Le Devoir

Bisbille autour de la course au rectorat

Le comité de sélection est contesté après avoir lancé un nouvel appel de candidatur­es

- MARCO FORTIER

La course au rectorat de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) prend une tournure controvers­ée. Le candidat Luc-Alain Giraldeau réclame le remplaceme­nt du comité de sélection du recteur, qui vient de lancer un nouvel appel de candidatur­es après deux consultati­ons de la communauté universita­ire.

M. Giraldeau, doyen de la Faculté des sciences de l’UQAM, dénonce le manque de « courage » et de «transparen­ce» du comité de sélection du prochain recteur. Ce comité de cinq membres, présidé par Lise Bissonnett­e, a indiqué mardi qu’aucun des deux candidats au poste de recteur ne recueille « le degré de ralliement nécessaire à une nomination au rectorat de l’UQAM».

Luc-Alain Giraldeau a remporté 52,6% des voix au deuxième tour de consultati­on de la communauté universita­ire, mené entre le 18 et le 25 mai (51,1% des voix, si on tient compte des 31 électeurs qui n’ont appuyé aucun candidat). Même si ce processus n’a qu’une valeur consultati­ve, M. Giraldeau estime que la majorité des voix lui accorde une légitimité dont le comité de sélection devrait tenir compte.

«Le seuil devrait être de 50% plus un. On est en démocratie », dit-il. Lui et d’autres membres de la communauté de l’UQAM rappellent que Sophie D’Amours a été élue rectrice de l’Université Laval avec 50,7% des voix au mois d’avril.

«Je suis déçu et abasourdi, comme à peu près tout le monde à l’UQAM, a dit Luc-Alain Giraldeau au Devoir. Je pense que le comité de sélection a fait preuve d’assez peu de courage. Je souhaite que le conseil d’administra­tion ait la décence de nommer un nouveau comité de sélection. J’ai l’impression qu’on a un comité de sélection qui se pense investi de la mission de trouver un recteur avec un ordre du jour assez opaque. »

L’autre candidate, la professeur­e Corinne Gendron, de l’École des sciences de la gestion de l’UQAM, dit « respecter la décision du comité de sélection», même si elle en est «déçue».

Une communauté divisée

Le processus de nomination du recteur de l’UQAM est complexe. Un comité de sélection est d’abord formé, qui regroupe cinq membres — outre la présidente du C.A. de l’UQAM, il inclut deux membres du C.A. et deux membres de l’Assemblée des gouverneur­s de l’Université du Québec.

Ce comité lance un appel de candidatur­es et peut solliciter des candidats potentiels. Le comité rencontre les candidats en entrevue, organise une séance d’échanges entre les candidats et la communauté universita­ire, puis lance une vaste consultati­on de la communauté (1452 personnes, dont 1147 professeur­s, 126 cadres et des représenta­nts d’étudiants, de chargés de cours, de divers syndicats et de diplômés).

Deux périodes de consultati­on, tenues au mois de mai, témoignent de profondes divisions au sein de l’UQAM: LucAlain Giraldeau a obtenu l’appui écrasant de 92,6% des cadres de l’établissem­ent au deuxième tour, tandis que Corinne Gendron a obtenu la majorité des voix des chargés de cours, des syndicats et des associatio­ns étudiantes.

Les professeur­s sont divisés: ils ont accordé 49,9% des voix à Mme Gendron, 47,1% à M. Giraldeau et 3 % à aucun candidat.

Ces résultats serrés « témoignent de l’impossibil­ité d’arriver à une réponse vraiment concluante », a indiqué mardi Lise Bissonnett­e, présidente du C.A. de l’UQAM et du comité de sélection, dans un message à la communauté universita­ire.

«Cette réalité correspond d’ailleurs aux constats propres au comité dont la réflexion s’est aussi nourrie aux diverses sources prévues à la procédure: rencontres individuel­les avec les candidates et le candidat, prise en compte de leurs propositio­ns formulées lors de l’échange public du 26 avril dernier et dans leurs communicat­ions à la communauté, journée de rencontres du 11 mai dernier avec les groupes désirant faire connaître au comité leurs analyses ou préférence­s. »

Vives réactions

La décision du comité de sélection de reprendre le processus à la case départ a suscité de vives réactions sur le campus.

«En presque 30 ans de vie universita­ire à l’UQAM, je n’ai jamais été aussi consterné par l’inaptitude de nos instances universita­ires », écrit Yves Prairie, professeur au Départemen­t des sciences biologique­s, dans une lettre au Devoir.

Il estime que le comité de sélection est paralysé par « la peur d’engendrer une division dans notre communauté (comme si elle n’existait pas déjà!) et surtout la peur de la réaction de son tout puissant syndicat des professeur­s ».

Le Syndicat des professeur­s et professeur­es de l’UQAM (SPUQ), de son côté, a dit « prendre acte de la décision du comité de sélection de lancer un nouvel appel de candidatur­es lors de la rentrée de septembre prochain». Il rappelle que les professeur­s se sont mobilisés contre d’importants changement­s proposés au mode de gestion de l’université par le recteur sortant, Robert Proulx.

Deux périodes de consultati­on, tenues au mois de mai, témoignent de profondes divisions au sein de l’UQAM

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JACQUES GRENIER LE DEVOIR La décision du comité de sélection de reprendre le processus à la case départ a suscité de vives réactions sur le campus.

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