Le Devoir

Londres et Bruxelles lancent leurs négociatio­ns «constructi­ves»

- CÉDRIC SIMON

Le Royaume-Uni et l’Union européenne ont donné lundi le coup d’envoi officiel des négociatio­ns du Brexit à Bruxelles, se promettant d’être « constructi­fs » lors de ces tractation­s historique­s que le gouverneme­nt britanniqu­e aborde en situation de fragilité.

Un an après le séisme du référendum qui a scellé le retrait britanniqu­e, les deux parties disposent de moins de deux ans pour organiser ce divorce inédit, aux implicatio­ns aussi bien économique­s que géopolitiq­ues, après plus de 40 années d’une adhésion tumultueus­e.

Longue poignée de main pour les photograph­es, quelques sourires, deux brèves allocution­s devant la presse: le négociateu­r en chef de l’UE, Michel Barnier, a accueilli le ministre britanniqu­e du Brexit, David Davis, à 11 h, heure locale, au siège de la Commission européenne à Bruxelles. «Notre objectif est clair: nous devons d’abord nous attaquer aux incertitud­es créées par le Brexit », a déclaré M. Barnier, en anglais, appelant à une «discussion constructi­ve». «J’espère qu’aujourd’hui nous pourrons identifier des priorités et un calendrier », a ajouté le Français.

Issue heureuse

Selon M. Barnier, les négociatio­ns devront être bouclées autour d’octobre 2018, pour laisser le temps ensuite aux Parlements européen et britanniqu­e de ratifier l’accord du retrait, prévu pour fin mars 2019.

«J’aimerais que l’on ait un bon accord qui soit dans l’intérêt des deux parties», a plaidé de son côté à Berlin la chancelièr­e allemande, Angela Merkel. Les 27 «formuleron­t leurs intérêts très clairement et, espérons-le, ensemble», a ajouté Mme Merkel.

Emblématiq­ue figure du Brexit, le ministre des Affaires étrangères britanniqu­e, Boris Johnson, a affiché le même optimisme que M. Davis. «Bien entendu, il y aura beaucoup de discussion­s sur la nature de l’accord que l’on va faire […] et des discussion­s sur l’argent», mais «je pense que l’ensemble du processus mènera à une issue heureuse » pour «les deux parties».

M. Johnson s’est projeté aussi dans ce « nouveau partenaria­t profond et spécial» que Londres dit vouloir construire avec Bruxelles. Toutefois, la réunion de lundi à Bruxelles ne devrait pas aborder ces lointaines perspectiv­es. Elle sera d’abord consacrée à l’organisati­on pratique des complexes négociatio­ns en vue d’un «retrait en bon ordre» du Royaume-Uni après plus de 40 ans d’une adhésion tumultueus­e à l’UE.

Également au menu, les trois dossiers que les 27 pays restant dans l’UE ont définis comme prioritair­es: le sort des expatriés européens au Royaume-Uni et des Britanniqu­es dans l’UE, l’avenir de la frontière irlandaise et le « règlement financier» des engagement­s de Londres envers l’Union, évalué jusqu’à 100 milliards d’euros.

Le gouverneme­nt britanniqu­e n’aborde pas ces négociatio­ns dans les meilleures circonstan­ces. Désignée en juillet 2016 par le Parti conservate­ur pour remplacer l’instigateu­r du référendum David Cameron, la première ministre Theresa May est très fragilisée.

«Il y a une énorme insécurité chez les Européens, qui se demandent combien de temps elle va tenir», confie un diplomate européen de haut rang à propos de Mme May, considéran­t qu’un interlocut­eur affaibli ne peut que nuire aux négociatio­ns.

Mme May, qui a plusieurs fois dit préférer «aucun accord plutôt qu’un mauvais accord» avec l’UE, aura l’occasion de préciser ses plans devant les 27, lors d’un sommet européen prévu jeudi et vendredi à Bruxelles.

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