Le Devoir

La vraie partie commence

-

Sil fallait faire de l’humour, on dirait qu’en remportant 69% des voix à l’élection partielle de Gouin Gabriel NadeauDubo­is a obtenu un score quasi soviétique. Québec solidaire aurait toutefois tort de tirer des conclusion­s euphorique­s de cette victoire qualifiée d’«écrasante».

Pour le principal intéressé, les électeurs de Gouin ont pris «une décision lourde de sens», celle d’envoyer à l’Assemblée nationale «un député progressis­te de plus». Il serait plus juste de dire qu’ils ont tout simplement décidé de remplacer une députée progressis­te, Françoise David, par un autre député progressis­te.

Certes, les résultats montrent que le rejet du projet d’alliance électorale avec le Parti québécois et, par voie de conséquenc­e, le torpillage de l’entente signée sur la convergenc­e souveraini­ste sous l’égide des OUI Québec n’a eu qu’un effet marginal. L’autre option souveraini­ste, Option nationale, n’a pas attiré un grand nombre de solidaires déçus ou de péquistes courroucés, ne récoltant que 700 votes de plus qu’à l’élection générale de 2014. Comme le Parti québécois n’a pas présenté de candidat, il est impossible de savoir si Gabriel Nadeau-Dubois aurait pu égaler la performanc­e de Françoise David, qui a recueilli 51 % des votes en 2014. Mais l’appui massif dont le candidat a bénéficié lundi confirme que QS est solidement ancré dans Gouin.

Candidat au poste de co-porte-parole, Jean-François Lessard avait affirmé dans un débat organisé par Le Devoir que NadeauDubo­is «l’a eu facile» en se présentant dans le fief de Françoise David. Mais en toute justice, nous devons reconnaîtr­e qu’il n’a pas démérité et qu’il possède un indéniable pouvoir d’attraction.

Les vrais défis l’attendent. À titre de co-porte-parole, il devra exercer une forme de leadership sans indisposer une formation politique qui restreint la marge de manoeuvre dont il a besoin pour réagir à la donne politique. Il s’est aussi fixé comme but de démontrer que QS n’est pas un phénomène strictemen­t montréalai­s. À cet égard, le rejet d’une alliance électorale avec le PQ complique les choses. Il devra aussi se méfier des libéraux qui voient dans QS un allié objectif contre le PQ et ses visées identitair­es.

Dans des entrevues à la radio, Gabriel Nadeau-Dubois a évoqué mardi ce qui pourrait représente­r un objectif réaliste pour QS: détenir la balance du pouvoir en 2018 et former un gouverneme­nt de coalition pour remplacer les libéraux minoritair­es. C’est ce que projettent de faire les néodémocra­tes et des verts en Colombie-Britanniqu­e.

 ??  ?? ROBERT DUTRISAC
ROBERT DUTRISAC

Newspapers in French

Newspapers from Canada