Recyclage du verre : une affaire réglée ?
Une nouvelle technologie permettrait de produire une matière plus pure et plus attrayante pour l’industrie
Un regroupement d’entreprises pense avoir trouvé une façon de résoudre la crise du verre qui perturbe le monde du recyclage au Québec depuis des années. La formule est si prometteuse qu’on songe même à importer du verre des États-Unis pour maximiser les ventes de verre recyclé.
Testé à Québec depuis peu, le système développé par Éco Entreprises permet de produire des poudres de verre d’une très grande qualité. «C’est vraiment une première mondiale », a déclaré la présidente du groupe, Maryse Vermette, lors d’une annonce jeudi. Le recyclage du verre ne sera bientôt plus un enjeu, selon elle.
Le verre constitue environ 18 % des produits jetés au recyclage. En plus d’être difficile à revaloriser, il complique le tri des autres produits recyclés lorsqu’il se casse.
Ces dernières années, cette situation a mis de la pression sur la Société des alcools du Québec (SAQ) pour qu’elle autorise la consigne, ce à quoi elle s’est toujours opposée.
Éco Entreprises regroupe justement la SAQ et d’autres compagnies québécoises qui vendent des produits en verre. Son réseau, qui paie déjà les coûts de 100% de la collecte sélective au Québec, s’est donné l’an dernier pour mission de régler le problème du recyclage du verre.
«On a regardé comment faisaient les pays qui géraient le verre comme nous, mélangé avec les autres produits dans le bac de récupération», raconte Mme Vermette.
«On a fait faire des études de marché sur les débouchés autres que la refonte de la bouteille et on s’est rendu compte qu’il y avait plein de possibilités. »
La consigne encore moins justifiée
Mais c’est la technologie qui change les choses, explique-ton. Jusqu’à présent, le verre qui sortait des centres de tri comprenait environ 20% de contaminants, ce qui le rendait difficile à vendre puisque les acheteurs réclament en moyenne 5% d’impuretés (morceaux d’étiquette, de métal, etc.).
Or voilà qu’Éco Entreprises a développé un système capable de produire du verre recyclé pur à 99 %.
Selon Mme Vermette, le projet rend la consigne à la SAQ encore moins justifiée qu’avant. «Il faut qu’il y ait suffisamment de tonnage pour alimenter les recycleurs», dit-elle.
Or la consigne aurait pour effet de diminuer ce tonnage, fait-elle valoir. «Si on disperse notre verre, on ne sera pas capable d’avoir un modèle d’affaires qui va répondre aux besoins des recycleurs.»
Leur nouveau système de tri a été construit dans un dôme attenant au Centre de tri de Québec. Il repose notamment sur une technologie anglaise «d’implosion» qui permet de séparer les goulets et les étiquettes plus efficacement.
C’est en combinant cette technique avec une machinerie développée au Québec chez Machinex qu’Éco Entreprises y est parvenue. Les résultats obtenus ici avec son outil sont sans précédent, selon le concepteur de la technologie, Steve Whettingsteel, de l’entreprise anglaise Krysteline, qui a vendu son produit un peu partout dans le monde.
La formule doit être testée pendant 15 mois au Centre de tri de Québec dans le cadre d’un projet pilote. Elle sera également mise à l’essai dans quatre autres centres de tri ailleurs au Québec, soit à Saint-Paul et Terrebonne (dans Lanaudière), à Grande-Rivière (Gaspésie) et à Thetford Mines (Chaudière-Appalaches). Réunies, ces cinq usines traitent le quart de tout le verre recyclé au Québec.
Pour ce qui est des débouchés, on vise les marchés des abrasifs, de la laine minérale, des ajouts cimentaires, des paillis ornementaux, des agents de filtration d’eau et de remplissage, des dalles écologiques et du verre cellulaire utilisé pour les terrains de sport.
L’intérêt pour le produit est tel, selon Mme Vermette, qu’on songe à recycler le verre des voisins. «On se demande même si on va avoir assez de verre au Québec. On va peut-être faire venir du verre d’autres provinces ! » Elle mentionne aussi les territoires américains limitrophes, comme le Vermont.