Le Devoir

Les taux d’intérêt «ont fait leur travail», dit Stephen Poloz

- ANDY BLATCHFORD

Ottawa — À l’approche de la prochaine décision de la Banque du Canada sur sa politique monétaire, les attentes concernant un relèvement du taux d’intérêt directeur de la banque centrale se sont faites plus vives mercredi, après que son gouverneur eut répété que la réduction des taux de 2015 semblait avoir fait son travail.

Lors d’un entretien diffusé par la chaîne d’actualités d’affaires CNBC, Stephen Poloz a noté que l’économie canadienne avait connu une croissance « étonnammen­t » vigoureuse pendant les trois premiers mois de 2017. Il a en outre affirmé qu’il s’attendait à ce que sa cadence reste supérieure à son potentiel.

Le dollar canadien s’est hissé à un sommet de quatre mois à la suite des commentair­es de M. Poloz. Le huard s’est négocié mercredi au cours moyen de 76,44¢ US, les investisse­urs semblant croire de plus en plus que la banque centrale canadienne pourrait hausser son taux directeur lors de sa prochaine annonce, prévue dans deux semaines. La devise canadienne avait affiché mardi un cours moyen de 75,83 ¢ US.

Si la banque centrale devait hausser son principal taux d’intérêt, les grandes banques canadienne­s relèveraie­nt vraisembla­blement leurs propres taux préférenti­els, ce qui ferait grimper le coût des hypothèque­s à taux variables et celui d’autres prêts et lignes de crédit lié au taux directeur.

M. Poloz a aussi souligné la réussite des deux baisses de taux introduite­s par la banque en 2015, qui ont permis à l’économie de contrebala­ncer les effets du plongeon du cours du pétrole brut amorcé dans les derniers mois de 2014. Ces baisses de taux ont aussi aidé à l’accélérati­on de l’ajustement, a ajouté M. Poloz.

«Il semble vraiment que ces baisses ont fait leur boulot», a affirmé M. Poloz, qui se trouvait mercredi au Portugal pour participer à un forum organisé par la Banque centrale européenne. « Mais nous nous rapprochon­s d’une nouvelle décision sur les taux d’intérêt, alors je ne veux pas hâter mon jugement. Mais nous devons certaineme­nt considérer la situation dans son ensemble, maintenant que la capacité, la capacité excédentai­re, est utilisée de façon soutenue.»

Plus tard mercredi, la sousgouver­neure de la banque centrale Lynn Patterson a fait écho aux propos de M. Poloz dans un discours prononcé à Calgary. Elle a notamment rappelé que les baisses des taux d’intérêt avaient «facilité l’ajustement de l’économie au choc des prix du pétrole», avant de préciser que «l’effet modérateur exercé par la baisse des cours s’est en grande partie estompé».

Il y a déjà quelque temps que des dirigeants de la banque centrale canadienne se montrent plus téméraires dans leurs déclaratio­ns. M. Poloz et la première sous-gouverneur­e de la banque, Carolyn Wilkins, ont suggéré, plus tôt en juin, que la banque se rapprochai­t de sa première hausse des taux en près de sept ans. M. Poloz avait déjà déclaré que les baisses de taux avaient fait leur boulot.

Malgré tout, la publicatio­n de données plus faibles que prévu sur l’inflation, vendredi dernier, a fait croire à certains analystes que la banque préférerai­t peut-être attendre jusqu’à l’automne, ou plus tard, avant de resserrer ses taux. L’inflation reste sous la cible idéale de deux pour cent préconisée par la Banque du Canada.

Mais des économiste­s ont interprété les commentair­es de mercredi comme un signal que la banque n’avait pas changé d’avis, même après avoir pris connaissan­ce des chiffres sur l’inflation. Plusieurs croient maintenant que les taux pourraient être relevés dès la prochaine décision de la banque, le 12 juillet. «Ils ont clairement indiqué qu’ils étaient prêts à agir», a estimé l’économiste Benjamin Reitzes, de la Banque de Montréal. «Nous nous attendons maintenant à une hausse des taux en juillet.» L’économiste Jimmy Jean, de Desjardins, a pour sa part écrit : «Cela ne sonne pas comme un gouverneur de banque centrale profondéme­nt ébranlé par [l’indice des prix à la consommati­on] plus faible que prévu de vendredi dernier.»

La Banque du Canada a réduit son taux directeur à deux reprises en 2015 et celui-ci se situe depuis au très faible niveau de 0,5 %. Les baisses visaient à minimiser l’impact du plongeon du cours du pétrole brut sur l’économie canadienne. M. Poloz a jugé mercredi que la croissance avait rebondi à une cadence encouragea­nte ces derniers mois. Il s’attend en outre à ce que la croissance ralentisse pour renouer avec un niveau plus normal, même si elle devrait rester supérieure à son potentiel.

M. Poloz a en outre observé que quasiment toutes les grandes régions du monde semblent prendre un certain élan économique — les États-Unis étant loin devant à ce chapitre.

Poloz a noté que l’économie canadienne avait connu une croissance «étonnammen­t» vigoureuse pendant les trois premiers mois de 2017

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SEAN KILPATRICK LA PRESSE CANADIENNE Le gouverneur de la Banque du Canada, Stephen Poloz

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