Sa vie de chien
Une jeune femme désoeuvrée trouve son salut dans l’armée, loin de ses semblables
MEGAN LEAVEY ★★1/2 Drame biographique de Gabriela Cowperthwaite. Avec Kate Mara, Tom Felton, Ramon Rodriguez, Edie Falco. États-Unis, 2017, 116 min.
On peut comprendre l’intérêt de Gabriela Cowperthwaite pour l’ancienne marine Megan Leavey, et surtout son affection débordante pour un berger allemand qui en a vu de toutes les couleurs, et senti bien des choses horribles. Dans Blackfish, la documentariste nous avait ouvert les yeux sur les cruelles conditions de vie des orques dans les parcs aquatiques: leurs pirouettes spectaculaires camouflaient des histoires d’horreur.
Pour ses premiers pas en fiction, elle relate minutieusement la rédemption de Megan Leavey (Kate Mara), jeune banlieusarde désoeuvrée qui, après le 11 septembre 2001, croit trouver son salut en s’enrôlant dans les marines. Reconnue partout où elle passe comme un être incapable d’entrer en contact avec les autres, la dynamique s’avère différente lorsqu’on lui impose le nettoyage des cages de chiens renifleurs de bombes — une sanction que ses supérieurs jugent méritée. Or, en présence de Rex, agressif et difficile à apprivoiser, Megan est convaincue qu’elle peut établir avec lui un lien privilégié.
Elle aura tout le loisir de prouver son intuition lorsqu’elle sera déployée en Irak, alignant les réussites sur le champ de bataille (reconstitué en Espagne), réussissant aussi à sympathiser avec un camarade de combat, Matt (Ramon Rodriguez), l’homme idéal si seulement il affichait la même dévotion qu’elle pour les Yankees de New York… Après un carnage qui a bien failli lui coûter la vie, Megan revient au pays, forcée de renouer avec sa famille dysfonctionnelle, et privée de la présence de Rex, de retour en territoire hostile. Elle fera tout pour qu’il en soit autrement, menant une lutte acharnée pour réussir à l’adopter, ce qui n’est pas dans la tradition des marines.
Pour le cinéma américain, la guerre en Irak et la lutte contre le terrorisme constituent des réservoirs de bonnes histoires pour alimenter la machine à rêves, et celle du patriotisme. Celle de Megan Leavey contient tous les ingrédients pour tirer les larmes et conforter les certitudes sur la puissance d’une armée dont une partie des effectifs s’y retrouve davantage par dépit que par idéalisme. C’était d’ailleurs vrai pour cette femme dont les drames personnels sont discrètement révélés tout au long de son entraînement, permettant ainsi de la rendre (un peu) plus attachante.
Ce métier atypique dont les risques ressemblent à ceux décrits par Kathryn Bigelow dans The Hurt Locker occupe la part congrue de ce récit voué à vanter les vertus de cette machine de guerre qui sait parfois avoir bon coeur. Des conflits percutants se déroulent aussi sur le terrain familial (grâce à une flamboyante Edie Falco en mère pas maternelle pour deux sous), et les véritables enjeux amoureux sont, sans surprise, ceux qui tissent la relation privilégiée entre Megan et Rex. Il faut alors un acte de foi pour adhérer à cette proposition appuyant sur toutes les manettes du mélodrame animalier, toujours aussi populaire depuis que Walt Disney en a fait un genre en soi. Megan Leavey ne révolutionne pas la formule, montrant les hauts et les bas de cette vie de chien, ou ce qui s’en rapproche dangereusement. V.O.A. : Forum, Place LaSalle, Colisée Kirkland, Spheretech, Marché Central. V.F.: Quartier latin, StarCité, Marché Central.