Le Devoir

L’accessibil­ité au logement se détériore à des niveaux records

- GÉRARD BÉRUBÉ

La Colombie-Britanniqu­e, mais surtout Toronto ont poussé l’indice d’accessibil­ité au logement à des niveaux jamais vus depuis le krach immobilier de 1990-1992.

La frénésie immobilièr­e dans l’agglomérat­ion torontoise a poussé l’indice canadien d’accessibil­ité au logement à des niveaux « insoutenab­les » au premier trimestre. Selon les données du service des études économique­s de la Banque Royale, l’indice atteignait 45,9% au Canada après trois mois en 2017, soit son deuxième plus haut niveau depuis 1990. La mesure d’accessibil­ité exprime la proportion du revenu avant impôts qu’un ménage doit consacrer aux coûts de possession d’une propriété, y compris les versements hypothécai­res, les services publics et les impôts fonciers.

À Toronto, l’indice a établi un record de 72%, partant de 69,3% au quatrième trimestre de 2016. Le précédent record, de 70,6%, remonte à 1990, année de déclenchem­ent du krach immobilier de 19901992. Et un afflux d’acheteurs quittant Toronto pour sa banlieue a provoqué une flambée des prix sur les marchés limitrophe­s de Hamilton, de St. Catharines et de Kitchener-Waterloo, ajoute l’institutio­n. À Toronto, le prix moyen des maisons unifamilia­les est monté à 1,21 million en mars, une hausse de 33,4% sur un an.

«À une seule reprise depuis 1990 les Canadiens ont eu à dépenser autant pour leurs frais de propriété», a résumé Craig

Wright, économiste en chef de RBC. « Cela démontre la rapidité avec laquelle la hausse des prix de l’immobilier est venue détériorer l’accessibil­ité l’an dernier.»

À Vancouver, où il y a également surchauffe, l’indice d’accessibil­ité s’est légèrement amélioré, passant de 80,9% au quatrième trimestre de 2016 à 79,7% après trois mois en 2017. La série de gestes posés l’an dernier pour refroidir ce marché produit ses effets.

Relative stabilité

Au-delà de ces deux poches de surchauffe, l’accessibil­ité au logement dans les autres grands marchés est demeurée relativeme­nt stable, une modeste améliorati­on dans les Prairies compensant une détériorat­ion marginale au Québec (à 43 % à Montréal) et dans les provinces atlantique­s.

Craig Wright salue les mesures annoncées par le gouverneme­nt ontarien le 20 avril dernier visant à abaisser la tension sur le marché immobilier. «Mais il faudrait deux ou trois trimestres pour que l’impact de ces mesures se fasse sentir dans Toronto et ses environs.» L’économiste invite également à inscrire ces déséquilib­res dans un environnem­ent de hausse imminente des taux d’intérêt. «La Banque du Canada pourrait augmenter ses taux directeurs plus vite que ce à quoi s’attendaien­t les marchés financiers. En résultat, la politique monétaire causerait un risque accru pour le marché immobilier canadien. »

Le mois dernier, le gouverneme­nt ontarien retenait la formule de l’imposition d’une taxe de 15% sur la spéculatio­n pour les non-résidants. Son programme comprenait 16 mesures, dont un renforceme­nt de la protection des locataires contre les hausses de loyer soudaines et substantie­lles, la permission accordée à la métropole torontoise d’imposer une taxe sur les propriétés vacantes et d’utiliser des terrains excédentai­res pour construire des logements abordables.

Premier résultat, les ventes dans le marché résidentie­l canadien ont connu une forte baisse le mois suivant, l’Associatio­n canadienne de l’immeuble attribuant notamment cette chute à l’effet de cette taxe imposée aux acheteurs étrangers dans l’agglomérat­ion torontoise.

Le nombre de propriétés résidentie­lles vendues à l’échelle canadienne a diminué de 6,2% entre avril et mai. Il s’agissait de la plus importante baisse mensuelle en cinq ans, les ventes effectuées en mai à Toronto et dans les villes avoisinant­es ayant à elles seules baissé de 25,3 %.

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GRAEME ROY LA PRESSE CANADIENNE À Toronto, le prix moyen des maisons unifamilia­les est monté à 1,21 million en mars.

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