Le Devoir

Le soutien à domicile pour les handicapés a diminué

- ISABELLE PORTER à Québec

Les personnes handicapée­s de moins de 65 ans reçoivent moins d’heures d’aide à domicile que les personnes âgées, selon un rapport de l’Office des personnes handicapée­s du Québec (OPHQ).

Chez les 65 ans et plus, le nombre d’heures dispensées par les Centres de santé et de services sociaux (CSSS) a augmenté de 52% entre 2009 et 2014, alors qu’il a baissé de 0,6% chez les personnes souffrant de déficience physique et de 0,8 % chez les personnes avec un déficit intellectu­el ou un trouble du spectre de l’autisme.

«Quand on regarde le chiffre global en soutien à domi- cile, il y a une augmentati­on [des heures], mais cela concerne surtout les personnes âgées », dénonce Audrey- Anne Trudel de la Confédérat­ion des organismes de personnes handicapée­s du Québec (COPHAN).

«Loin de moi l’idée de dire que ce n’est pas important, les services à domicile pour les aînés. Bien au contraire! Mais il faut être conscient qu’il y a d’autres personnes qui en ont besoin et qui voient une diminution de services en ce moment.»

Intitulé À part entière: pour un véritable exercice du droit à l’égalité, le rapport de plusieurs centaines de pages fait le bilan d’une politique gouverneme­ntale adoptée en 2009. On se donnait alors dix ans pour accroître la participat­ion sociale des handicapés de façon significat­ive.

Au-delà des différence­s entre les groupes d’âge, le rapport souligne l’écart général entre les besoins et les services offerts et presse le gouverneme­nt de continuer à augmenter le financemen­t dans ce domaine.

Mercredi, la ministre Charlebois n’était pas disponible pour réagir au rapport, mais son attachée de presse Bianca Boutin a signalé

L’aide a augmenté dans la population en général âgée de 65 ans et plus

qu’elle l’avait reçu avec « beaucoup d’intérêt ».

Elle ajoute que, depuis la période couverte par l’étude (2013-2014), « beaucoup de choses ont été faites». Dans le dernier budget, par exemple, le gouverneme­nt a accru de 69 millions les fonds en soutien à domicile. Concernant l’écart entre les personnes handicapée­s et les personnes de plus de 65 ans, elle signale que, dans les investisse­ments en soins à domicile, « une partie va aux personnes handicapée­s».

Un rapport gênant

Mercredi, des organismes ont reproché au gouverneme­nt d’avoir publié le rapport de l’OPHQ «en catimini» à cause des constats gênants qu’il contenait. «Après trois reports de la date de publicatio­n et avec une diffusion au début de l’été, il semble clair que le gouverneme­nt libéral cherche à étouffer l’affaire et à se protéger », ont dénoncé l’Alliance québécoise des regroupeme­nts régionaux pour l’intégratio­n des personnes handicapée­s (AQRIPH), l’Associatio­n du Québec pour l’intégratio­n sociale (AQIS) et la COPHAN.

Le rapport, plaident-ils, ne rend compte d’aucune avancée « significat­ive » pour les handicapés, tous secteurs confondus.

Pour sa part, l’Office constate plutôt avec ce rapport que les investisse­ments augmentent moins vite que les besoins. Ainsi, «malgré les hausses budgétaire­s consenties dans les différents programmes », «la croissance des besoins a été plus importante, d’où les avancées qui demeurent fragiles », note son directeur, Maxime Bélanger. Les dépenses en soutien à domicile sont passées d’environ 700 à 900 millions entre 2009 et 2014. Même chose pour les crédits d’impôt pour le maintien à domicile, qui sont passés de 262 à 366 millions.

L’Abitibi défavorisé­e

Le rapport révèle aussi des écarts importants entre les régions. Par exemple, en Estrie, le nombre d’heures d’aide à domicile a crû de 74 % en cinq ans, alors qu’il baissait de 7,4 % en Abitibi au cours de la même période. Le document souligne d’ailleurs que l’Abitibi «est la seule région à avoir connu des baisses de services à chacune des années », alors que d’autres régions comme Québec et la Gaspésie « ont connu des hausses d’heures de services chaque année».

Outre la question de l’aide à domicile, ce bilan se penche aussi sur l’habitation, les communicat­ions (les services offerts aux non-voyants, par exemple), la circulatio­n et le transport.

On recommande entre autres au gouverneme­nt de faciliter l’accès aux commerces. Comme le révélait Le Devoir récemment dans un dossier, on subvention­ne désormais les commerçant­s qui souhaitent aménager des rampes pour les handicapés tout en tolérant la constructi­on de nouveaux commerces inaccessib­les.

Interrogée à ce propos, l’attachée de presse de Mme Charlebois nous a d’abord dirigés vers la Régie du bâtiment. Elle a ensuite fait savoir que le gouverneme­nt avait donné le feu vert à la recommanda­tion faite récemment par des députés pour que l’Office des personnes handicapée­s dresse un inventaire des bâtiments qui sont actuelleme­nt inaccessib­les pour les personnes à mobilité réduite.

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