Comment vont les parents?
Si presque tous les parents québécois croient avoir les habiletés nécessaires pour être de bons parents, nombreux sont ceux qui doutent tout de même de ce qu’ils font et qui disent souffrir de manque de temps et de soutien dans leurs tâches parentales. Retour sur les résultats de l’étude Perspectives parents, pilotée par l’organisme Avenir d’enfants.
«Nous rêvons que tous les enfants arrivent à l’école avec tout le bagage nécessaire», assure Julie Dostaler, directrice générale d’Avenir d’enfants, un organisme sans but lucratif qui vise le développement global des tout-petits. Or, une enquête québécoise réalisée par l’Observatoire des tout-petits en 2012 a démontré que 1 enfant sur 4 arrive vulnérable à la maternelle dans au moins un domaine de développement. Cette proportion augmente à 1 enfant sur 3 dans les milieux défavorisés. Cela peut se traduire dès l’âge de 3 ans, par exemple, alors qu’un enfant d’une famille défavorisée connaîtra 600 mots de moins qu’un enfant non défavorisé.
C’est en réponse à ces données qu’Avenir d’enfants a initié l’étude Perspective Parents, réalisée en collaboration avec l’Institut de la statistique du Québec et l’Université du Québec à Trois-Rivières, dont les résultats ont été diffusés l’an dernier lors de la Semaine québécoise des familles. « Les parents sont les premiers éducateurs des enfants, les adultes les plus significatifs dans leur vie, expose Mme Dostaler. On a voulu connaître leur point de vue, car aucune étude ne s’y était penchée.» Ainsi, près de 15 000 parents provenant de 16 régions du Québec ont été sondés dans le cadre de cette vaste étude.
Des parents engagés
La première statistique a agréablement surpris l’organisme de Mme Dostaler: 95% des parents considèrent avoir toutes les habiletés nécessaires pour être un bon parent. «On s’attendait à un taux moins élevé, c’est une bonne nouvelle, affirme Julie Dostaler. Ça démontre qu’il y a un désir des parents d’être considérés dans leur rôle de parent. Tous les spécialistes qui entourent les parents ne doivent pas l’oublier. »
Cela ne veut pas dire pour autant que l’expérience et la satisfaction des parents dans leur rôle sont toujours parfaites. L’enquête a aussi révélé que le tiers des parents sont inquiets ou préoccupés de savoir s’ils agissent correctement, et 23% des répondants affirment qu’être parent est une source de stress ou d’anxiété.
«Dans notre société de performance, les parents se mettent beaucoup de pression, et la société leur en met aussi sur les épaules, affirme la directrice générale d’Avenir d’enfants. Et tout ce stress s’ajoute au stress du quotidien, alors que le niveau d’endettement des familles est de 160%… L’ensemble peut avoir des répercussions négatives sur l’expérience parentale, et par conséquent, sur le développement de l’enfant qui ressent ce stress.»
Des parents trop peu épaulés
L’étude a aussi démontré une lacune du côté du soutien reçu par les parents. Pas moins de 24% d’entre eux considèrent n’être jamais, ou rarement, soutenus par leur entourage lorsqu’ils n’en peuvent plus.
Si des campagnes de sensibilisation, entre autres de la Fondation Lucie et André Chagnon, tentent de faire réaliser aux gens l’impact positif qu’ils peuvent avoir en étant présents pour leurs neveux, nièces, voisins ou petitsenfants, un travail est aussi fait du côté des services d’aide aux parents. « La famille peut s’élargir avec les organismes et la communauté à proximité », fait valoir Julie Dostaler.
Les municipalités et organismes offrent déjà de nombreux services aux parents, mais ceux-ci pourraient être davantage utilisés. Si la majorité des parents disent les connaître, 25% disent le contraire. «Et ceux qui les connaissent ne les utilisent parfois pas en raison d’obstacles comme l’horaire, le coût ou la tranche d’âge admissible à l’activité, qui rendent difficile la fréquentation des services», ajoute Mme Dostaler. Selon l’étude, un seul obstacle suffit pour décourager les parents d’utiliser les services.
«Le dialogue entre les parents et les gens qui offrent les services est très important», continue-t-elle, affirmant travailler fort depuis un an à communiquer les résultats de l’étude Perspectives parents pour que les services d’aide puissent mieux adapter leur offre.
«Il y a une portion de la population qui voit encore les parents comme les seuls responsables de leurs enfants, souligne finalement Julie Dostaler. Mais les enfants sont notre capital humain de demain. Chaque dollar public dépensé dans la petite enfance doit être vu comme un investissement. »