Le Devoir

Baleines noires : Ottawa impose des mesures

- ALEXANDRE SHIELDS

Dans un geste sans précédent sur le Saint-Laurent, le gouverneme­nt fédéral impose un moratoire temporaire sur la pêche au crabe des neiges dans une vaste zone du golfe, afin de protéger les baleines noires qui s’y concentren­t. Mais Pêches et Océans Canada annonce du même coup la suspension des opérations de sauvetage de ces cétacés lorsqu’ils sont empêtrés, en raison de la mort d’un sauveteur de baleines lundi.

Dans un souci de « minimiser le risque» pour les baleines noires, le fédéral ferme dès vendredi tout un secteur de pêche situé entre la Gaspésie et les îles de la Madeleine. Il s’agit d’un vaste territoire maritime où plusieurs individus de cette espèce en voie de disparitio­n ont été observés au cours des dernières semaines.

Cette «mesure d’atténuatio­n immédiate» est donc imposée afin de tenter de protéger les baleines noires qui fréquenten­t le golfe du SaintLaure­nt. Pêches et Océans prévient que «d’autres fermetures pourraient être mises en vigueur si jugé nécessaire», en plus de promettre une évaluation des pêches pratiquées dans cette zone « pour prendre les mesures visant à éviter tout effet négatif sur les baleines ».

Le fondateur de la Station de recherche sur les cétacés des îles Mingan, Richard Sears, estime que le gouverneme­nt fédéral doit impérative­ment mieux étudier les secteurs fréquentés par ces animaux, afin d’éviter les morts. Il rappelle que des mesures importante­s ont d’ailleurs été prises aux États-Unis, ce qui a permis de sauver l’espèce de la disparitio­n.

Navires et baleines

Ce moratoire temporaire et sans précédent a été annoncé en réaction à la mort de sept d’entre elles depuis un mois, un nombre record, essentiell­ement dans le secteur où Ottawa impose le moratoire sur la pêche au crabe.

Selon les résultats préliminai­res des nécropsies réalisées sur cinq des baleines, au moins trois auraient été frappées par des navires, tandis qu’une quatrième est morte après un empêtremen­t dans un engin de pêche. Ces deux causes de mortalité sont à ce point importante­s pour l’espèce qu’elles limiteraie­nt même son rétablisse­ment.

Ottawa demande d’ailleurs aux navires commerciau­x de réduire «volontaire­ment» leur vitesse de navigation le long du chenal Laurentien dans les voies de trafic maritime entre les îles de la Madeleine et la péninsule gaspésienn­e.

Sauvetages suspendus

Par ailleurs, Pêches et Océans a confirmé jeudi au Devoir que les inter ventions pour libérer des baleines noires empêtrées dans des engins de pêche sont suspendues pour une durée indétermin­ée. Ottawa veut réviser les politiques d’inter vention.

«Notre objectif vise à assurer que les mesures d’interventi­on sont mises en oeuvre de la manière la plus sécuritair­e possible pour toute personne y participan­t », précise Pêches et Océans. Lundi, un sauveteur de baleines a été tué par une baleine noire qu’il venait de libérer, la première tragédie du genre à sur venir au Canada.

Le fédéral a en outre indiqué que tout cas d’empêtremen­t pour les autres espèces de cétacés sera évalué «pour décider si oui ou non il convient d’intervenir et de quelle manière». Chaque année, plusieurs baleines sont libérées dans les eaux canadienne­s.

Richard Sears, qui étudie les baleines du Saint-Laurent depuis près de 40 ans, juge que le fédéral «doit prendre ses responsabi­lités » et consacrer davantage de ressources aux sauvetages.

Pour le moment, dit-il, les équipes sont souvent laissées seules, sans réel appui de Pêches et Océans.

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