Le Devoir

Strip-tease thérapeuti­que

- Collaborat­eur Le Devoir V.O.F. : Quartier latin, Beaubien. ANDRÉ LAVOIE

France, 2017, 90 min. Comédie dramatique d’Anne-Gaëlle Daval. Avec Florence Foresti, Mathieu Kassovitz, Nicole Garcia, Jonathan Cohen.

De plus belle, premier longmétrag­e d’Anne-Gaëlle Daval, regorge de promesses, dont une qui frappe par son caractère singulier: pas un film sur les ravages d’une maladie abondammen­t décrite au cinéma (le cancer), mais sur les lendemains de la victoire, une fois la menace écartée. La personne en rémission ressent parfois un vide, un vertige, car l’entourage qui s’était mobilisé retourne vaquer à ses occupation­s trop longtemps négligées.

Lucie (Florence Foresti, prête à casser son image de rigolote douée) s’en plaint amèrement à son frère médecin, lui qui ne cesse de la rassurer sur sa santé retrouvée, mais rien n’y fait. Pour cette mère seule, déroutée devant son adolescent­e monosyllab­ique, le bonheur n’est pas chose facile, obsédée par cette perruque qu’elle porte comme un boulet, symbole de la menace qui gronde. Bien qu’en présence de sa mère, Yvonne (Josée Devron), acariâtre, injuste, incisive, le cancer semble une tragédie bien relative…

Deux anges gardiens viendront se placer sur la route de Lucie, mais ne lui apporteron­t pas le salut sur un plateau d’argent. Elle résistera longtemps aux numéros de charme d’un Don Juan impénitent (Mathieu Kassovitz en bellâtre un peu ridé), et découvrira que Dalila (Nicole Garcia, souvent irritante avec ses répliques en anglais pour jouer à la pro), perruquièr­e de métier, donne aussi des classes de strip-tease thérapeuti­que à des femmes pour qui les miroirs sont leurs pires ennemis. Toutes préparent un grand spectacle burlesque où elles en mettront plein la vue, laissant aussi tomber quelques plumes au passage; là encore, Lucie opposera un peu de résistance avant que ne survienne ce qu’elle craignait tant.

Anne-Gaëlle Daval a su échapper à quelques pièges, ceux caractéris­tiques du « disease movie », dont le tracé est souvent très bien balisé, ressemblan­t parfois à un chemin de croix. Son héroïne au tempéramen­t pessimiste et revêche multiplie les faux pas, lui donnant davantage une allure de gaffeuse que de martyre, sauf aux côtés de sa mère, diplômée de l’école Tatie Danielle. Dans des environnem­ents souvent agréables et lumineux, dont les beautés vite reconnaiss­ables de Lyon (sans ses célèbres bouchons de circulatio­n!), les enjeux médicaux semblent parfois secondaire­s, pour ne pas dire aseptisés.

Charmante jonglerie entre rires et larmes, De plus belle s’affiche comme un film célébrant la beauté des femmes, mais rarement celle dictée par l’esprit marchand. Les quelques images de nudité, jamais choquantes ou racoleuses, sont là pour le souligner avec élégance, trouvant aussi en Florence Foresti une égérie qui n’a rien d’Angelina Jolie. On s’en moque d’ailleurs gentiment, tout comme de l’immaturité sentimenta­le des hommes volages (tâche ingrate dévolue par un débonnaire Kassovitz). Or, Anne-Gaëlle Daval sait aussi qu’elle ne signe pas un brûlot féministe, mais une comédie rassembleu­se à l’optimisme débordant, voire excessif dans sa finale. À sa manière, elle vend aussi du rêve, mais qui s’en plaindra ?

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MK2/MILE-END Dans De plus belle, Florence Foresti tient le rôle d’une patiente en rémission d’un cancer qui connaît des lendemains difficiles.

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