Crise politique au Brésil: la Bourse et le real décrochent
La cotation de l’indice brésilien Bovespa a été suspendue jeudi peu après l’ouverture de la Bourse de São Paulo, après avoir décroché de plus de 10% en réaction aux informations du journal O Globo mettant en cause le président Michel Temer dans le cadre du scandale Petrobas. Le réal était en chute de 6% à l’ouverture.
Quelques minutes après la reprise de la cotation, le Bovespa affiche un repli de 8,7%. L’indice MSCI des marchés émergents perd pour sa part près de 2 % et le principal fonds indiciel ETF sur les actions brésiliennes coté aux ÉtatsUnis chute de plus de 16%.
Le grand quotidien brésilien O Globo a rapporté mercredi le témoignage d’un homme d’affaires selon lequel le président Michel Temer a acquiescé au versement d’une somme d’argent à un témoin clé dans le scandale Petrobras afin qu’il reste silencieux. Les investisseurs redoutent que les allégations du journal O Globo provoquent une nouvelle crise politique au Brésil et mettent un frein au processus de réformes enclenché par le président brésilien.
Le président brésilien, Michel Temer, a cependant assuré jeudi qu’il n’avait aucune intention de démissionner, malgré les graves accusations qui pèsent sur lui et le feu vert de la Cour suprême à l’ouverture d’une enquête pour corruption. «Je ne démissionnerai pas », a martelé le chef d’État lors d’une allocution télévisée à Brasília, assurant qu’il n’avait «acheté le silence de personne».
Selon l’agence Reuters, les analystes de JPMorgan ont ainsi abaissé jeudi leur recommandation sur les actions brésiliennes à «neutre» contre «surpondérer» auparavant, s’inquiétant d’un risque d’exécution plus élevé sur la mise en oeuvre des réformes.
En Europe, les valeurs les plus exposées au Brésil sont également délaissées, à l’instar d’Edenred (-5,5%), de Casino (-4,3 %) ou encore de Telecom Italia (-3,8 %) et de Santander (-4,5 %).
Un président chahuté
Michel Temer est chahuté par les scandales depuis son arrivée au pouvoir il y a moins d’un an, quand il s’était emparé du fauteuil de Dilma Rousseff en précipitant sa chute. Jusqu’ici, sa présidence n’a pas été une promenade de santé alors que le Brésil affronte une récession historique et que les accusations de corruption se rapprochent dangereusement de lui, après l’ouverture d’enquêtes contre plusieurs ministres de son gouvernement.
Avant d’accéder à la fonction suprême, il avait été vice-président pendant plus de cinq ans de Dilma Rousseff, qui lui a collé l’étiquette infamante de «traître» et de «conspirateur» ayant participé à sa chute. Sa longue expérience parlementaire — il a présidé trois fois le Congrès des députés — lui a permis de cimenter une large coalition sur les ruines de l’ancienne majorité de Mme Rousseff pour garantir sa destitution.
Il a aussi bénéficié de la bienveillance des marchés, échaudés par l’interventionnisme hasardeux de Mme Rousseff et rassurés par ses réformes d’austérité, mêlant gel des dépenses publiques, réforme du droit du travail et recul de l’âge de départ à la retraite. Mais il n’a pas réussi à conquérir le coeur des Brésiliens: fin mars, sa cote de popularité plafonnait à 10%.
Et il reste menacé par le titanesque scandale Petrobras. La tempête a déjà emporté son encombrant camarade Eduardo Cunha, l’architecte de la destitution de Mme Rousseff.
Ses ennuis ne s’arrêtent pas là: le Tribunal supérieur électoral examinera bientôt la validité de la dernière élection présidentielle, un procès pour financement illégal de campagne qui concerne à la fois M. Temer et Mme Rousseff.