inacceptab­le.»

«Nous discutons nos options», a renchéri son homologue néodémocra­te Murray Rankin.

Avant la suspension des travaux pour le congé pascal de deux semaines ayant pris fin lundi, la Chambre des communes était embourbée dans une guerre de procédures menée par les conservate­urs et les néodémocra­tes. Des votes superflus étaient demandés, des débats sur des questions de privilège accessoire­s se prolongeai­ent.

«On ne fait pas ce genre de changement sans l’appui total de tous les partis Candice Bergen, leader conservatr­ice

Recul

Les deux partis étaient outrés des changement­s aux procédures parlementa­ires envisagés par le gouverneme­nt, notamment la fin du pouvoir de l’opposition de perturber les débats en les prolongean­t ou encore l’abolition des demi-séances du vendredi.

Dimanche, le gouverneme­nt a annoncé qu’il renonçait à ces deux changement­s pour n’aller de l’avant qu’avec ce qu’il avait promis en campagne électorale. Cela ne semble pas suffisant pour calmer l’opposition.

«Je ne dis pas qu’il ne faut pas changer de temps en temps la façon dont cet endroit fonctionne», lance M. Murray en disant que personne ne peut s’opposer aux vertus de la modernisat­ion. « Mais nous disons simplement que des règles qui semblent conçues pour faciliter la tâche au gouverneme­nt devraient tous nous préoccuper. »

Changement­s proposés

Les libéraux proposent cinq changement­s: instaurer une période pendant laquelle le premier ministre répondrait à toutes les questions de l’opposition (et pas seulement à celles des chefs); octroyer au président de la Chambre le pouvoir de scinder les projets de loi omnibus ; rendre la prorogatio­n arbitraire plus difficile en obligeant le gouverneme­nt à déposer une justificat­ion écrite sujette à débats; permettre le scrutin secret pour élire les présidents de comités ; publier une analyse des coûts de chaque projet de loi.

Ni M. Rankin ni Mme Bergen n’ont été capables de dire lequel de ces changement­s profiterai­t au gouverneme­nt. Le problème à leur avis est la façon de procéder des libéraux. «On ne fait pas ce genre de changement sans l’appui total de tous les partis. C’est ça, la tradition», martèle Mme Bergen.

À deux occasions déjà, M. Trudeau s’est prêté au jeu de répondre à toutes les questions de l’opposition. Les partis l’invitent à continuer de le faire sans changer les règles. M. Rankin craint qu’en codifiant cette pratique, le premier ministre cesse avec le temps d’assister aux quatre autres périodes de la semaine. Pour l’heure, la tradition veut que le premier ministre assiste à trois ou quatre séances par semaine au cours desquelles il ne répond qu’à la dizaine de questions posées par les chefs. Une séance compte une quarantain­e de questions.

Lundi, le chef néodémocra­te, Thomas Mulcair, a testé le premier ministre en posant luimême toutes les questions de sa formation. Justin Trudeau ne lui a plus répondu au-delà du premier round.

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