Taipei de plus en plus isolé
Pékin parvient à arracher les relations avec le Panama à Taïwan
Pékin a réussi mardi un coup diplomatique en établissant des relations avec le Panama aux dépens de l’île rivale de Taïwan, qui ne compte plus désormais que 20 partenaires à la surface du globe.
Sablant le champagne, le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, et son homologue panaméenne, Isabel Saint Malo de Alvarado, ont signé à Pékin le communiqué officialisant l’établissement des relations.
Le communiqué précise que «Panama rompt aujourd’hui même ses relations diplomatiques » avec Taïwan «et s’engage à cesser toute relation officielle ou tout contact officiel avec Taïwan».
Perdre ses amis
Taipei ne compte plus que 20 États le reconnaissant dans son camp, parmi lesquels le Vatican et de petits pays essentiellement situés dans le Pacifique ou en Amérique latine.
« Nous condamnons avec force Pékin, qui manipule la politique dite de “la Chine unique” pour continuer à réduire l’espace international de Taïwan par divers moyens», a immédiatement réagi la présidence taïwanaise.
Les tensions diplomatiques, atténuées sous le précédent gouvernement taïwanais, ont repris depuis l’arrivée au pouvoir l’an dernier du parti de la présidente Tsai Ing-wen, opposée au principe de «la Chine unique», selon lequel Pékin interdit à tout pays d’entretenir des relations officielles avec des dirigeants taïwanais.
Mme Tsai a particulièrement agacé Pékin en réussissant début décembre à parler au téléphone avec Donald Trump, alors qu’aucun président américain n’avait plus adressé la parole à un président taïwanais depuis l’établissement des relations diplomatiques entre les États-Unis et la Chine en 1979.
Cela «a renforcé la détermination de Pékin à donner une leçon à Taïwan», observe le politologue Willy Lam, de l’Université chinoise de Hong Kong.
En Amérique centrale, tous les pays reconnaissaient Taïwan jusqu’à ce que le Costa Rica rompe en 2007 ses relations diplomatiques avec cette île.
Le ministre panaméen du Commerce, Augusto Arosemena, a rappelé que la Chine était deuxième utilisateur du canal de Panama derrière les États-Unis et le quatrième partenaire commercial de son pays: «Le Panama exporte pour plus de 50 millions de dollars de produits vers la Chine. Nous voyons [l’établissement de liens diplomatiques] comme une étape positive qui générera énormément d’occasions pour Panama.»
«L’Amérique latine reste un bastion pour Taïwan en nombre de pays» le reconnaissant officiellement, onze entre l’Amérique centrale et les Caraïbes, souligne Margaret Myers, directrice du programme Chine et Amérique latine du centre d’études Inter-American Dialogue, à Washington.
Mais «il semble que de nombreux pays arrivent à la conclusion que des liens forts avec Pékin, pour attirer des investissements et améliorer les relations commerciales, sont peut-être dans leur plus grand intérêt ».
«Cela ne me surprendrait pas si l’on voyait le Nicaragua être le prochain à basculer », estime-t-elle, ce pays accueillant notamment un chantier de canal interocéanique à capitaux chinois destiné à concurrencer celui de Panama.
L’annonce de mardi survient une semaine après le début de la construction par les Chinois d’un port de conteneurs, avec des installations de gaz naturel, dans la province de Colon (nord du Panama).