Le Devoir

Le président Trump somme James Comey de se taire

- IVAN COURONNE à Washington

Le président Donald Trump a publiqueme­nt intimé à l’ex-directeur du FBI James Comey de ne pas faire fuiter d’informatio­ns dans la presse sur les circonstan­ces confuses de son limogeage, un événement rarissime qui continue de semer le trouble aux États-Unis.

Depuis qu’il a congédié le premier policier des États-Unis, mardi soir, le dirigeant républicai­n n’a rien fait pour rassurer ses critiques, qui craignent une tentative d’intimidati­on ou une déstabilis­ation de la police fédérale et, plus généraleme­nt, de la Justice, dont le FBI dépend.

Selon l’institut Gallup, 46% des Américains désapprouv­ent la décision, contre 39% qui l’approuvent.

«James Comey ferait bien d’espérer qu’il n’existe pas d’enregistre­ments de nos conversati­ons avant qu’il commence à faire des révélation­s à la presse!» a tweeté M. Trump vendredi matin, en employant le mot «leaks», ces fuites qu’il déteste particuliè­rement. Il n’a pas précisé quelles conversati­ons étaient concernées, mais la veille, il a décrit dans une entrevue un dîner et deux coups de téléphone avec James Comey depuis son arrivée au pouvoir.

La mention d’enregistre­ments a immédiatem­ent agité toute la capitale, politiques et médias se demandant si le milliardai­re enregistra­it ses conversati­ons privées, comme son prédécesse­ur Richard Nixon (1969-1974).

L’ancien président républicai­n avait, pendant plus de deux ans, fait secrètemen­t installer des micros dans le Bureau ovale et d’autres pièces pour enregistre­r automatiqu­ement toute conversati­on, en plus de ses coups de téléphone. Cette manie se retourna contre lui dans le scandale du Watergate.

Interrogé plusieurs fois vendredi sur l’existence ou non d’un système d’enregistre­ment, le porte-parole de la Maison-Blanche, Sean Spicer, a répondu d’une phrase laconique: « Le président n’a rien d’autre à ajouter.» Sans confirmer ni démentir.

Pourquoi des enregistre­ments seraient-ils gênants pour l’ex-directeur ?

M. Trump a affirmé jeudi que l’ex-premier policier américain lui avait assuré qu’il n’était visé par aucune enquête, une assertion qui détonne avec la réserve attendue d’un chef du FBI et laisse ses amis incrédules.

Des proches de M. Comey ont confié au New York Times, au contraire, que Donald Trump lui aurait demandé de lui promettre sa « loyauté », ce qu’il aurait refusé. La MaisonBlan­che conteste cette version.

Sean Spicer, en tout cas, a affirmé que le tweet sur M. Comey n’était «pas une menace».

La raison initiale du limogeage du patron du FBI était son comporteme­nt durant la fin de l’enquête sur les courriels d’Hillary Clinton en 2016. On lui reprochait d’avoir publiqueme­nt parlé de l’affaire au lieu du silence traditionn­el.

Officielle­ment, cela n’avait rien à voir avec l’enquête en cours sur une éventuelle collusion entre des membres de l’équipe de campagne de Donald Trump et la Russie.

Mais cette explicatio­n s’est écroulée après que le milliardai­re eut lui-même lié sa décision à l’affaire russe, disant à NBC: «En fait, quand je me suis décidé, je me suis dit: “Ce truc avec la Russie, Trump et la Russie, c’est une histoire inventée.”»

Quant à M. Comey, il est pour l’instant silencieux. Il a décliné une première invitation à s’expliquer à huis clos au Sénat mardi prochain, mais une autre date était à l’étude.

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