Le Devoir

L’ONE pourrait évaluer les GES du projet Énergie Est

- ALEXANDRE SHIELDS

Après avoir catégoriqu­ement refusé d’aborder l’enjeu des émissions de gaz à effet de serre imputables au projet de pipeline Énergie Est, l’Office national de l’énergie (ONE) a annoncé mercredi qu’il pourrait finalement tenir compte de cette question. Une situation qui ne peut que conduire au rejet du projet de Trans-Canada, selon Équiterre.

L’ONE a publié mercredi en fin de journée une série de documents qui présentent les « sujets» qui devraient être «pris en considérat­ion» par le comité qui évaluera le plus important projet de pipeline d’exportatio­n en Amérique du Nord. Ces sujets permettent de déterminer quels éléments pourront être abordés par les participan­ts aux audiences pour le projet ce pipeline de 4600 kilomètres.

Contrairem­ent aux modalités du premier processus d’évaluation, qui a été stoppé l’an dernier en raison d’allégation­s de partialité, l’ONE souligne cette fois-ci que «les facteurs à considérer pourraient inclure» les émissions de gaz à effet de serre (GES) liées à la production pétrolière qui circulera dans le pipeline.

La documentat­ion technique de l’Office mentionne ainsi les «émissions en amont», soit celles imputables aux «changement­s au volume de pétrole produit en raison de l’exploitati­on du projet». Certains partisans du projet ont cependant déjà fait valoir que le pétrole serait produit, avec ou sans la constructi­on d’Énergie Est. Dans ce contexte, seul son mode de transport serait modifié, et non la production elle-même.

L’ONE note aussi l’idée de tenir compte des «émissions en aval», soit celles liées à la consommati­on de ce pétrole des sables bitumineux.

Hausse des GES

La question des GES est un enjeu majeur du projet, puisque le pipeline de TransCanad­a transporte­rait chaque année plus de 400 millions de barils de pétrole brut. Selon une évaluation du groupe Pembina, les émissions liées à la seule production pourraient dépasser les 32 millions de tonnes de GES chaque année. Cela équivaut au bilan de tout le secteur du transport routier au Québec.

Cela signifie que ce pipeline pourrait contribuer de façon importante au bilan des GES du pays. Dans les documents publiés mercredi, l’ONE a d’ailleurs indiqué qu’il «envisage» de tenir compte des «incidences éventuelle­s du projet sur les émissions de GES du Canada». Il devrait aussi prendre en considérat­ion les politiques de réduction des émissions de gaz à effet de serre des provinces et du gouverneme­nt fédéral.

Directeur principal d’Équiterre, Steven Guilbeault a salué la décision de l’ONE par rapport à l’enjeu des GES. Selon lui, «si l’Office mène une analyse rigoureuse de cette question, il ne pourra que conclure que le projet n’a pas sa place dans le contexte canadien».

Greenpeace estime pour sa part que l’évaluation du projet devrait être stoppée, le temps que le gouverneme­nt Trudeau termine la réforme promise de l’ONE. On ne sait pas quand celle-ci sera achevée.

BAPE à venir

L’organisme fédéral a en outre précisé qu’un seul port d’exportatio­n est pour le moment inscrit dans le projet Énergie Est, soit celui de Saint John, au Nouveau-Brunswick. TransCanad­a recherche néanmoins un site pour un second port, qui pourrait être construit au Québec. Ce projet serait vraisembla­blement évalué après Énergie Est.

Pendant ce temps, l’étude d’impact déposée par TransCanad­a au gouverneme­nt du Québec n’a toujours pas été jugée complète. Québec doit statuer que cette étude est complète avant de lancer le processus du Bureau d’audiences publiques sur l’environnem­ent (BAPE).

Le pipeline Énergie Est doit traverser le territoire québécois sur une distance de 625 kilomètres. Il doit franchir, au Québec, plus de 860 cours d’eau, dont plusieurs rivières qui servent de source d’eau potable. Il traversera aussi plusieurs terrains privés, puisque plus de 2000 propriétai­res terriens sont concernés par le tracé de la pétrolière.

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