Fort Lorette : la Ville promet d’acheter le site
Le terrain situé dans Ahunstic-Cartierville renferme les plus vieux vestiges de Montréal
Montréal fera l’acquisition du site de l’ancien Fort Lorette, dans Ahuntsic-Cartierville. C’est ce que le maire Denis Coderre a promis lundi, trois mois après que le terrain de la Congrégation des Soeurs de Miséricorde est passé aux mains d’un promoteur privé.
Des recherches archéologiques menées sur le site bordant la rivière des Prairies ont confirmé la présence de tranchées correspondant aux anciennes palissades du Fort Lorette et permis la découverte d’artefacts.
Il y a dix jours, le ministre de la Culture, Luc Fortin, avait annoncé avoir signé un avis d’intention de classement afin de protéger l’ancienne mission sulpicienne.
«Pour Montréal, c’est une découverte archéologique majeure », estime Vincent Garneau, coprésident de la Société d’histoire d’AhuntsicCartierville. «Ce sont parmi les plus vieux vestiges de Montréal qui ont été découverts là. Avec l’église de la Visitation, qui est la plus vieille de l’île de Montréal, ça crée un pôle intéressant pour le patrimoine historique. »
Denis Coderre reconnaît la valeur exceptionnelle du site qui a accueilli le Fort Lorette des Sulpiciens en 1696 et il s’engage à ce que la Ville en fasse l’acquisition pour rendre les lieux accessibles au public. «On va s’associer aux experts de Pointe-à-Callière, l’Université de Montréal et l’Université McGill pour en faire un centre d’interprétation », a-t-il expliqué.
Au préalable, des fouilles archéologiques plus poussées devront être réalisées.
Projet immobilier
Sauf que pour acheter ce terrain situé au 12 375, rue du Fort-Lorette, la Ville devra négocier avec le promoteur Antonio Rizzo, qui a acheté la propriété des Soeurs de Miséricorde pour 2 millions au mois de mars dernier.
Pourquoi la Ville n’a-t-elle pas acheté le terrain à ce moment ? «Les religieuses ne l’ont jamais offert à la Ville ou à l’arrondissement », a soutenu Lorraine Pagé. La Ville a été mise devant le fait accompli quand la vente a été réalisée, a dit la conseillère du district de Saultau-Récollet en signalant que les religieuses ont refusé l’accès au site pour la conduite de fouilles archéologiques.
Avant même d’acheter la propriété, le promoteur avait présenté un projet de développement immobilier, a précisé Lorraine Paré. Mais il ne pourra jamais réaliser son projet compte tenu de l’avis de classement et du zonage qui est demeuré institutionnel, a-telle souligné.
La conseillère de Projet Montréal Émilie Thuillier estime qu’en matière de patrimoine la Ville est toujours « en mode réaction». Selon elle, le site du Fort Lorette n’en est qu’un exemple de plus. «C’est sûr qu’on est d’accord [avec le projet d’achat] parce que c’est ça qu’il faut faire, mais on est “en mode rattrapage”. Il est minuit et quart. Le terrain est vacant depuis une dizaine d’années. Comment se fait-il que personne n’ait réagi ? »
Mme Thuillier déplore que la Ville n’ait pas acheté la propriété au moment opportun. Elle aurait évité de se retrouver dans une situation délicate qui l’oblige à négocier avec un promoteur immobilier. L’élue craint d’ailleurs que cela fasse grimper le coût de la facture pour la Ville. Au rôle foncier, la valeur de la propriété atteint 3 millions.
300 ans d’histoire
« C’est sûr que quelqu’un l’a échappé quelque part», admet Vincent Garneau, de la Société d’histoire d’AhuntsicCartierville.
Reste que le site est d’un grand intérêt patrimonial, ditil. Le site a accueilli une mission sulpicienne qui s’était d’abord installée au pied du mont Royal avant de migrer au village de Sault-au-Récollet à la fin du XVIIe siècle.
«Il y a plus que le Fort Lorette. Il y a 300 ans d’histoire sur ce petit terrain-là», souligne M. Garneau en rappelant qu’un véritable complexe y a été érigé avec la maison SaintJanvier (1853), une résidence pour prêtres retraités, et la crèche Saint-Paul (1912).
Quant au promoteur Antonio Rizzo, il n’a pas rappelé Le Devoir.