Le Devoir

Moody’s abaisse la note de la Chine à «A1»

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En réduisant sa note de «Aa3» à «A1» avec une perspectiv­e stable, l’agence a estimé que « la solidité financière de la Chine va quelque peu s’éroder au cours des années qui viennent, le volume total de la dette continuant à grossir tandis que le potentiel de croissance ralentit».

Le ministère chinois des Finances a rejeté l’évaluation de Moody’s, accusant l’agence d’avoir surestimé les difficulté­s du pays.

La croissance économique du géant asiatique est tombée en 2016 à 6,7%, soit son plus mauvais score depuis un quart de siècle. Du fait du vieillisse­ment de la population et du ralentisse­ment des investisse­ments et de la productivi­té, Moody’s dit désormais s’attendre à la voir plonger aux alentours de 5% par an sur les cinq années à venir, un chiffre très inférieur aux prévisions officielle­s qui tablent sur plus de 6,5% en moyenne durant le 13e plan quinquenna­l (2016-2020).

Après des décennies de croissance à deux chiffres, le régime communiste s’efforce désormais de soutenir l’économie en investissa­nt massivemen­t dans les infrastruc­tures et en maintenant des taux d’intérêt très bas, mais cette politique a créé une bulle financière, notamment dans l’immobilier, qui inquiète le Fonds monétaire internatio­nal (FMI).

Le FMI a ainsi reproché le mois dernier à Pékin de privilégie­r la croissance à court terme au détriment de l’assainisse­ment de son système financier.

Les réformes prévues par le régime communiste pour combattre les risques financiers pourront «ralentir, mais pas empêcher une augmentati­on de la dette» du pays, a observé Moody’s dans un communiqué.

Moody’s s’inquiète particuliè­rement de la dette des entreprise­s d’État, souvent déficitair­es, et qui siphonnent une grande partie des crédits bancaires, au détriment du secteur privé. Si Pékin affiche sa volonté de réformer le secteur public, « nous pensons que ces efforts de réforme n’auront pas suffisamme­nt d’impact, ni (n’interviend­ront) suffisamme­nt vite, pour éviter une érosion» du profil financier chinois, selon l’agence de notation.

«Coup psychologi­que»

Moody’s n’avait plus réduit depuis 1989 la note de la dette chinoise, qui n’avait fait que monter depuis à mesure de l’émergence économique du pays. La nouvelle a initialeme­nt pénalisé les marchés boursiers et le yuan, mais les places de Shanghai et de Shenzhen comme la devise nationale avaient pratiqueme­nt effacé leurs pertes à la mi-journée.

«Psychologi­quement, c’est un coup que la Chine va mal prendre et qui reflète la montée de la pression financière», a observé Christophe­r Balding, professeur à l’École de commerce HSBC à Shenzhen. En même temps, «ça n’a pas énormément d’importance parce que l’essentiel de la dette chinoise est détenu par des acteurs étatiques ou quasi étatiques et très peu par des étrangers », a-t-il déclaré à l’agence Bloomberg.

La dette totale de la Chine représenta­it 256 % du PIB à la fin de l’an dernier. Mais la dette extérieure n’en représente qu’environ 12%. La seule dette publique devrait quant à elle atteindre 45% du PIB d’ici à la fin de la décennie, prévoit Moody’s.

Pour Liao Qun, économiste à la Citic Bank Internatio­nal à Hong Kong, «cela fait l’effet d’une douche froide au moment où tout le monde est optimiste envers l’économie de la Chine». Selon lui, les risques qui pesaient fin 2016 sur l’économie chinoise, particuliè­rement la menace d’une guerre commercial­e avec l’Amérique de Donald Trump, ont reculé.

«Cet abaissemen­t n’a aucun sens», tranche l’économiste, au vu des meilleures performanc­es de l’économie chinoise depuis le début de l’année.

La dette totale de la Chine représenta­it 256% du PIB à la fin de l’an dernier

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FRED DUFOUR AGENCE FRANCE-PRESSE Le FMI a reproché le mois dernier à Pékin de privilégie­r la croissance à court terme.

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