Cimetière musulman : le rôle de La Meute se précise
Le premier ministre Couillard s’engage à trouver une « solution » au projet battu par référendum
La porte-parole des opposants au projet de cimetière musulman minimise ses liens avec le groupe La Meute et affirme au contraire avoir cherché à les tenir à distance dans les semaines précédant le référendum.
Mécontente d’être associée au groupe, Mme Sunny Létourneau affirme que ses liens avec La Meute étaient surtout «virtuels». «Ils m’ont demandé s’ils pouvaient m’inscrire et j’ai accepté de communiquer les informations avec eux. Ils voulaient suivre le dossier. »
Lundi, Le Devoir révélait que Mme Létourneau ainsi que six militants du Comité de l’alternative citoyenne, étaient aussi membres du «clan» local de La Meute sur la plateforme Facebook. Des liens confirmés par le porte-parole national de La Meute, Sylvain Brouillette.
Créé en 2015 par des vétérans des Forces armées canadiennes, La Meute est un groupe identitaire qui dit vouloir combattre l’implantation de l’islam radical au Québec.
Une autre membre du Comité de l’alternative citoyenne a confirmé par écrit au Devoir qu’elle était bien membre du clan 12 de La Meute et « fière de l’être». «Nous n’avons aucune arme et voulons seulement être présents pour les projets qui ne sont pas toujours clairs avec les différents groupes musulmans», a-t-elle écrit. « Avec le CCIQ (Centre culturel islamique de Québec), il y a anguille sous roche. »
Selon Mme Létourneau, La Meute a rapidement manifesté de l’intérêt pour la controverse entourant le projet de cimetière mais elle dit avoir justement cherché à les tenir à l’écart. «Je leur ai demandé surtout de ne pas s’en mêler et ils m’ont écoutée.»
Par ailleurs, la porte-parole du groupe d’opposants ne veut pas dire ce qu’elle pense du groupe La Meute. Elle soutient vouloir surtout «échanger» et «créer de liens entre les groupes» et souligne qu’elle est aussi active dans une organisation musulmane, l’Association de la sépulture musulmane au Québec.
Sa présence sur la page Facebook du clan 12 de La Meute lui a même permis, dit-elle, de répliquer à des gens qui tenaient des propos trop agressifs. « J’ai l’impression de leur avoir apporté quelque chose», dit-elle.
«Il y avait beaucoup plus de membres avant [dans le clan 12]. Ils ont flushé un nombre considérable de membres parce qu’ils trouvaient que ces gens-là avaient des propos un petit peu trop agressifs dans certaines circonstances. »
Par ailleurs, des six membres du Comité de l’alternative citoyenne identifiés sur la page Facebook du clan 12, trois sont membres de la famille immédiate de Mme Létourneau dont son conjoint, sa mère et le conjoint de sa mère.
Sunny Létourneau signale enfin qu’elle a nécessairement des liens avec le porte-parole national de La Meute puisque ce dernier possède une compagnie de remorquage à SaintApollinaire dans le même domaine qu’elle (elle gère une entreprise de carrosserie).
Labeaume met en garde
Du côté de Québec, les révélations du Devoir à propos de La Meute ont vivement fait réagir le maire Régis Labeaume mardi. «C’est potentiellement dangereux ce genre de milice. C’est extrêmement toxique», a-t-il déclaré lors d’un point de presse devant différents médias de Québec.
«Moi, je n’accepte pas ça. Idéologiquement, ça me pue au nez des groupes comme ça. Si on veut combattre l’islamisme radical, il faut le faire dans les limites de la démocratie et du droit », a-t-il dit selon ce qu’a rapporté Le Soleil. « Je leur conseille de marcher très droit et de ne pas
faire de coche mal taillée. Ils auront zéro marge de manoeuvre. »
Des propos salués par le premier ministre Philippe Couillard en après-midi. «Monsieur le maire Labeaume s’est exprimé très fortement d’ailleurs sur la participation de certains groupes au processus du référendum, j’apprécie qu’il l’ait fait. »
M. Couillard s’est en outre engagé à offrir une solution à l’impasse du projet de cimetière musulman
de la mosquée de Québec. «Ce que je vois maintenant, c’est la nécessité pour notre gouvernement de nous impliquer pour trouver une solution», a-t-il soutenu. «Les gens ont le droit — franchement c’est fondamental — d’enterrer leurs morts. […] Ils ont besoin d’espace, d’une sécurité, d’avoir l’espace pour les prochaines années.»