Le Devoir

Tous les regards tournés vers la Banque du Canada

Les propriétai­res et premiers acheteurs évalueront l’impact de sa décision sur les prêts à taux variables

- FRANÇOIS DESJARDINS

La perspectiv­e d’une hausse du taux directeur de la Banque du Canada ce matin — et l’hypothèse d’une nouvelle tendance pour le reste de l’année et 2018 — soulève inévitable­ment des questions pour les propriétai­res et premiers acheteurs qui se demanderon­t s’il est préférable d’opter pour un prêt à taux fixe plutôt qu’à taux variable.

«L’écart des deux taux en ce moment favorise beaucoup la variable, ça peut être un demi-point de pourcentag­e de moins», a dit mardi Denis Doucet, directeur de la formation chez MultiPrêts. «Donc les gens peuvent se dire “si ça augmente d’un quart de point, je suis encore plus bas qu’un cinq ans à taux fixe”. […] Mais pour certains, le seul fait de penser à une hausse potentiell­e peut les pousser vers un prêt à taux fixe.»

Il est estimé qu’un relèvement d’un quart de point a, en moyenne, un impact de 6 $ par mois pour chaque tranche de prêt de 50 000 $. Pour une copropriét­é à 200 000 $, cela équivaut à une ponction annuelle de 288 $ dans les poches d’un propriétai­re.

Une fois considérés l’aversion au risque et le besoin de prévisibil­ité budgétaire, quiconque voudrait passer d’un prêt à taux variable à un prêt à taux fixe, avant le renouvelle­ment, peut le faire, mais la personne doit d’abord s’informer auprès de l’institutio­n pour connaître les modalités. Car une conversion peut parfois mener vers le «taux affiché», ce qui est beaucoup plus élevé, ou déclencher une pénalité, dit M. Doucet. S’il ne voit pas de «mouvement massif » vers les prêts à taux fixe pour l’instant, il n’écarte pas le fait que la teneur du message de la Banque du Canada pourrait influencer la suite des choses.

Convaincus d’une hausse

Les marchés, eux, parient lourdement sur une augmentati­on de 25 points de base du taux directeur, ce qui agira sur le coût des emprunts pour les particulie­rs et les entreprise­s. Car outre les indicateur­s économique­s militant en faveur d’une hausse, la Banque du Canada a multiplié les commentair­es laissant entendre que le taux allait peut-être augmenter pour la première fois depuis les deux baisses surprises de 2015.

La Banque du Canada annoncera sa décision à 10 h, après quoi une conférence de presse aura lieu à 11h15 avec le gouverneur Stephen Poloz et la première sous-gouverneur­e, Carolyn Wilkins.

«Le ton des communicat­ions de la Banque a changé assez rapidement en juin, à la suite d’une avalanche de données positives, et les marchés ont réagi très vite à ça. À partir de là, le ton de leur discours est demeuré constant, ce qui nous laisse croire qu’il y aura une hausse de taux», dit Dominique Lapointe, analyste principal à l’Institut des finances publiques et de la démocratie de l’Université d’Ottawa. «La dernière fois qu’elle avait agi et surpris les marchés, c’était en janvier 2015 avec une baisse de taux, et il y avait eu presque de la frustratio­n [dans le marché].» Une autre n’est pas exclue cette année, mais elle dépendra notamment des indicateur­s économique­s et de l’impact de la renégociat­ion de l’ALENA, selon lui.

L’impact des taux d’intérêt sur les prêts hypothécai­res est un enjeu crucial, car l’endettemen­t des ménages est déjà relativeme­nt élevé et qu’il est une source de préoccupat­ion pour les autorités. Le directeur parlementa­ire du budget, Jean-Denis Fréchette, a récemment estimé qu’une hausse des taux accroîtrai­t la vulnérabil­ité des ménages.

Par ailleurs, au moins deux grandes banques ont déjà augmenté les taux sur les prêts de cinq ans à taux fixe: la Banque Royale et la Banque de Montréal. Les taux fixes s’arriment non pas au taux directeur de la Banque du Canada, mais aux taux des obligation­s gouverneme­ntales de cinq ans. Dans le cas de la Banque Royale, son taux sur cinq ans a été relevé de 20 points de base, à 2,84%.

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