Le Devoir

Une ruche d’art bourdonnan­te

Un nouvel espace communauta­ire de création artistique a vu le jour au Musée des beaux-arts de Montréal

- ÉMILIE FOLIE-BOIVIN

Dès qu’on entre dans la ruche d’art, nos yeux se posent au fond de la pièce, sur les étagères remplies de boutons, de bouts de tissu, de colle en bâton, de vieux livres, de magazines, de pâte à modeler et de pots de gouache et d’aquarelle. «Je te présente mes collègues!» lance, tout sourire, Stephen Legari, responsabl­e des programmes éducatifs et artthérape­ute, en montrant les tablettes de bois bien nourries de matériel recyclé, récupéré ou donné — le tout étonnammen­t bien ordonné.

Tout ça (et bien plus encore) est à dispositio­n des abeilles qui viennent créer dans ce local communauta­ire et social du Musée des beauxarts, où loge la 105e ruche d’art de ce réseau internatio­nal d’ateliers de création artistique communauta­ires tout à fait gratuits (voir l’encadré). «Qu’est-ce que vous avez envie de faire aujourd’hui ? » C’est par cette accueillan­te introducti­on que Stephen met ses visiteurs à l’aise. Les enfants, eux, savent tout de suite ce qu’ils ont envie de faire et volent illico vers ce matériel auquel ils sont depuis longtemps habitué, grâce à la garderie et aux cours d’arts plastiques.

Devant une page blanche, les adultes, eux, ont parfois besoin d’un intermédia­ire pour renouer avec ces amours de jeunesse. Souvent, Stephen leur propose de commencer par le collage. «C’est universell­ement facile et ça ne demande pas beaucoup d’idées», suggère-t-il.

Excellente occasion de passer du temps en famille, cette activité entièremen­t gratuite (même pas besoin de payer l’entrée au musée) réunit autour de ses tables autant des duos parrain-neveu, des jeunes couples, trois génération­s autour d’un même brico, ainsi que des artistes solos.

«La ruche ressemble à un gros village. Et c’est justement notre but: recréer le village perdu. Il n’est pas rare d’y retrouver une quarantain­e de personnes de tous les âges, de toutes les cultures. On peut facilement entendre plusieurs langues parlées en même temps ici ! » dit-il de son joli accent anglo. D’ici la fin de juillet, Stephen prévoit que 1000 créateurs seront venus butiner dans la ruche inaugurée à la fin de mars. Créateur de beau pour l’âme

Si Stephen a une formation en art-thérapie, l’environnem­ent des ruches d’art n’a rien de clinique. Nul besoin d’une prescripti­on pour avoir une raison de jouer avec du papier mâché ou de l’argile (le matériau le plus populaire de la ruche du MBAM).

Nos voisins de table vivent peut-être dans l’isolement, ils ont peut-être des troubles de santé mentale ou des problèmes d’ordre socio-économique, mais ça, personne ne le sait.

Les étiquettes restent à la porte, on oublie les diagnostic­s, ajoute Stephen Legari. « Il arrive que des gens aient des besoins plus en profondeur, et quand j’ai le privilège de connaître leur histoire, je peux alors faire des recommanda­tions et leur obtenir de l’aide», ajoute le thérapeute qui travaille auprès du musée depuis quelques années.

Lorsqu’on lui demande ce qu’il a vu de plus beau se fabriquer à la ruche, il réfléchit longuement. «C’est quand je vois quelqu’un arriver ici par hasard et qui n’en croit pas ses yeux qu’un tel endroit existe.

« C’est quand je vois un échange se développer entre des gens qui ne se connaissai­ent pas du tout avant d’entrer.

«C’est quand, à la fin de quelques heures de création, un enfant accourt de l’autre bout de la salle pour me montrer ce qu’il a fait, attendant d’être valorisé par mon enthousias­me.

«C’est quand je m’installe à la porte d’entrée et que j’observe la trentaine de participan­ts de tous les âges et de tous les horizons, en pleine création. À ce moment-là, je prends une bonne inspiratio­n pour dire “merci”. Tout ça, c’est ce que la ruche crée de plus beau. »

LA RUCHE D’ART DU MBAM

Ouverte les mercredis de 15 h à 20 h et les dimanches de 13 h à 16 h

Informatio­ns sur la ruche d’art du Musée des beaux-arts de Montréal et l’Atelier internatio­nal d’éducation et d’art-thérapie Michel de la Chenelière: mbam.qc.ca/education-arttherapi­e/a-propos-de-latelier Collaborat­rice

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PHOTOS PEDRO RUIZ LE DEVOIR D’ici la fin de juillet, le responsabl­e des programmes éducatifs au MBAM, Stephen Legari, prévoit que 1000 créateurs seront venus butiner dans la ruche inaugurée à la fin de mars.
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