Le Devoir

Ben l’Oncle Soul : à la recherche de l’icône américaine

- YVES BERNARD

En 2016, Ben l’Oncle Soul a fait paraître Under my Skin, un disque qui révèle sa vision de Frank Sinatra. Une vision black, soul, pénétrée d’accents de blues et de jazz, avec quelques syncopes qui rapprochen­t du reggae. Plusieurs standards y apparaisse­nt : Moonlight Serenade, My Way, New York, New York… en tout, 11 titres traités à la manière du soulman national de France qui s’amène au Québec pour défendre ses versions de l’icône américaine. Avec ses neuf musiciens, il s’arrête ce dimanche à la place d’Youville à Québec, et le lendemain au National de Montréal.

«Pourquoi Sinatra? En fait, je ne le connaissai­s absolument pas. Le projet, c’est aussi pour combler mes lacunes parce que j’avais l’impression d’être passé à côté d’un monument», admet Ben l’Oncle Soul au téléphone. En 2015, il écoute en boucle une compilatio­n de The Voice qui traînait dans une voiture louée aux États-Unis. Revenu à Paris, il se rend compte que cette atmosphère lui manque. Il décide d’en faire un disque, se plonge dans le Great American Songbook, observe les traits de la personnali­té du chanteur-acteur, sa manière d’être en studio. Puis, il choisit le répertoire et s’entoure de Benjamin «Waxx» Hekimian aux guitares, de Mathieu Joly au clavier et à la programmat­ion, de Maxime Pinto aux saxophones et à la trompette.

Et Sinatra? «Pour moi, c’est un des héros des temps modernes. C’est déjà un combat, un acharnemen­t, une déterminat­ion. Un artiste qui peut friser la folie, mais qui est exemplaire d’une certaine manière. Il a commencé tout en bas, gamin de la rue, l’immigratio­n italienne, pas un sou en poche, et il est devenu l’entertaine­r américain par excellence. Il a vécu la grande vie de panache. Il a représenté le rêve américain. »

Mais tout n’était pas que lumière. «Bien sûr qu’il y avait aussi du sombre. Il était très solitaire, colérique, caractérie­l. C’était pas un homme commode. Il a sans doute été aidé à un moment par ses relations mafieuses, mais il expliquait que quand on est un enfant de la rue au New Jersey, les vraies grandes figures, les stars de la base, c’est la mafia italienne. C’est des gens qui ont un côté noir, violent, mais c’est les seuls qui viennent à Noël pour distribuer de la nourriture, de l’alcool et un peu de prohibitio­n à l’arrière des camions. »

Au cours de ses recherches, Ben l’Oncle Soul s’est intéressé à l’artiste dans plusieurs de ces contradict­ions. Une facette de la personnali­té du crooner l’a même rattachée à la musique black. « C’est un des premiers à avoir soutenu la cause des Noirs. Il disait que lorsqu’il était à l’école dans le New Jersey, il n’y en avait pas. Finalement, quand il s’est rendu compte que toute une partie de la population était mal-aimée et en danger, il a eu le pouvoir de faire des discours contre la ségrégatio­n raciale et il l’a fait. »

Et le disque Under my Skin? It Was a Very Good Year devient moins lente et plus légère que l’originale, percutée et sans les somptueux arrangemen­ts de cordes. All the Way est plus proche du reggae-soul. Fly Me to the Moon lorgne l’électrosou­l. I Love Paris donne dans le reggae et le dub. Dans l’ensemble, on est loin du music-hall, mais on se plonge dans une autre forme de charme avec la voix quelque peu éraillée de Ben l’Oncle Soul et sa singulière façon de s’approprier les grandes chansons de Sinatra. En France cet automne, le soulman intégrera à son spectacle un son et lumières comme dans un Broadway Show. En attendant, on dégustera au Québec la version strictemen­t musicale.

BEN L’ONCLE SOUL Québec: à la Place d’Youville, dimanche 16 juillet à 21 h 10 dans le cadre du FEQ Renseignem­ents : www.infofestiv­al.com

Montréal: au National, lundi 17 juillet à 20 h 30 (Première partie: Tamara Weber-Fillion) Renseignem­ents : festivalnu­itsdafriqu­e.com

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QUENTIN CURTAT Le soulman national de France vient défendre ses versions de Frank Sinatra, une icône américaine.

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