La déconcertante minceur de la comédie musicale Footloose
FOOTLOOSE Musique: Tom Snow. Paroles: Dean Pitchford. Livret: Dean Pitchford et Walter Bobbie. Mise en scène, traduction et adaptation : Serge Postigo. Chorégraphies : Steve Bolton. Direction musicale : Guillaume St-Laurent. Une production de Juste pour rire. Au théâtre Saint-Denis jusqu’au 5 août.
Après avoir dirigé Mary Poppins et avant de se mesurer à Fame, l’été prochain, Serge Postigo présente ces jours-ci au théâtre Saint-Denis, à l’occasion du Festival Juste pour rire, sa mise en scène de Footloose, une comédie musicale inspirée du long métrage réalisé en 1984 par Herbert Ross.
Le film et sa bande sonore, pour ainsi dire cultes, ont obtenu un immense succès auprès des adolescents d’autrefois (autrement dit les quarantenaires d’aujourd’hui). C’est le scénariste, Dean Pitchford, qui a entrepris, avec le librettiste Walter Bobbie, de transformer le film en comédie musicale. Reprenant bien entendu les airs connus, comme Footloose, Holding Out for a Hero, Let’s Hear It for the Boys et Almost Paradise, il a donné naissance, avec le compositeur Tom Snow, à une douzaine de nouvelles chansons.
Depuis sa création à Broadway en 1998, où elle a récolté des critiques plutôt partagées, la comédie musicale a connu quelques moutures. On dit que l’oeuvre, présentée en ce moment même en tournée au Royaume-Uni, n’a cessé de se modifier et de se bonifier au fil des productions. Malgré cela, le récit du spectacle donné ces jours-ci à Montréal est d’une déconcertante minceur. Si bien qu’on a souvent l’impression d’assister à une revue musicale, une suite de numéros rattachés par un simple prétexte. Un sentiment que la mise en scène de Postigo, peu imaginative, est loin de dissiper. Sans parler de son adaptation, qui présente d’inexplicables et désagréables allers-retours entre le français et l’anglais, dans les dialogues aussi bien que dans les chansons.
Abandonné par son père, le jeune Ren McCormack doit quitter Chicago pour s’installer, avec sa mère, dans une toute petite ville, Bomont, où le révérend Samuel Moore interdit à ses paroissiens de danser en public. À partir de là, Ren et ses nouveaux amis, à commencer par Ariel Moore, la fille rebelle du strict pasteur, vont tout faire pour abolir cette règle qu’ils considèrent comme absurde. Étrangement, les éléments les plus intéressants de l’histoire, ceux qui auraient pu donner de la chair aux personnages, seront à peine évoqués.
Pour entendre parler et chanter un peu plus en détail de sujets comme la monoparentalité, la spiritualité, la quête identitaire et amoureuse des jeunes et des moins jeunes, sans oublier le deuil d’un père ou encore celui d’un fils, on aurait été prêt à sacrifier un ou deux tableaux à grand déploiement, quelques projections vidéo à l’emporte-pièce. Portés par une trentaine d’interprètes et huit musiciens, investissant la salle aussi bien que la scène, les numéros chorégraphiés par Steve Bolton sont bien entendu réjouissants, mais ils ne font nullement progresser l’action, sans parler de la manière bien peu imaginative dont ils représentent le corps de la femme.
Heureusement, il y a quelques exceptions à la règle, des scènes intimistes qui donnent brièvement accès à l’intériorité de certains protagonistes, à commencer par celles où le révérend et son épouse, déchirés par la perte de leur fils dans un accident de voiture, tentent de traduire leur souffrance. Dotés de voix superbes, Émilie Josset et Dominique Côté nous offrent certainement les moments les plus émouvants de la soirée. Quant aux passages les plus drôles, c’est sans contredit Tommy Joubert qui en est la cause. Dans les habits du timide Willard, le comédien fait preuve d’un grand sens comique. Dans les rôles principaux, Philippe Touzel et Éléonore Lagacé s’en tirent honorablement, mais sans brûler les planches. Entre les amoureux, une chimie est encore à trouver.
On a souvent l’impression d’assister à une revue musicale, une suite de numéros rattachés par un simple prétexte