Le Devoir

Une stratégie jugée sans ambition

- ANNABELLE CAILLOU

Pour réduire la dépendance du Québec au pétrole et favoriser les énergies propres, le gouverneme­nt Couillard investira 1,5 milliard de dollars d’ici 2020. Mais les 43 mesures dévoilées lundi par le ministre Pierre Arcand pour atteindre ces objectifs manquent «d’ambition» et «ne vont pas assez loin», jugent des organismes environnem­entaux.

«Le gouverneme­nt se fixe des objectifs qu’on applaudit en matière de réduction des gaz à effets de serre et de réduction de l’utilisatio­n de pétrole, mais les actions prises ne permettron­t pas de les atteindre à temps», déplore le directeur général d’Équiterre, Sidney Ribaux.

Réduire de 40 % la quantité de pétrole consommé à travers tout le territoire d’ici 2030, sans s’attaquer davantage au milieu du transport, lui apparaît difficile. «100 000 véhicules électrique­s sur les routes d’ici 2020, c’est insuffisan­t, ça fait déjà deux ans qu’on a cet objectif, affirme-t-il. Et ça ne compte pas l’augmentati­on naturelle du nombre de véhicules sur les routes chaque année. »

M. Ribaux estime que le gouverneme­nt pourrait viser plus grand considéran­t l’expansion du marché de la voiture électrique au Québec. « Le nombre de modèles sera beaucoup plus grand en 2020, on peut faire plus. »

De son côté, le porte-parole de Greenpeace, Patrick Bonin, soutient qu’encourager uniquement l’achat de véhicules électrique­s n’est pas non plus la solution. L’utilisatio­n de véhicules « énergivore­s » devrait être davantage pénalisée, selon lui. «[Les conducteur­s] payent une taxe dérisoire et en aucun cas dissuasive à l’heure actuelle, note-t-il. L’argent récupéré pourrait être investi dans le transport en commun, qui devrait être une priorité au Québec. »

Il accueille toutefois comme «un pas en avant » l’investisse­ment de 295 millions de dollars d’ici 2020 dans l’électrific­ation du transport en commun.

Un plan contradict­oire

D’après Sidney Ribaux, la volonté du gouverneme­nt de réduire la consommati­on du pétrole entre par contre en contradict­ion avec sa décision de continuer à en produire sur le territoire québécois.

Le porte-parole du Parti québécois en matière d’énergie, Sylvain Rochon, abonde dans le même sens, caractéris­ant le plan d’action du gouverneme­nt Couillard «d’improvisat­ion» et de «saupoudrag­e de mesures» manquant de concret. Il juge urgent d’abandonner l’exploratio­n et l’exploitati­on de pétrole et de gaz de schistes.

«C’est incohérent de vouloir investir dans le gaz naturel et dans la fracturati­on hydrauliqu­e, renchérit M. Ribaux. Ce n’est pas une énergie du futur, ce sera encore plus difficile si on investit là de réduire notre dépendance dans 15 à 20 ans. »

Le ministre des Ressources naturelles prévoit en effet le dépôt d’un nouveau règlement dès cet automne pour encadrer l’industrie. Il envisage par contre de donner aux municipali­tés la possibilit­é de choisir des zones incompatib­les avec l’extraction.

L’énergie solaire, l’avenir?

La volonté du gouverneme­nt Couillard de faire du Québec un chef de file dans la production d’énergie solaire a par contre été largement bien accueillie.

Dans son plan d’action, il demande à HydroQuébe­c d’évaluer comment la production d’électricit­é solaire pourrait répondre aux besoins des Québécois. La société d’État devra réaliser un projet-pilote de parc solaire, dont le lieu reste pour l’heure inconnu, avant la fin de l’année.

« C’est une bonne nouvelle. Le prix de l’énergie solaire a diminué dans les 7 dernières années de près de 80% grâce aux évolutions technologi­ques », explique M. Bonin. Selon lui, cette énergie va rapidement devenir plus compétitiv­e que d’autres moyens de produire de l’électricit­é et entraînera de meilleures retombées économique­s pour la province.

Le Parti québécois s’inquiète toutefois de voir ce projet se transforme­r en «catastroph­e, comme l’a été la filière éolienne dans le passé, en ne demandant aucune exigence de contenus québécois».

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