Le Devoir

Donner la parole aux familles

- RAYMOND VILLENEUVE ET MARIE RHÉAUME Respective­ment président et directrice générale du Réseau pour un Québec Famille

En 1993, l’Assemblée générale de l’ONU a proclamé le 15 mai de chaque année Journée internatio­nale des familles, afin de mieux faire connaître les enjeux vécus par les familles et améliorer la capacité des nations à adopter des politiques pour y faire face.

Le Québec est sans contredit l’une des sociétés occidental­es les plus avant-gardistes en matière de politiques publiques favorables aux familles. À lui seul, notre modèle de centres de la petite enfance fait l’envie de plusieurs nations dans le monde. Les familles québécoise­s bénéficien­t de congés parentaux, de mesures fiscales avantageus­es et de tout un réseau de soutien local à travers les services de leur municipali­té et des nombreux organismes qui oeuvrent à l’améliorati­on des conditions de vie des familles, particuliè­rement pour les plus démunies d’entre elles.

Cette image d’un Québec très généreux envers les familles contraste toutefois avec une autre facette de la réalité, celle où les familles se disent épuisées et sous pression, particuliè­rement lorsqu’elles ont de jeunes enfants. L’étude Pespective­s parents de l’ISQ réalisée en partenaria­t avec Avenir d’enfants parents révélait en mai dernier que 58% des parents d’enfants de 0 à 5 ans avaient l’impression de courir toute la journée et que 35% se sentaient littéralem­ent épuisés à l’heure du souper.

Les besoins des familles

Comment faire pour mieux adapter nos politiques publiques aux réalités des familles d’aujourd’hui? D’abord, en les écoutant. Assez curieuseme­nt, malgré l’importance sociale et économique de leur rôle, les familles sont souvent absentes des débats. On s’adresse à toutes sortes de «clientèles» — par exemple, les enfants, les mères, les travailleu­rs, les aînés —, mais on oublie souvent que les familles ont des besoins qui leur sont propres, qui dépassent la simple addition de ceux des individus qui les composent.

Autrement dit, serons-nous vraiment en mesure d’améliorer la conciliati­on familletra­vail si la discussion se fait uniquement sur la base de la relation employeur-employé ? Saurons-nous intégrer une meilleure protection des familles dans la refonte de la loi sur les normes du travail si le débat interpelle uniquement les lobbys patronaux et syndicaux? Pourrons-nous réformer efficaceme­nt les services éducatifs et scolaires sans faire une plus grande place aux familles dans l’organisati­on des services? Comment assurerons-nous une participat­ion plus égalitaire des hommes et des femmes sachant que nos politiques familiales prévoient des mesures spécifique­s pour les mères, mais très peu de mesures visant explicitem­ent les pères? Comment améliorero­ns-nous le soutien aux aînés et aux proches aidants sans tenir compte des familles qui les entourent ?

Voici autant d’enjeux actuels et importants pour les familles qui illustrent la nécessité que ces dernières bénéficien­t d’une voix plus forte dans les débats publics.

À l’occasion de la Journée internatio­nale des familles (le 15 mai) et pendant toute la Semaine québécoise des familles (du 15 au 21 mai), le Réseau pour un Québec Famille tiendra une série d’événements, à Montréal et dans toutes les régions du Québec, où les familles prendront la parole. Nous souhaitons provoquer un grand mouvement de discussion sur les enjeux qui touchent les familles, afin que nous puissions réfléchir collective­ment aux meilleures façons de soutenir les familles à travers nos politiques publiques.

L’automne 2017 sera marqué par des élections dans les municipali­tés québécoise­s. L’année suivante viendront les élections provincial­es. Nous risquons une prédiction: les familles seront sur toutes les lèvres et tous les candidats voudront se positionne­r comme les champions des familles. Ce sera le temps de leur demander s’ils ont vraiment pris le temps de les écouter et s’ils comprennen­t les réalités multiples qu’elles vivent.

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