Le Devoir

Le Québec doit se joindre au mouvement

- MÉLANIE GAUVIN VIRGINIE LARIVIÈRE Co-porte-parole de la campagne 5-10-15*

C’est officiel: le gouverneme­nt de l’Ontario va déposer un projet de loi pour améliorer le sort des travailleu­ses et des travailleu­rs. Il fera notamment passer le salaire minimum de 11,40 $ actuelleme­nt à 14 $ en janvier 2018, puis à 15 $ en janvier 2019, soit trois mois après que l’Alberta aura atteint ce taux.

Pendant ce temps, au Québec, souvenons-nous que le gouverneme­nt a tout fait dans les derniers mois pour rassurer les employeurs qu’une faible hausse de 0,50 $ du salaire minimum ne causerait pas de catastroph­e économique. Et il a mis toute la gomme pour convaincre la population qu’il était allé aussi loin qu’il le pouvait en cette matière.

Le gouverneme­nt ontarien nous démontre toutefois qu’avec de la volonté politique, il est possible d’aller beaucoup plus loin. Il s’apprête à faire voler en éclats tous les justificat­ifs utilisés de ce côté-ci de la frontière pour refuser la hausse du salaire minimum à 15$ l’heure.

Rien dans son argumentai­re ne fait référence à un ratio salaire minimum/salaire horaire moyen à ne pas dépasser au risque d’être l’équivalent d’une bombe atomique larguée sur le marché du travail, comme le prétend l’économiste Pierre Fortin. Comme quoi, quand le sort des travailleu­ses et des travailleu­rs est au centre des préoccupat­ions des gouverneme­nts, ceux-ci savent ignorer les oiseaux de malheur qui nous prédisent la fin du monde ou presque.

Autre argument souvent entendu: si le salaire minimum est trop élevé au Québec par rapport aux provinces voisines, notre économie en souffrira. Le gouverneme­nt ontarien ne partage visiblemen­t pas la même analyse que le gouverneme­nt québécois puisqu’il fait tout de même le pari d’augmenter le salaire minimum de façon importante. De toute évidence, le Québec n’est plus à l’avant-garde avec ses politiques sociales et celles relatives au marché du travail.

Différente­s mesures

D’ailleurs, soulignons que la hausse du salaire minimum n’est pas la seule mesure annoncée lundi dernier par le gouverneme­nt ontarien, dont la plupart entreront en vigueur le 1er janvier 2018. Si le projet de loi est adopté, les travailleu­ses et travailleu­rs auront notamment droit: À 10 jours de congé d’urgence personnell­e

par année, dont deux journées payées, et ce, peu importe la taille de l’entreprise;

À une rémunérati­on égale à celle des employés permanents même s’ils sont engagés par l’entremise d’une agence de placement temporaire ;

À la possibilit­é de refuser de faire des

quarts de travail si leur employeur le leur demande moins de quatre jours d’avance et d’être rémunérés 3 heures si un quart de travail est annulé moins de 48 heures à l’avance.

Et pour s’assurer que la législatio­n est bel et bien appliquée, le gouverneme­nt engagera jusqu’à 175 autres agents des normes d’emploi d’ici 2020-2021 et lancera un programme pour bien faire connaître toutes ces mesures.

Cela nous prouve que les revendicat­ions de la campagne 5-10-15 sont réalistes et d’actualité. Il serait possible pour les travailleu­ses et travailleu­rs québécois d’obtenir leur horaire de travail cinq jours à l’avance, de disposer de 10 jours de congé payés par année pour maladie ou responsabi­lités familiales et de gagner un salaire minimum de 15 $ l’heure.

Malgré le penchant pro-patronal du gouverneme­nt québécois, nous espérons qu’il saura s’inspirer du gouverneme­nt ontarien et qu’il se joindra au mouvement.

* Les sept organisati­ons membres de la campagne 5-10-15 : le Front de défense des non-syndiquéEs, le Collectif pour un Québec sans pauvreté, la Centrale des syndicats démocratiq­ues (CSD), la Confédérat­ion des syndicats nationaux (CSN), la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), le Syndicat de la fonction publique et parapubliq­ue du Québec (SFPQ) et le Syndicat de profession­nelles et profession­nels du gouverneme­nt du Québec (SPGQ).

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