Le Devoir

Climat: Trump tourne le dos à l’Accord de Paris

Aussitôt mise sur la table, la suggestion de Trump de renégocier l’entente est rejetée

- ALEXANDRE SHIELDS

Dans un geste qui pourrait être lourd de conséquenc­es pour le climat de la planète, le président américain, Donald Trump, a annoncé jeudi que les États-Unis allaient se retirer de l’Accord de Paris sur le climat. Il a du même coup affirmé qu’il était prêt à négocier une nouvelle entente «équitable» pour les Américains, une option immédiatem­ent rejetée par plusieurs pays.

«Afin de remplir mon devoir solennel de protection de l’Amérique et de ses citoyens, les ÉtatsUnis se retireront de l’Accord de Paris sur le climat», a annoncé Donald Trump depuis les jardins de la Maison-Blanche.

«Je ne veux rien qui puisse se mettre en travers de notre chemin pour redresser l’économie américaine », a poursuivi le président. Or, a-t-il soutenu, l’accord signé à Paris en 2015 est nuisible «aux travailleu­rs, aux consommate­urs, à l’industrie et à l’économie américains». Il a du même coup réaffirmé son intention de soutenir l’industrie énergétiqu­e, dont celle du charbon, la pire source d’énergie fossile.

«Cet accord est moins à propos du climat que pour permettre à d’autres pays d’avoir un avantage sur les Américains», a ajouté M. Trump, avant d’affirmer que «la Chine pourra continuer de polluer pendant des années » en vertu de cette entente climatique.

Qui plus est, la décision de quitter l’Accord de Paris « n’aura pas beaucoup d’impact » sur le climat de la planète, selon le président Trump. Les États-Unis sont le deuxième pays émetteur de gaz à effet de serre, avec près de 15% des émissions mondiales.

Donald Trump a par ailleurs indiqué que les États-Unis seraient prêts à «négocier un nouvel accord» qui serait «équitable» pour l’économie américaine.

Le secrétaria­t de la Convention-cadre des Nations unies sur les changement­s climatique­s a toutefois fermé la porte à cette option. Dans un

«Nous

sommes profondéme­nt déçus d’apprendre que le gouverneme­nt fédéral américain a décidé de se retirer de l’Accord de Paris Justin Trudeau

communiqué, l’organisme a fait savoir qu’un tel accord, fruit de négociatio­ns menées par 195 États, ne peut être renégocié à la demande d’un seul État. Qui plus est, 147 États l’ont déjà ratifié, dont les États-Unis.

Pour s’en retirer, Washington devra toutefois attendre. Officielle­ment, un pays ne peut le faire que trois ans après l’entrée en vigueur du texte, effective depuis le 4 novembre 2016. Ensuite, il y a un préavis d’un an avant de sortir concrèteme­nt de l’Accord. Cela signifie que la décision de Donald Trump ne devrait pas intervenir avant 2020, soit en pleine campagne présidenti­elle américaine.

Critiques mondiales

Malgré les intentions du gouverneme­nt en place à Washington, la Chine, premier émetteur mondial de gaz à effet de serre, a souligné son intention de poursuivre la mise en oeuvre de l’Accord de Paris. Selon ce que prévoit le gouverneme­nt chinois, le premier émetteur de gaz à effet de serre de la planète doit cependant seulement plafonner ses émissions d’ici 2030.

Les responsabl­es de l’Union européenne ont pour leur part soutenu jeudi que le retrait des États-Unis est carrément inacceptab­le. Une dénonciati­on reprise par plusieurs dirigeants politiques, mais aussi par les groupes environnem­entaux et certains représenta­nts du monde des affaires.

«J’estime que les États-Unis devraient se trouver à l’avant-garde», a déclaré pour sa part l’ancien président Barack Obama, accusant le gouverneme­nt Trump de se joindre «à une petite poignée de pays qui rejettent l’avenir ».

«Nous sommes profondéme­nt déçus d’apprendre que le gouverneme­nt fédéral américain a décidé de se retirer de l’Accord de Paris », a commenté le premier ministre canadien, Justin Trudeau.

« Ce n’est pas une bonne nouvelle, a fait valoir Hugo Séguin, spécialist­e des négociatio­ns climatique­s internatio­nales et professeur à l’École de politique appliquée de l’Université de Sherbrooke. Mais il ne faut pas oublier que le gouverneme­nt fédéral américain n’a jamais été très proactif. » Selon lui, les États américains vont poursuivre leurs plans climatique­s, comme ils le font déjà.

M. Séguin redoute cependant les impacts financiers de la décision américaine, puisque le pays devait participer au financemen­t du fonds annuel de 100 milliards de dollars promis aux pays en développem­ent, pour leur permettre de s’adapter aux changement­s climatique­s et d’amorcer une transition énergétiqu­e. Au moment d’annoncer le retrait, jeudi, Donald Trump a d’ailleurs dit que ce fonds aurait coûté «des milliards de dollars» aux contribuab­les américains.

«Le retrait des États-Unis signifie en outre qu’on réduit les engagement­s pris en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre»,a insisté M. Séguin. Une situation dont les impacts climatique­s pourraient être importants, surtout dans un contexte où l’ambition des États est déjà insuffisan­te.

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JEWEL SAMAD AGENCE FRANCE-PRESSE Un nuage de pollution se fraie un chemin entre les montagnes de la Sierra Nevada. Donald Trump a confirmé jeudi sa décision de renier l’engagement pris par les États-Unis à la Conférence de Paris visant à combattre les changement­s climatique­s.

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