Le Devoir

Envolées, les mesures impopulair­es de May

- MAUREEN COFFLARD à Londres

La reine Élisabeth II a présenté mercredi au Parlement le programme du gouverneme­nt de Theresa May, expurgé de toute mesure qui fâche et orienté vers le travail colossal qui attend le pays pour sortir de l’Union européenne.

Lors de ce discours, écrit par le gouverneme­nt mais traditionn­ellement lu par la souveraine, aucune mention n’a été faite d’une visite d’État du président américain Donald Trump, jetant le doute sur sa tenue, initialeme­nt prévue à l’automne.

La plupart des mesures sociales impopulair­es contenues dans le programme électoral du Parti conservate­ur de Mme May ont été abandonnée­s dans cette feuille de route du gouverneme­nt pour les deux ans à venir. Entre-temps, la première ministre a perdu sa majorité absolue à l’issue des législativ­es anticipées du 8 juin.

La suppressio­n des repas gratuits pour les écoliers britanniqu­es? Le projet de financer les soins liés à la dépendance des personnes âgées par un prélèvemen­t sur les succession­s? La réintroduc­tion de la chasse au renard? Envolés.

Brexit mou?

«La priorité de mon gouverneme­nt est de garantir le meilleur accord possible alors que le pays quitte l’Union européenne», a dit la reine, se faisant porte-parole de Mme May.

Elle a ajouté que le gouverneme­nt britanniqu­e chercherai­t «à construire le consensus le plus large possible sur l’avenir du pays hors de l’Union européenne» alors que le gouverneme­nt est divisé sur la question.

Theresa May prônait avant son échec électoral un Brexit sans concession, avec sortie du marché unique et contrôle des frontières pour limiter l’immigratio­n européenne, mais son échec remet en question cette ligne dure.

Le programme définit une législatio­n pour sortir le pays de l’UE, forte de huit lois sur les vingt-sept au total présentées par le gouverneme­nt, destinée à abolir le Code de la loi de 1972 qui avait incorporé le droit européen au droit britanniqu­e et à créer de nouvelles règles en matière de commerce, d’immigratio­n, de pêche ou encore d’agricultur­e.

Après la série d’attentats qui a endeuillé le pays et le terrible incendie de la tour Grenfell de Londres qui a fait 79 morts, le projet de créer une force d’interventi­on spéciale en cas de catastroph­e a été annoncé, ainsi qu’une nouvelle commission pour lutter contre l’extrémisme. Mme May veut aussi réviser la stratégie antiterror­iste.

Faute d’avoir pleinement la main sur le Parlement, le gouverneme­nt peut à présent essuyer un camouflet lors d’un vote de confiance programmé le 29 juin, après plusieurs jours de débats parlementa­ires.

Avec 317 sièges sur 650, les conservate­urs doivent désormais compter sur le soutien des dix députés du petit parti ultraconse­rvateur nord-irlandais DUP pour atteindre la majorité absolue. Mais un accord de gouverneme­nt avec le DUP tarde à se concrétise­r.

Excuses

Hors du parlement, un millier de personnes ont défilé jusqu’à Downing Street pour appeler à «faire tomber le gouverneme­nt», réclamant aussi «justice» pour les sinistrés de la tour Grenfell. Ceux-ci ont accusé les autorités de ne pas avoir pris la mesure du drame et d’avoir ignoré leurs avertissem­ents sur les conditions de sécurité de l’immeuble. Fait rare, Theresa May a dans la foulée présenté devant le Parlement ses «excuses» pour la façon dont les autorités sont initialeme­nt venues en aide aux victimes, reconnaiss­ant un «échec».

Le quotidien conservate­ur The Times qualifiait mercredi la formation de Mme May de «gouverneme­nt de zombie», affirmant qu’elle est «tellement affaiblie qu’elle ne peut pas arbitrer les querelles entre ses ministres», sur fond de grogne grandissan­te de la population quant à sa stratégie concernant le Brexit.

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