Le Devoir

Meredith abdique et démissionn­e du Sénat

- MARIE VASTEL Correspond­ante parlementa­ire à Ottawa

Plutôt que d’attendre que ses collègues l’expulsent du Sénat, le sénateur Don Meredith a choisi de démissionn­er de la Chambre haute.

Un comité sénatorial recommanda­it son éviction, la semaine dernière, en lui reprochant d’avoir eu un «comporteme­nt inacceptab­le» en entretenan­t une relation avec une adolescent­e. Muet depuis, le sénateur a brisé le silence mardi en annonçant son départ par écrit.

Sans demander pardon ou exprimer de regrets, le sénateur Meredith s’est contenté d’indiquer qu’il était « pleinement conscient que la Chambre haute est plus importante que [ses] faiblesses morales ». Avec l’appui de son épouse, de ses enfants et de son avocat, le pasteur de 52 ans argue avoir choisi «de passer à d’autres choses dans [sa] vie».

Au moins trois versions de sa lettre de démission ont circulé dans l’enceinte gouverneme­ntale au fil de l’après-midi. Celle adressée au gouverneur général — qui a « été informé de l’intention du sénateur» — précisait cependant, contrairem­ent aux autres ébauches, qu’il avait «décidé de démissionn­er».

Le débat sur le sort du sénateur Meredith n’avait que commencé à la Chambre haute. Mais à en croire les échos des sénateurs, son issue semblait déjà tranchée. Quoique son expulsion aurait été un geste sans précédent dans l’histoire du Parlement, la majorité de ses collègues souhaitaie­nt aller de l’avant.

Et à leur sortie du Sénat mardi, les sénateurs étaient ravis que le sénateur Meredith ait abdiqué. «Bon débarras»,a tranché la conservatr­ice Denise Batters. «C’est une bonne chose pour tout le monde»,a renchéri Josée Verner.

Une sanction inconstitu­tionnelle ?

Seule l’indépendan­te Anne Cools avait osé se montrer réticente à créer un tel précédent. «Je ne suis jamais à l’aise avec ce genre de processus brutal. » Et d’autres collègues étaient du même avis, a-t-elle plaidé. D’autant plus qu’elle s’interrogea­it quant à la constituti­onnalité d’une telle sanction.

Le comité d’éthique du Sénat, qui l’a recommandé­e, arguait qu’elle serait tout à fait constituti­onnelle en citant les droits identiques des parlementa­ires britanniqu­es en la matière. Le sénateur Meredith évoque toutefois dans sa lettre une «bataille constituti­onnelle dans laquelle je ne m’engagerai pas».

Certains souhaitera­ient maintenant qu’il soit privé de sa retraite fédérale d’environ 25000$ par année. «Cette personne-là ne devrait pas être en train de recevoir une pension à vie de la part des contribuab­les», a déploré Thomas Mulcair du NPD, qui estime que les Canadiens en seront « choqués ».

Le Sénat a renvoyé la balle au Conseil du trésor, qui étudiait mardi les limites de la Loi sur les allocation­s de retraite des parlementa­ires.

Or de l’avis de M. Mulcair, le Sénat aurait dû trancher plus tôt le cas de M. Meredith — qui n’a eu droit à sa pleine retraite qu’en décembre, lorsqu’il a fêté le sixième anniversai­re de sa nomination au Sénat par Stephen Harper.

Les sénateurs n’en ont pas pour autant terminé, avec cette saga. Quelques indépendan­ts, comme André Pratte, veulent s’assurer que la Chambre haute corrige le tir pour l’avenir.

«Ça a pris des années avant qu’on soit au courant de ces caslà, a-t-il noté. Est-ce qu’on a les cadres, les règles, les moyens d’interventi­on?» La sénatrice McPhedran réclamera une enquête du Sénat sur la question.

Le sénateur Meredith «s’est livré à plusieurs interactio­ns sexuelles avec une adolescent­e» alors qu’il était «beaucoup plus âgé » en 2014-2015, en usant «du pouvoir et de l’influence de sa charge », ont dénoncé le comité sénatorial et la commissair­e à l’éthique.

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Don Meredith

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