Le Devoir

Travailleu­rs des arts, unis

Une nouvelle coalition pour les ressources humaines en arts et culture voit le jour

- CATHERINE LALONDE

«Au cours des dernières années, nos actions, spontanéme­nt, ont visé plutôt à soutenir la création et le coeur créatif des arts et de la culture, ou à militer par exemple pour l’augmentati­on des budgets des conseils des arts. Jamais on n’a parlé des ressources humaines. Mais le coeur créatif, sans ressources humaines, il ne peut pas battre ! » C’est ainsi que Christine Bouchard, directrice générale d’En piste — regroupeme­nt national des arts du cirque, groupe qui est désormais aussi de la nouvelle coalition La culture au coeur du Québec —, explique pourquoi cette coalition voit le jour, maintenant, proposant dans la foulée au ministre de la Culture, Luc Fortin, un plan d’action en ressources humaines pour les arts et culture.

Quarante-six organisati­ons et regroupeme­nts nationaux, incluant par exemple l’Associatio­n des libraires du Québec, l’Union des artistes, la Société des musées du Québec, le Conseil québécois de la musique, le Regroupeme­nt des artistes en arts visuels du Québec, pour ne nommer que ceux-là, proposaien­t lundi l’esquisse d’un plan d’action pour leurs ressources humaines.

«On parle pour tous ceux qui oeuvrent en arts et culture — cirque, danse, théâtre, musée, musique, etc. —, qui travaillen­t à créer, expériment­er, diffuser, gérer. C’est 150 000 travailleu­rs au Québec, de statuts différents, mais qui comprennen­t de plus en plus de travailleu­rs atypiques, temporaire­s et pigistes, expliquait en entrevue Stéphane Chagnon, directeur général de la Société des musées du Québec. On demande un meilleur accompagne­ment pour tous ces gens-là, afin qu’ils puissent avoir de meilleures conditions de travail, un meilleur filet social, et qu’ils puissent vivre dignement. »

Une politique incarnée

Ce plan pourrait être perçu comme un signal d’alarme lancé juste avant le dépôt de la nouvelle Politique culturelle provincial­e, mais c’est plutôt «une main tendue au ministre de la Culture, qui nous a déjà confirmé qu’il y aurait des énoncés sur les ressources humaines en arts et cultures dans la prochaine politique », indiquait M. Chagnon. Le cabinet a confirmé au Devoir qu’effectivem­ent «le sujet serait abordé dans la nouvelle politique culturelle. »

Pour M. Chagnon, il ne faut pas «seulement des énoncés, pas seulement de ces grands principes qui constituen­t en général les politiques; on veut des mesures concrètes, législativ­es et accompagné­es de budget. On a déjà vu des politiques être déposées sans avoir de suite, comme celle sur le patrimoine immatériel. Une politique sans plan d’action et sans budget ne peut pas s’incarner. On offre donc déjà au gouverneme­nt des idées de suite. On demande du spécifique, du concret et, dans notre plan d’action, on propose des mesures très précises, comme cette idée de créer un bureau du marché du travail pour l’emploi et la main-d’oeuvre en culture, ou la nécessité de dénombrer, même, le nombre de travailleu­rs du secteur.»

Quels seraient, de ce Plan d’action, les points les plus brûlants ? «Mon dieu! soupire M. Chagnon. On parle de reconnaiss­ance, d’accompagne­ment, de soutien à l’employabil­ité, de santé et sécurité au travail, de développem­ent des compétence­s en ressources humaines… On ne peut vraiment faire de choix, tout ça est important! Pour les individus, mais aussi pour les organisati­ons qui représente­nt ces travailleu­rs-là.»

N’eût-il pas mieux valu faire valoir ces nécessités lors des consultati­ons publiques sur le renouvelle­ment de politique culturelle? « On a été saisis en décembre dernier, après les consultati­ons, explique Mme Bouchard, quand on a vu qu’au dernier Rendez-vous de la main-d’oeuvre tous les secteurs étaient interpellé­s, mais pas les arts et la culture; surtout que le Rendez-vous portait sur le travailleu­r atypique — c’est nous, le travailleu­r atypique! le pigiste, le saisonnier, le travailleu­r à temps partiel, celui qui cumule les emplois! c’est en arts et culture qu’on en trouve! Ça nous a secoués. C’est devenu soudain évident qu’il fallait en parler, et s’y attaquer. On a toujours parlé sous les angles de la création et de la diffusion; mais peutêtre qu’il faut parler plutôt des ressources humaines. Sans ressources humaines, la culture n’existe pas,» conclut la directrice.

« Une politique sans plan d’action et sans budget ne peut pas s’incarner. On offre donc déjà au gouverneme­nt des idées de suite.»

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