Coderre accusé d’agir en « seigneur féodal »
Le limogeage de deux conseillers de l’opposition cause un malaise à l’Hôtel de Ville de Montréal
Après avoir tassé deux élus des partis d’opposition, le maire Denis Coderre a nommé la mairesse de LaSalle, Manon Barbe, à la présidence du conseil d’agglomération et octroyé la vice-présidence du conseil d’administration de la Société de transport de Montréal (STM) à la conseillère indépendante Elsie Lefebvre.
Les élus montréalais se sont prononcés sur les nominations proposées par le maire Coderre mardi après-midi lors de l’assemblée du conseil municipal. Mais le vote s’est déroulé sur fond d’acrimonie et de profond malaise.
«Je ne suis clairement pas content de perdre 40% de mon salaire […] mais je crois que les nominations que l’Équipe Denis Coderre a faites viendront le hanter, notamment quand certains faits seront connus la semaine prochaine», a déclaré Marvin Rotrand.
Devenu chef de Coalition Montréal en décembre dernier, le conseiller avait appris, lundi, que le maire Coderre lui retirerait la vice-présidence de la STM, un poste qu’il occupait depuis 16 ans. C’est Elsie Lefebvre prendra ses fonctions.
«On peut jouer à la victime, mais il n’y a personne qui est dupe, a rétorqué le maire Coderre. On a fait un choix. Dès le début de l’année, lorsqu’il a décidé de devenir chef de sa formation politique, il a dit qu’il allait faire de l’opposition. On ne peut pas être l’opposition et porte-parole de l’administration.»
«On veut insuffler un vent nouveau », a ajouté le maire Coderre, qui soutient avoir voulu accorder une plus grande place aux femmes dans les postes décisionnels. «C’est mathématique, tout simplement. Si j’avais voulu être partisan — et c’est ma prérogative —, j’aurais pu changer toutes les présidences.»
Malaise
Le conseil municipal a également approuvé la nomination de Manon Barbe à la présidence de l’agglomération pour remplacer Benoit Dorais. Il y a deux semaines, le maire du Sud-Ouest avait préféré grossir les rangs Projet Montréal plutôt que ceux d’Équipe Denis Coderre en prévision des élections de novembre.
Au moment du vote, certains élus ont exprimé leur malaise. «On est obligés d’assister au spectacle du maire qui veut nous montrer sa puissance, comme un seigneur féodal qui veut montrer qu’il peut donner et reprendre. C’est infiniment triste, a commenté le conseiller de Projet Montréal François Limoges. On n’a rien contre la nomination d’Elsie Lefebvre, même si on peut se désoler que M. Rotrand ait été là 16 ans et que c’est un peu cavalier de le remercier comme ça.»
Plus tôt dans la journée, la chef du Vrai Changement pour Montréal, Justine McIntyre, avait questionné le maire sur ses décisions: «Comment prétendre qu’on n’assiste pas à un épurage à la veille des élections? a-t-elle demandé. On utilise encore les nominations politiques pour récompenser les petits amis qui vont suivre les lignes de parti et pour punir les petits moutons noirs qui sortent de ces lignes.»
« Il n’y a aucune épuration », s’est défendu le maire Coderre.
Elsie Lefebvre n’a pas voulu commenter sa nomination. La conseillère de Villeray avait annoncé dimanche qu’elle quittait Coalition Montréal pour devenir indépendante afin de se donner le temps de «réfléchir» à son avenir politique.