Le Devoir

Revendique­r le droit de jeûner ou non

En Tunisie, des dizaines de manifestan­ts ont demandé à l’État de protéger les libertés individuel­les des personnes qui mangent pendant le jour

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Tunis — Des dizaines de personnes ont manifesté dimanche à Tunis pour réclamer le droit de manger et de boire en public durant le ramadan, le mois de jeûne musulman, et pour protester contre l’arrestatio­n des non-jeûneurs, une première en Tunisie.

Aucune loi n’interdit de manger ou de boire en public pendant le ramadan en Tunisie, mais le débat sur cette question revient chaque année.

La Constituti­on tunisienne garantit «la liberté de croyance et de conscience», mais l’État est aussi décrit comme « gardien de la religion ».

À l’appel du mouvement «Mouch Bessif» («pas contre notre volonté», en arabe), les manifestan­ts se sont rassemblés au centre de Tunis criant notamment «la liberté individuel­le est garantie par la constituti­on ».

« En quoi ça te dérange si tu jeûnes et si je mange?», «Arrêtez les terroriste­s et laissez tranquille­s les non-jeûneurs», «Non aux arrestatio­ns des non-jeûneurs », pouvait-on lire sur des affiches brandies par les protestata­ires.

Arrestatio­ns

Début juin, quatre hommes avaient été arrêtés puis condamnés à un mois de prison pour «outrage public à la pudeur» après avoir mangé dans un jardin en plein ramadan.

«Nous sommes ici pour protester contre les poursuites judiciaire­s contre les non-jeûneurs et pour réclamer [le respect de] la liberté individuel­le. Celui qui veut jeûner, il jeûne, et celui qui ne veut pas, il ne jeûne pas», a dit à l’AFP Karim Chaïr, la trentaine.

« Je jeûne et je suis venu pour participer à cette manifestat­ion et appeler avec ces gens au respect de la liberté de la croyance et de la conscience», a affirmé Kamel Jalouli, un sexagénair­e. C’est la première fois qu’a lieu en Tunisie une manifestat­ion avec une telle revendicat­ion.

Depuis la révolution de 2011, des voix se sont élevées pour revendique­r le droit à ne pas jeûner, mais cela n’avait jamais pris la forme d’une manifestat­ion.

Discrétion

Lors du ramadan, les fidèles musulmans s’abstiennen­t de boire et de manger jusqu’à la tombée du jour, comme le préconise le Coran.

En Tunisie, la plupart des cafés et restaurant­s ferment ainsi pendant la journée. Ceux qui restent ouverts le font discrèteme­nt.

Durant les premiers jours du ramadan cette année, un prédicateu­r très médiatique s’était rendu dans des cafés ouverts pendant la journée pour filmer les clients et jeter l’opprobre sur eux, une interventi­on qui a été très critiquée sur les réseaux sociaux.

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SOFIENNE HAMDAOUI AGENCE FRANCE-PRESSE Les manifestan­ts rassemblés au centre-ville de Tunis arboraient des pancartes demandant le respect de leur libre choix en matière religieuse. L’État est décrit comme «gardien de la religion».

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