Julie Payette Servir le pays… sur Terre
L’ex-astronaute est émue d’avoir une autre chance de servir le Canada… sur Terre
Elle a su apprendre à opérer le bras spatial canadien en orbite. Julie Payette a bon espoir qu’elle parviendra maintenant à trouver ses repères diplomatiques et constitutionnels en tant que gouverneure générale. L’ancienne astronaute québécoise a accepté, émue, sa nomination en promettant d’entrée de jeu de poursuivre sa promotion des sciences et technologies.
«Déjà bien connue des Canadiens, Mme Payette s’est distinguée en tant que scientifique accomplie, pilote d’avion de chasse, athlète, spécialiste en politiques publiques, musicienne et, bien sûr, comme championne de la science et de la technologie», a vanté le premier ministre Justin Trudeau en confirmant sa nomination devant les portes du Sénat jeudi. Les deux Montréalais se connaissaient quelque peu, s’étant croisés «trois ou quatre fois» au cours des dernières années. Dès que le nom de Julie Payette a été évoqué comme possible 29e gouverneure générale, « c’est devenu très, très clair qu’en matière de valeurs, d’approche, de priorités, c’était quelqu’un en qui j’ai énormément confiance pour ce poste et pour notre pays», a relaté M. Trudeau.
Le rôle est avant tout symbolique: Julie Payette sera dès l’automne chargée d’accueillir les dignitaires en visite au pays, de représenter le Canada à l’étranger, d’accorder la sanction royale aux projets de loi et de prononcer les discours du Trône du premier ministre au Sénat. En de rares occasions, cependant, les représentants de la reine peuvent être appelés à trancher le sort d’un gouvernement — comme l’avait fait Michaëlle Jean en 2008 en accordant une prorogation à Stephen Harper, qui s’apprêtait à être renversé par une coalition.
Julie Payette n’a pas grande expérience constitutionnelle ou politique — elle dit n’avoir
jamais été membre d’un parti fédéral ou provincial. « Comme tout nouveau travail, il y a de l’apprentissage à faire», a-t-elle concédé en point de presse, aux côtés du premier ministre. «Mais ça me rappelle en fait beaucoup les missions spatiales, puisque lorsqu’on engage des astronautes, ce ne sont pas des spécialistes en mécanique spatiale ou encore moins de robotique, a-t-elle noté. Mais on forme les astronautes dans ces tâches qu’ils vont accomplir dans l’espace. Alors, je pense que je vais m’atteler à la tâche et que, avec un petit peu de travail et d’énergie, je vais aller chercher la connaissance. Je devrais pouvoir me débrouiller. »
Celle qui est devenue la première Québécoise à voyager dans l’espace en 1999 — avant d’y retourner en 2009 — était visiblement émue d’accepter son nouveau mandat et d’avoir «la chance formidable, une seconde chance de servir le Canada à nouveau».
Une pionnière saluée par tous
Les réactions étaient unanimes, jeudi. Tour à tour, chefs politiques et anciens collègues ont félicité cette «pionnière».
« Mme Payette est bien placée pour jouer un rôle de leadership comme prochaine gouverneure générale du Canada», a commenté le chef conservateur Andrew Scheer. « Le choix de Mme Payette est génial puisqu’elle incarne certaines des plus grandes qualités du Canada», a renchéri Thomas Mulcair, du NPD, en notant que l’ancienne astronaute de 53 ans «a réussi à atteindre des sommets dans des secteurs traditionnellement dominés par des hommes ».
Le Bloc québécois ne s’en est pas pris à la gouverneure générale désignée, mais le député Rhéal Fortin a dénoncé «l’inutilité de ce poste». «Il serait temps que les libéraux s’en rendent compte.»
Un autochtone pour la prochaine fois?
Plusieurs espéraient que Justin Trudeau arrête son choix sur un autochtone. Quatre de ses propres députés autochtones le lui avaient demandé — mais ont dit accepter jeudi le choix de Julie Payette. «Comme ça a été dit bien souvent, la réconciliation, ce n’est pas juste une affaire entre les autochtones et le gouvernement »,a fait valoir le premier ministre, se disant convaincu que Mme Payette «va être dévouée à la cause de la réconciliation parmi ses autres priorités ». Le néodémocrate Romeo Saganash a cependant déploré «une occasion ratée».
La future gouverneure générale souhaite prendre le temps de réfléchir à ce qu’elle compte faire de son nouveau mandat. « Vous pouvez vous imaginer que ce sera peut-être lié à la science, à la technologie, à une société de savoir », a-t-elle néanmoins présumé, tout sourire.