Ottawa dévoile à son tour un plan d’aide
Le gouvernement fédéral promet des mesures totalisant 867 millions sur trois ans pour soutenir l’industrie forestière face aux droits compensateurs imposés par les ÉtatsUnis, un plan salué par Québec mais immédiatement critiqué par le lobby des producteurs américains qui ont déclenché le conflit en 2016.
Le plan, dévoilé cinq semaines après celui du gouvernement Couillard, repose en grande partie sur des prêts et des garanties de prêts de 605 millions provenant de deux agences fédérales: Exportation et Développement Canada et la Banque de développement du Canada. Le reste, environ 260 millions, aidera notamment les entreprises à diversifier leurs produits, appuiera des communautés touchées et permettra de prolonger la période maximale des accords de travail partagé pour « réduire le nombre de mises à pied».
Ottawa estime que son plan est « approprié » compte tenu des circonstances et croit qu’il repose sur des bases juridiques solides. « Nous sommes absolument confiants du fait que cet ensemble de mesures est conforme à tous les traités internationaux auxquels le Canada participe», a dit la ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, lors d’une conférence de presse avec Jim Carr, le ministre des Ressources naturelles du Canada, et François-Philippe Champagne, ministre du Commerce international.
Les enveloppes ne sont pas ventilées de manière géographique, car elles seront disponibles aux entreprises dans l’ensemble du Canada, où qu’elles soient basées. En guise de comparaison, le plan est beaucoup plus important que celui dévoilé lors du précédent conflit du bois d’oeuvre (2001-2006). Il avait alors fallu à Ottawa sept mois pour aboutir à une aide de 100 millions.
Les mesures du gouvernement fédéral ont été unanimement louangées, tant à Québec que dans le monde syndical, industriel et patronal. «Nos efforts ont porté leurs fruits. […] Nous sommes très, très contents», a affirmé le ministre québécois des Forêts, Luc Blanchette. « Le fédéral envoie un message clair», a ajouté la ministre de l’Économie, Dominique Anglade.
«On voit que lorsque les acteurs se mettent ensemble pour atteindre un but, ça donne des résultats comme ce qu’on voit aujourd’hui, a dit le p.-d.g. du Conseil de l’industrie forestière du Québec, André Tremblay. Ce qu’Ottawa nous dit aujourd’hui, c’est ce que Québec avait dit aussi, c’est-à-dire: “On sera là”.» L’industrie québécoise compte 60 000 travailleurs. Le syndicat Unifor et l’Union des municipalités du Québec (UMQ) ont également exprimé leur satisfaction.
Mesures de Québec
Le plan d’Ottawa survient plus d’un mois après celui de Québec, qui demandait la participation d’Ottawa le plus rapidement possible. Le gouvernement Couillard a mis en oeuvre un plan de prêts et de garanties de prêts pour environ 180 entreprises qui font face aux droits compensateurs rétroactifs. La hauteur de cet appui pourrait atteindre environ 300 millions.
«L’annonce d’une nouvelle subvention pour les producteurs canadiens de bois d’oeuvre fait pencher encore plus la balance en faveur du Canada », a déclaré la U.S. Lumber Coalition, qui représente l’industrie américaine d’où émanent les plaintes. En gros, les producteurs américains affirment depuis des décennies que leurs concurrents canadiens profitent d’un avantage déloyal car le bois prélevé provient notamment de terres publiques.
Washington a imposé dès la fin du mois d’avril des droits se situant entre 3% et 24% pour cinq grandes entreprises — dont le groupe québécois Produits forestiers Résolu — analysées par le département du Commerce américain. Pour toutes les autres, il a imposé des droits de 19,88%, de même que des sanctions rétroactives sur 90 jours. En plus des droits compensateurs, des droits antidumping pourraient également s’appliquer dès la fin juin.
Depuis 2013, un nouveau régime forestier est en vigueur au Québec, principalement pour répondre aux préoccupations de Washington. Ainsi, une partie du bois est vendue aux enchères, et le prix obtenu permet de déterminer les redevances des compagnies pour le reste des volumes couverts par les garanties d’approvisionnement.