Les Premières Nations attendent des gestes concrets du Québec
Un plan de 147 millions pour le développement social et culturel
Le Plan d’action gouvernemental pour le développement social et culturel des Premières Nations et des Inuits a été accueilli favorablement par les représentants autochtones réunis à Québec mercredi. Mais le premier ministre Philippe Couillard a rapidement été rattrapé par les cris du coeur de deux communautés du Québec, qui ont dénoncé son inaction.
Le premier est venu de Manawan, une communauté attikamek de Lanaudière qui réclame depuis 20 ans des services ambulanciers.
Depuis la noyade d’une enfant de huit ans en septembre, le chef Jean-Roch Ottawa et les maires des municipalités avoisinantes multiplient les sorties médiatiques et les appels aux élus afin qu’une ambulance desserve la communauté de 2000 personnes.
«Il y a pourtant 500 interventions par année à Manawan. Est-ce que c’est vraiment parce qu’on est autochtones ou est-ce que le système est comme ça? On commence à se dire qu’on est victimes de discrimination », s’est inquiété le grand chef Ottawa dans un entretien avec Le Devoir.
Selon Philippe Couillard, Manawan est victime d’une chicane entre Québec et Ottawa. «Quand on s’enfarge — pardonnez-moi le québécisme — dans ces questions de juridictions, on n’arrive pas à faire des projets », a-t-il déploré.
«Il se défile quand il dit ça, a répliqué Jean-Roch Ottawa. C’est une porte de sortie extrêmement facile. La communauté de Manawan est dans la province de Québec; on est qui par rapport au reste de la population ? »
Au Québec, Santé Canada ou les conseils de bande assument les transports ambulanciers. Selon ce que prévoit la politique québécoise de déplacement des usagers, « Santé Canada ne rembourse le transport ambulancier qu’à titre de dernier agent payeur». Dans le cadre de référence du ministère de la Santé, on précise que les factures remises à Ottawa «ne correspondent qu’à environ 10% du coût réel du service de transport ambulancier, le reste étant payé par le Québec par l’entremise des ententes de services avec les transporteurs ambulanciers».
Le second appel adressé au premier ministre a pris la
forme d’un article de journal, publié mercredi matin. «Elle est où, l’aide qu’on a promise?» a demandé par l’entremise du Soleil la grand-mère de Nadeige Guanish, dont le suicide — le cinquième en neuf mois à survenir dans la communauté innue d’Uashat mak Maliotenam, en 2009 — a déclenché une enquête publique.
«Pour ce cas particulier, il faudrait voir les détails, je ne peux pas répondre précisément à votre question», a réagi le premier ministre. L’enquête publique, commandée par son gouvernement, devait servir à «tirer des leçons qui s’appliquent partout», avait dit Philippe Couillard à son lancement. Elle s’est conclue par la publication d’un rapport du coroner, qui dénonçait le « régime d’apartheid» dans lequel les autochtones du Canada sont plongés.
Le plan du gouvernement Couillard, qui se décline en quatre axes, a néanmoins été accueilli comme étant «un pas dans la bonne direction », pour reprendre l’expression du chirurgien innu — et grand marcheur — Stanley Vollant.
Québec alloue 147 millions sur cinq ans à la réalisation de 110 mesures, notamment des programmes de formation sur les réalités autochtones destinés aux employés de l’État, aux fonctionnaires municipaux et aux membres des corps policiers, dont la Sûreté du Québec. Aussi dans le plan : l’intention d’adopter une déclaration nationale sur les langues autochtones «qui affirme la place particulière qu’elles occupent au Québec» et le désir de «favoriser l’embauche d’autochtones pour exercer des emplois reliés aux services judiciaires». L’enveloppe qui l’accompagne, comme la nature des mesures qu’on y retrouve, pourrait être bonifiée.