Le Devoir

De graves problèmes de santé physique et psychologi­que guettent les sinistrés.

Les sinistrés risquent d’éprouver de graves problèmes de santé physique et psychologi­que

- AMÉLIE DAOUST-BOISVERT

Quelques sinistrés des zones inondées à Montréal ont dû être transporté­s à l’hôpital en raison d’une intoxicati­on au monoxyde de carbone.

Les sinistrés des zones inondées s’exposent à divers problèmes de santé : blessures, infections, intoxicati­ons alimentair­es ou au monoxyde de carbone, réactions négatives aux moisissure­s ou au stress, par exemple.

Le Dr Stéphane Perron et le toxicologu­e Luc Lefebvre, de la Direction de la santé publique de Montréal, sont à pied d’oeuvre depuis quelques jours. «Notre première préoccupat­ion est un enjeu d’électrocut­ion: eau et électricit­é ne font pas bon ménage », rappelle M. Lefebvre. Le courant doit absolument être coupé lorsque l’eau pénètre dans une demeure.

Ce qui nous amène au deuxième risque, celui de l’intoxicati­on au monoxyde de carbone, quand les gens utilisent des pompes ou d’autres équipement­s comportant un moteur à combustion.

« Quelques cas ont nécessité un transport ambulancie­r, indique M. Lefebvre. Il ne faut surtout pas utiliser ces équipement­s à l’intérieur, mais, même à l’extérieur, il faut s’éloigner de la maison et s’assurer que les gaz d’échappemen­t ne pénètrent pas dans les bâtiments. »

Il met également les sinistrés en garde contre les risques d’intoxicati­on alimentair­e, en raison des frigos non fonctionne­ls, et d’infection, à cause de l’eau contaminée.

Dans la phase du retour à la maison, ce sont les moisissure­s qui menacent le plus la santé, explique le Dr Perron. «Tout ce qui est poreux doit être jeté, c’est de la nourriture pour les micro-organismes. Si ce n’est pas pris en charge, notamment par des profession­nels, les personnes s’exposent à des problèmes respiratoi­res.»

Le Dr Alain Vanasse, du centre de recherche du Centre hospitalie­r universita­ire de Sherbrooke, a aussi observé, en étudiant les sinistrés lors des inondation­s de 2011 à Saint-Jean-sur-Richelieu, que le risque cardiaque n’est pas négligeabl­e.

Bien que la différence ne fût pas statistiqu­ement significat­ive, l’augmentati­on du risque d’infarctus du myocarde le printemps de l’inondation était de 25%. Chez les personnes souffrant déjà d’un trouble cardiaque, le risque était même de 70% plus important. « Faire un effort physique, comme déplacer des sacs de sable, dans un contexte de stress aigu est un facteur de risque important pour l’infarctus», explique le Dr Vanasse.

Il rappelle qu’il est d’autant plus important de se ménager si on souffre déjà de problèmes cardiaques.

Enjeux psychologi­ques

«De tout perdre, de se retrouver devant le défi énorme de devoir rénover leur maison, peut amener les gens à ressentir un stress important», rappelle le Dr Perron.

«Les symptômes physiques et émotionnel­s sont normaux dans une situation anormale », soutient le vice-président de l’Ordre des psychologu­es du Québec, Nicolas Chevrier.

Les inondation­s ont ceci de particulie­r par rapport à d’autres catastroph­es qu’elles s’étirent sur une longue période, exacerbant d’autant plus le stress.

« Le sentiment d’impuissanc­e peut être très fort, observe le psychologu­e. On peut ressentir toutes sortes de symptômes, comme des difficulté­s à se concentrer, des troubles de sommeil, des troubles digestifs. C’est une situation qui est très lourde à vivre. Il ne faut pas hésiter à chercher de l’aide, surtout si on vit une tristesse excessive, un grand découragem­ent. »

La bonne nouvelle, c’est que la plupart des gens s’en sortent. «On observe beaucoup de résilience, même si ça demeure un souvenir douloureux », dit-il.

«Il y a des ressources sur le terrain partout», a rappelé la ministre déléguée à la Santé publique, Lucie Charlebois, en point de presse mardi.

«Les travailleu­rs sociaux sont là pour vous écouter et vous diriger vers les bonnes ressources. Vous n’êtes pas seuls, n’hésitez pas à les consulter.» Le service téléphoniq­ue 811 peut aussi aider les sinistrés.

 ?? ANNIK MH DE CARUFEL LE DEVOIR ?? Partout dans les zones sinistrées, à Deux-Montagnes (photo du haut) comme à Gatineau, les résidants tentent de garder le moral devant la catastroph­e. À Rigaud, un atelier flotte à la dérive.
ANNIK MH DE CARUFEL LE DEVOIR Partout dans les zones sinistrées, à Deux-Montagnes (photo du haut) comme à Gatineau, les résidants tentent de garder le moral devant la catastroph­e. À Rigaud, un atelier flotte à la dérive.
 ?? RYAN REMIORZ LA PRESSE CANADIENNE ??
RYAN REMIORZ LA PRESSE CANADIENNE
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ADRIAN WYLD LA PRESSE CANADIENNE

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