Le Devoir

Le livre bleu de Couillard: de la société distincte à la nation québécoise

- MANON MASSÉ GABRIEL NADEAU-DUBOIS Porte-parole de Québec solidaire NIKA DESLAURIER­S Présidente de Québec solidaire

Les derniers mois ont été tumultueux dans le mouvement indépendan­tiste québécois. Il n’est certes pas nouveau que les discussion­s soient vives entre groupes et partis indépendan­tistes, mais, récemment, ces débats d’idées se sont trop souvent transformé­s, de part et d’autre, en affronteme­nts purement partisans. Pour donner le goût du pays à nos concitoyen­s, nous devons faire mieux.

Pourtant, loin d’être périmé, le principe d’autodéterm­ination des peuples est d’une actualité criante. Ainsi, à l’heure où le premier ministre Philippe Couillard, avant d’avoir procédé à une quelconque forme de consultati­on du peuple québécois, se lance dans une campagne de relations publiques pancanadie­nne afin de promouvoir la relance de discussion­s constituti­onnelles, notre volonté de faire l’indépendan­ce de façon démocratiq­ue doit résonner plus fort que jamais. Plus largement, alors que les accords de libreéchan­ge et les lois de la mondialisa­tion néolibéral­e corsettent de plus en plus étroitemen­t la souveraine­té des États, l’idée selon laquelle les peuples doivent décider démocratiq­uement de leur destin est d’une pertinence renouvelée. De l’Écosse à la Catalogne, les luttes pour l’autodéterm­ination n’ont donc pas fini d’animer les démocratie­s.

Montée de l’intoléranc­e

Or ces mouvements doivent aujourd’hui composer avec l’indéniable montée de l’intoléranc­e. Des deux côtés de l’Atlantique, les personnes racisées et issues de l’immigratio­n sont désignées comme boucs émissaires par des forces politiques démagogues qui, combinant nostalgie nationalis­te et mythologie patriotiqu­e, s’appuient sur l’insécurité économique et sociale pour créer des divisions entre « vraie » et « fausse » citoyennet­é. Le Québec et le Canada n’échappent pas à cette conjonctur­e: la montée de groupes d’extrême droite qui s’improvisen­t défenseurs de l’identité nationale, l’attentat à la grande mosquée de SainteFoy et la récente augmentati­on des crimes haineux observée sont autant de signes qui nous rappellent que nous ne sommes pas à l’abri.

Ces faits exigent un examen de conscience de la part de toutes les formations politiques, et les forces indépendan­tistes québécoise­s ne font pas exception. Elles ont même un devoir d’exemplarit­é. Plus que jamais, Québec solidaire affirme clairement ses intentions: dans notre volonté de faire du Québec un pays, nous ne laisserons personne derrière. Notre volonté à lutter contre la discrimina­tion et le racisme systémique, présents au Québec comme ailleurs, n’a rien de l’autoflagel­lation: elle est au contraire un indicateur de notre maturité politique, de notre capacité à prendre la pleine mesure des défis du Québec. D’un point de vue politique, il s’agit de la seule position responsabl­e. D’un point de vue stratégiqu­e, cela représente le seul moyen de débloquer le cul-de-sac actuel. Seule une stratégie inclusive et radicaleme­nt démocratiq­ue pourra, à notre avis, relancer la marche du peuple québécois vers son indépendan­ce, et ce, dans un dialogue égalitaire avec les peuples autochtone­s.

En cette Fête nationale, nous souhaitons rappeler que, quelles que soient nos opinions sur les exigences de laïcité de l’État et de la défense de l’identité politique, linguistiq­ue et culturelle du Québec, les progressis­tes indépendan­tistes ont la tâche constante de démontrer que le projet souveraini­ste du Québec n’est pas un projet ethnique, mais un projet politique inclusif et émancipate­ur, où tous les citoyens sont égaux en libertés, en droits et en responsabi­lités. Le rejet de toutes politiques tablant sur les ressentime­nts et les peurs d’autrui doit constituer le socle de notre projet de pays. Allons de l’avant et ne laissons personne derrière.

 ??  ??
 ?? JACQUES GRENIER LE DEVOIR ??
JACQUES GRENIER LE DEVOIR

Newspapers in French

Newspapers from Canada