Tous les regards tournés vers la Banque du Canada
Les propriétaires et premiers acheteurs évalueront l’impact de sa décision sur les prêts à taux variables
La perspective d’une hausse du taux directeur de la Banque du Canada ce matin — et l’hypothèse d’une nouvelle tendance pour le reste de l’année et 2018 — soulève inévitablement des questions pour les propriétaires et premiers acheteurs qui se demanderont s’il est préférable d’opter pour un prêt à taux fixe plutôt qu’à taux variable.
«L’écart des deux taux en ce moment favorise beaucoup la variable, ça peut être un demi-point de pourcentage de moins», a dit mardi Denis Doucet, directeur de la formation chez MultiPrêts. «Donc les gens peuvent se dire “si ça augmente d’un quart de point, je suis encore plus bas qu’un cinq ans à taux fixe”. […] Mais pour certains, le seul fait de penser à une hausse potentielle peut les pousser vers un prêt à taux fixe.»
Il est estimé qu’un relèvement d’un quart de point a, en moyenne, un impact de 6 $ par mois pour chaque tranche de prêt de 50 000 $. Pour une copropriété à 200 000 $, cela équivaut à une ponction annuelle de 288 $ dans les poches d’un propriétaire.
Une fois considérés l’aversion au risque et le besoin de prévisibilité budgétaire, quiconque voudrait passer d’un prêt à taux variable à un prêt à taux fixe, avant le renouvellement, peut le faire, mais la personne doit d’abord s’informer auprès de l’institution pour connaître les modalités. Car une conversion peut parfois mener vers le «taux affiché», ce qui est beaucoup plus élevé, ou déclencher une pénalité, dit M. Doucet. S’il ne voit pas de «mouvement massif » vers les prêts à taux fixe pour l’instant, il n’écarte pas le fait que la teneur du message de la Banque du Canada pourrait influencer la suite des choses.
Convaincus d’une hausse
Les marchés, eux, parient lourdement sur une augmentation de 25 points de base du taux directeur, ce qui agira sur le coût des emprunts pour les particuliers et les entreprises. Car outre les indicateurs économiques militant en faveur d’une hausse, la Banque du Canada a multiplié les commentaires laissant entendre que le taux allait peut-être augmenter pour la première fois depuis les deux baisses surprises de 2015.
La Banque du Canada annoncera sa décision à 10 h, après quoi une conférence de presse aura lieu à 11h15 avec le gouverneur Stephen Poloz et la première sous-gouverneure, Carolyn Wilkins.
«Le ton des communications de la Banque a changé assez rapidement en juin, à la suite d’une avalanche de données positives, et les marchés ont réagi très vite à ça. À partir de là, le ton de leur discours est demeuré constant, ce qui nous laisse croire qu’il y aura une hausse de taux», dit Dominique Lapointe, analyste principal à l’Institut des finances publiques et de la démocratie de l’Université d’Ottawa. «La dernière fois qu’elle avait agi et surpris les marchés, c’était en janvier 2015 avec une baisse de taux, et il y avait eu presque de la frustration [dans le marché].» Une autre n’est pas exclue cette année, mais elle dépendra notamment des indicateurs économiques et de l’impact de la renégociation de l’ALENA, selon lui.
L’impact des taux d’intérêt sur les prêts hypothécaires est un enjeu crucial, car l’endettement des ménages est déjà relativement élevé et qu’il est une source de préoccupation pour les autorités. Le directeur parlementaire du budget, Jean-Denis Fréchette, a récemment estimé qu’une hausse des taux accroîtrait la vulnérabilité des ménages.
Par ailleurs, au moins deux grandes banques ont déjà augmenté les taux sur les prêts de cinq ans à taux fixe: la Banque Royale et la Banque de Montréal. Les taux fixes s’arriment non pas au taux directeur de la Banque du Canada, mais aux taux des obligations gouvernementales de cinq ans. Dans le cas de la Banque Royale, son taux sur cinq ans a été relevé de 20 points de base, à 2,84%.