Les promoteurs immobiliers s’inquiètent des redevances associées au REM
L’industrie immobilière commerciale que nous représentons applaudit la décision du gouvernement du Québec de réaliser l’ambitieux projet du Réseau électrique métropolitain (REM) qui devrait être hautement déterminant pour l’avenir de la métropole québécoise. En plus d’assurer une accessibilité accrue depuis et vers le centre-ville, il permettra d’envisager concrètement la réalisation de projets de type transit oriented development (TOD) qui créeront un dynamisme immobilier rarement égalé au Québec.
Certains de nos membres ont d’ailleurs déjà annoncé leur intention de réaliser des projets immobiliers dans les aires TOD du REM, soit autour des futures stations du train. C’est la raison pour laquelle le système de redevance de développement prévu dans le projet de loi 137 sur le REM nous interpelle au plus haut point. Et force est de constater que l’adoption de ce projet de loi, tel que libellé, soulève de nombreuses interrogations sur ces redevances que devront assumer nécessairement les citoyens et commerçants qui s’installeront dans les aires TOD.
Le gouvernement sait que sans acheteur ou locataire, il n’y aura pas de projet immobilier; et que sans projet immobilier, aucune redevance ne sera versée. En ce sens, si les enjeux de viabilité financière des projets immobiliers importent, ce n’est pas tant pour satisfaire les promoteurs que pour s’assurer que les projets immobiliers correspondent aux besoins et moyens des futurs acheteurs et locataires.
Le projet de loi laisse entendre que le gouvernement du Québec veut agir comme si le marché immobilier de la région de Montréal était similaire à celui de Vancouver ou de Toronto. Or la capacité financière des acheteurs d’unités résidentielles et des locataires d’espaces commerciaux montréalais n’est pas du tout la même. Sans la prise en compte des moyens financiers des futurs acheteurs et locataires, il ne peut y avoir de projet immobilier viable et sans ces projets immobiliers, aucune redevance ne sera versée. Nous estimons donc que les questions relatives au financement du REM et celles relatives aux projets de l’industrie immobilière commerciale sont intimement liées.
L’industrie immobilière commerciale connaît en profondeur la situation du marché immobilier du Grand Montréal et l’IDU propose donc au gouvernement du Québec de la reconnaître comme un important vecteur de réussite du REM en l’invitant à faire partie d’un comité de travail avec le ministère des Transports, la Caisse de dépôt et placement du Québec et la nouvelle Autorité régionale de transport métropolitaine (ARTM). Ce comité devrait siéger immédiatement après l’adoption du projet de loi 137 par l’Assemblée nationale, qui fixe à 90 jours le temps maximum pour définir les paramètres réglementaires.
Il nous faut travailler ensemble pour empêcher que, par exemple, certains promoteurs choisissent de construire d’abord sur des sites hors-TOD afin d’éviter les surcoûts de la redevance et les contraintes de développement qui seront liées à l’aménagement des infrastructures du REM. Cela aurait plusieurs effets pervers pour le financement du REM, car la construction hors-TOD risque de réduire la fréquentation du REM dans les premières années de mise en service. En effet, la population éloignée des points d’accès aura forcément moins d’incitatifs à l’utiliser. Les revenus provenant de l’utilisation pourraient donc être réduits. S’impose donc ici la nécessité d’une application progressive des redevances.
L’IDU a identifié plusieurs autres enjeux comme l’utilisation des redevances pour financer des projets de transport collectif autre que le REM, le financement par les redevances d’autres frais relatifs à l’entretien ou l’exploitation du réseau plutôt que seulement les frais relatifs à la conception et à la construction du REM, le cumul de la redevance et de nouvelles taxes projetées par des municipalités qui pourrait avoir des effets indésirables, la perception par l’ARTM d’autres contributions pour financer des services de transport collectif distincts du REM, ainsi que l’incompatibilité du système de financement prévu par le projet de loi avec la réalité immobilière du centre-ville de Montréal.
Enfin, nous rappelons que l’ARTM vient d’être créée. Si nous saluons la nomination récente de M. Pierre Shedleur à titre de président du conseil d’administration de l’ARTM, nous devons souligner que ni cet organisme ni la nouvelle structure de gouvernance du transport collectif métropolitain n’a eu l’occasion de faire ses preuves. Dans ce contexte, il faut se demander s’il est bien prudent d’accorder dès maintenant un pouvoir aussi grand pour la perception de diverses redevances.