Construction : les négociations sectorielles ont repris
Les associations patronales et les syndicats de la construction ont recommencé à négocier vendredi, à trois jours d’une échéance fixée par le premier ministre Philippe Couillard, qui donnerait lieu à l’imposition d’une loi spéciale dès lundi pour forcer le retour au travail des grévistes.
La grève, déclenchée mercredi matin, concerne 175 000 syndiqués et a paralysé des centaines de chantiers partout au Québec, pour la construction résidentielle comme pour de grands projets comme celui de La Romaine chez Hydro-Québec. Ils sont sans convention depuis la fin du mois d’avril.
«On veut une entente gagnant-gagnant. Le temps n’est plus à la confrontation, le temps est venu de prendre tous les moyens nécessaires pour obtenir une entente», a dit Éric Côté, porte-parole de l’Association de la construction du Québec, lors d’un point de presse diffusé en aprèsmidi par les chaînes d’information continue. «On tend la main à l’Alliance syndicale. On va passer la nuit s’il le faut, on a fait nos réserves de ce côté-là.» M. Côté faisait là référence notamment au travail le samedi à temps simple.
Les négociations se déroulent avec des conciliateurs à trois tables sectorielles: résidentiel, génie civil/voirie et institutionnel, commercial et industriel. Des pourparlers ont aussi cours pour régler des enjeux communs à tous les secteurs, notamment les avantages sociaux et les régimes de retraite.
L’Alliance syndicale regroupe cinq syndicats : la FTQ-Construction, le Conseil provincial du Québec des métiers de la construction – International, le Syndicat québécois de la construction, la CSD-Construction et la CSN-Construction.
Le porte-parole de l’Alliance, Michel Trépanier, a indiqué au Devoir jeudi que « le but principal, c’est de ramener tout le monde au travail, dans tous les secteurs, le but ultime n’est pas de laisser du monde en grève». Lors d’un point de presse vendredi, il a dit que « le monde devrait essayer de se concentrer pour négocier de bonne foi ».
Loi spéciale
Tant le patronat que l’Alliance veulent des ententes négociées plutôt que se faire imposer une loi spéciale. «Une loi spéciale n’est pas une solution. On ne sait pas ce qu’il y a dans cette loilà », a ajouté M. Côté lors de sa rencontre avec la presse. «On veut arrêter l’hémorragie de 45 millions de dollars par jour, ça fait mal aux travailleurs, ça fait mal aux entrepreneurs et au Québec. […] On est capable d’y arriver, on l’a fait dans le passé. On a déjà fait des pas lors de la nuit de négociation, on a laissé tomber des choses. […] La conciliation travailfamille, on la prend en considération et on a fait des reculs à ce sujet. »
Le porte-parole de l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ), François-William Simard, a dit que la négociation des prochains jours serait «cruciale». « Le sentiment qu’on a, c’est vraiment qu’on est près d’une entente. Il reste essentiellement les salaires à régler, les questions normatives sont pour la plupart réglées», a-t-il dit lors de son propre point de presse.
En 2013, lors du précédent conflit, les parties patronale et syndicale du secteur résidentiel avaient réussi à trouver un terrain d’entente après cinq jours de grève. Le gouvernement Marois avait imposé une loi spéciale pour les syndiqués toujours en grève au bout d’une dizaine de jours.
Les travailleurs n’ont pas l’obligation stricte de suivre le mot d’ordre de grève, mais ceux qui le suivent ont le droit de les sensibiliser à la cause sans toutefois recourir à l’intimidation. La Commission de la construction du Québec (CCQ) a reçu des signalements. «On ne fera pas de bilan de ça pendant le conflit de travail», a dit sa porte-parole, Mélanie Malenfant. « Je ne suis pas en mesure de vous dire combien de signalements il y a, qu’est-ce qui va aboutir à des plaintes, qu’est-ce qui est fondé ou ne l’est pas, etc. C’est trop tôt. »
Le conflit de travail de 2013 avait donné lieu à l’ouverture de 53 dossiers à la CCQ. Tous ces dossiers n’ont pas forcément été suivis de sanctions, car certains ont pu avoir été écartés pour diverses raisons (désistement, insuffisance de preuve, etc.).
«On veut arrêter l’hémorragie de 45 millions de dollars par jour, ça fait mal aux travailleurs, ça fait mal aux entrepreneurs et au Québec»